En avril 2016, l’Assemblée nationale a adopté une loi pénalisant les clients de prostituées. Ce samedi, les travailleurs du sexe sont descendus battre le pavés à Paris pour clamer l’aggravation des conditions de leur vie et de travail ainsi que la recrudescence des violences. Une journaliste de Sputnik s’est rendue sur place.
La dégradation des conditions de vie et de travail depuis l’adoption de la loi du 13 avril 2016 pénalisant les clients des prostituées a poussé ces dernières à sortir manifester dans les rues de Paris. L’appel à manifestation publié sur Internet par le Syndicat du Travail sexuel (STRASS) a mentionné qu’il s’agissait bien de défendre les droits des travailleurs du sexe car « avec un pouvoir de négociation affaibli, des déplacements et un isolement accrus, les travailleurs du sexe prennent plus de risques pour leur santé et leur sécurité, conduisant à une perte du suivi sanitaire, des interruptions de traitement, et des témoignages de violences plus nombreux ».
La correspondante de Sputnik qui s’est rendue sur la place de Pigalle où la marche avait démarré à 15h en présente son bilan.
Entre 200 et 300 participants sont descendus dans les rues en scandant de différents slogans comme, par exemple, « Clients pénalisés. Les putes crèvent la dalle », «Arrêtez l’hypocrisie. Pas nos clients!», « Sexwork is work. My body is my business» (« Le travail sexuel est aussi un travail ». « Mon corps mon business»).Cependant l’ambiance reste pour l’instant calme, pas d’agitation ou de cas de violence.
Une participante, interrogée par Sputnik, a signalé qu’il s’agissait d’une loi « très hypocrite ».
« Avant on n’avait pas le droit de faire une forme de communication, de faire de la pub. Par contre, les gens avaient le droit de venir nous voir. Et aujourd’hui, depuis un an, on a le droit de faire de la pub mais par contre mon client n’a plus le droit de venir me voir. Ce qui fait qu’on a de moins en moins de clients. On est obligés d’accepter des clients qu’on n’aurait pas accepté de par ailleurs », a-t-elle expliqué.
En même temps, d’après la participante, à cause de cette loi, les vendeurs ou vendeuses du plaisir se retrouvent dans une situation très compliquée non seulement par rapport à leur situation financière mais également face à la multiplication des violences.
Ainsi, elle cite l’exemple d’une fille qui avait été agressée dans sa camionnette tandis qu’une autre qui était monté dans une voiture n’était plus jamais revenue.
« On a quand même besoin de vivre (…) mais les filles qui travaillent dans la rue n`ont quasiment plus de clients parce que les flics tournent. Les hommes ne viennent plus. Il y a quasiment 25-50% en moins de clients. Tout s’est déporté sur Internet », ajoute-t-elle.
Dans le même temps, vu l’insécurité de leur travail, les manifestants parlent de la nécessité de revoir le système social étant donné que la majorité d’entre eux sont déclarés comme auto-preneurs et pourrait donc ainsi bénéficier d’une forme d’indemnité journalière et de la sécurité sociale.
La loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées consistait à « faire prendre conscience que la prostitution est dans l’immense majorité des cas une violence à l’égard de personnes démunies et une exploitation des plus faibles par des proxénètes, qu’ils agissent de manière individuelle ou dans des réseaux réalisant des profits très élevés, la traite se cumulant souvent avec d’autres trafics ». Elle a été annoncée comme inscrite dans le cadre de la politique de lutte contre les violences faites aux femmes et d’égalité entre les femmes et les hommes.