Fillon, Macron, et Le Pen jouent les « Robin des riches »

Le premier promet 50 milliards de baisses d’impôts. Le second, 20 milliards. Mais ils se gardent bien de dire qui va payer la note. Quant au FN, il refuse obstinément de taxer les plus riches.

«C essons d’utiliser la fiscalité comme arme punitive », a une nouvelle fois clamé, mercredi, à Lyon, François Fillon. Celui-ci promet une offrande de 40 milliards d’euros aux entreprises et aux détenteurs du capital, via notamment la baisse de l’impôt sur les sociétés (à 25 %), la suppression de l’impôt sur la fortune (ISF). Aux ménages, il vend 10 milliards de baisse de « charges salariales ». Mais il se garde bien de souligner par quoi tout cela sera compensé. Cette « rupture fiscale » sera d’abord financée « par l’indispensable réduction des dépenses publiques », écrit-il dans son programme.

Les baisses d’impôts seront aussi amorties par une hausse de la TVA, qui va passer de 20 % à 22 %. « Personne n’a le sentiment de payer cette taxe, soulignent les économistes Henri Sterdyniak et Dany Lang. Mais la TVA est un impôt injuste puisqu’il frappe davantage les plus pauvres (qui consomment tout leur revenu) que les plus riches (qui épargnent). » Précisément, les 10 % les plus pauvres voient 12,5 % de leurs revenus engloutis par cet impôt indirect. Le matraquage fiscal, avec Fillon, ce sera tous les jours, dans les rayons du supermarché ! Le candidat de la droite « va prendre 300 euros par an dans la poche de chaque salarié payé au Smic, a aussi dénoncé Jean-Luc Mélenchon. Et que va-t-il faire ? Il va commencer par rendre 15 000 euros par an à chaque millionnaire de France ! » Comme si cela ne suffisait pas, les plus aisés vont bénéficier d’une ristourne de 2,5 milliards d’euros sur leur impôt sur le revenu grâce au « relèvement du plafond du quotient familial ».

Emmanuel Macron, lui non plus, n’a pas oublié de soigner les nantis. À première vue, son programme fiscal est moins saignant. Et il n’a pas voulu toucher à la TVA, mais il dorlote les actionnaires. Ceux-ci se verront dorénavant exonérer de l’ISF, impôt qui ne s’appliquera plus qu’au patrimoine immobilier (hors résidence principale). Ce n’est pas tout. Il invente un nouveau type de bouclier fiscal pour les revenus provenant d’intérêts bancaires, de dividendes, de plus-values et de tous les revenus tirés du capital mobilier. Ceux-ci seraient donc taxés à un taux uniforme de 30 %, en incluant les prélèvements sociaux et l’impôt sur le revenu. Ce principe de « flat tax », que l’on retrouve aussi dans le programme de François Fillon, constituerait une offrande de 3 milliards aux plus riches. Pour se faire plus proche du peuple, l’ex-banquier a certes promis une diminution de la taxe d’habitation (10 milliards d’euros) pour les ménages des classes populaires et moyennes. Sauf qu’en réalité, 40 % des ménages bénéficient déjà d’une exonération de cette taxe. Pas sûr, au final, que les ménages y gagnent…

Quant au FN, il surfe aussi sur les ambiguïtés. S’il propose de maintenir l’ISF, le programme de Marine Le Pen prévoit toutefois de supprimer « les impôts à faible rendement ». Une catégorie à laquelle l’ISF pourrait appartenir au vu de ce qu’il rapporte… Et si Le Pen dit refuser « toute hausse » de la TVA et « baisser de 10 % l’impôt sur le revenu pour les trois premières tranches », elle se garde d’évoquer une baisse de la première ou de défendre, comme Jean-Luc Mélenchon, une meilleure progressivité de l’impôt sur le revenu… Au FN, on ne s’en prend jamais aux plus riches ! En matière fiscale, les seules mesures clairement lisibles sont en leur faveur : au prétexte de « renforcer la solidarité intergénérationnelle », Le Pen permettrait ainsi de « transmettre sans taxation 100 000 euros à chaque enfant tous les cinq ans (au lieu de quinze ans actuellement) en augmentant le plafond des donations sans taxation aux petits-enfants à 50 000 euros, également tous les cinq ans ».

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