A voté. 243 128 personnes sur les 450 000 inscrites sur le site de la France insoumise (FI) avant le 1er tour de l’élection présidentielle se sont prononcées au sujet du second tour de dimanche. Le résultat a été rendu public hier : sur les trois options proposées par la FI, le bulletin de vote blanc ou nul arrive en tête avec 87 818 voix (36,12 %). Le bulletin de vote Macron est juste derrière, avec 84 682 voix (34,83 %). Enfin, 70 628 Insoumis (29,05 %) se sont exprimés pour une abstention, malgré la proposition de rendre le vote obligatoire contenue dans le programme « l’Avenir en commun ».
Annoncée par le mouvement il y a plus d’un an en cas de non-qualification de Jean-Luc Mélenchon au second tour, cette consultation a été organisée à titre informatif, sans qu’elle ne vaille consigne de vote. Si, entre les trois choix, les scores se répartissent assez équitablement, environ deux tiers des insoumis (65,17 %) ayant participé n’ont pas l’intention d’utiliser le bulletin de vote Macron. Une décision différente de celle des 7 millions de personnes ayant voté Mélenchon le 23 avril, puisque selon un sondage Elabe publié hier, 44 % d’entre elles déclarent vouloir utiliser le bulletin Macron.
« La politique de Macron fait monter le FN. Un vrai révolutionnaire ne vote pas pour un banquier, surtout quand il exige un vote d’adhésion. Je vais voter blanc. Le chantage au libéralisme en agitant l’épouvantail du fascisme, ça suffit. Et puis il faut bien que ceux qui nous font le coup à chaque fois se mettent aussi à flipper. Comme ça, ils vont arrêter », estimait lundi Max, lors de la manifestation parisienne du 1er Mai. « Il faut mettre le FN au plus bas, considérait pour sa part Eléa. Par réflexe antifasciste et parce qu’il faut qu’il soit battu. On ne peut pas parier sur le vote des autres pour éliminer Le Pen. Je condamne Macron, mais au moins on pourra se battre dans un cadre démocratique. Et puis je refuse de jouer à la roulette russe avec tous ceux que le FN vise avec obsession. » Si certains manifestants rassemblés devant le stand de la FI plaçaient Macron et Le Pen sur un pied d’égalité, au motif que « le libéralisme est un fascisme », ce n’était pas l’avis majoritaire, ni celui de Mélenchon et des orateurs nationaux de la FI.
Souhaitant que Le Pen soit battue, les cadres du mouvement argumentent depuis le 23 avril que les bulletins Macron et blancs sont dignes d’être utilisés. Sur le Discord de la FI, réseau social en ligne où débattent des dizaines de milliers de militants, la défaite de Le Pen est attendue. Certains, qui envisageaient de voter blanc (parfois pour « affaiblir Macron aux législatives », quand d’autres veulent voter Macron pour « mettre d’abord Le Pen au plus bas » et ne pas lui « laisser l’opposition »), ont changé de position au fur et à mesure que le candidat d’En marche ! dévissait dans les sondages. Afin de ne pas voir Le Pen élue, tout en « envoyant un message de lutte » à Macron, quelques insoumis commencent aussi à se mettre d’accord dans le cadre d’une « double lutte » : « toi tu votes blanc, et moi je vote Macron ». Une façon, pour certains d’entre eux, de « rester unis » en attendant les législatives.
L’ex-ministre grec des Finances Yanis Varoufakis a appelé à voter Macron au second tour de la présidentielle française. Ayant déjà déclaré que les « Américains devraient se boucher le nez d’une main et voter Clinton de l’autre » au sujet de l’élection outre-Atlantique pour barrer la route à Trump, il estime la situation similaire en France face à Le Pen. Listant les dangers du programme de Macron, il argumente qu’il « n’en est pas moins scandaleux pour tout progressiste de renvoyer dos à dos Le Pen et Macron ». Il indique ensuite refuser « de faire partie d’une génération de progressistes européens qui auraient pu empêcher Le Pen de gagner mais ne l’ont pas fait. (…) Le FN ne peut pas s’emparer de l’Élysée par surprise, du fait d’une indifférence tactique fautive de notre part ». Dans sa tribune, l’ex-membre de Syriza dévoile également qu’à ses yeux, Macron avait tenté d’aider la Grèce en 2015, mais avait été barré par Merkel et Hollande, sans qu’il soit possible de savoir quelles étaient les intentions réelles de l’actuel candidat.