Depuis 1967, les musulmans d’Espagne ont reçu un cadre juridique leur permettant de s’organiser en associations et fédérations, tant au niveau local que national.
Aujourd’hui, deux fédérations se disputent la représentativité de la communauté musulmane espagnole.
Rassemblant plus d’un million de fidèles selon le dernier recensement du département religion du Pew Research Center (2010), l’islam d’Espagne s’organise autour d’une « commission islamique espagnole » (CIE), crée en 1992. Celle-ci est l’interlocuteur direct du gouvernement espagnol et condamne régulièrement les attentats commis par des groupes terroristes. De cette commission, essentiellement chargée de surveiller et garantir les pratiques et espaces religieux musulmans dans le pays, dépendent la formation des imams, la nomination de professeurs de religion islamique et même les allocations ou subventions du ministère de la Justice.
Deux fédérations, souvent en désaccord
Membre à part entière du Conseil musulman de coopération en Europe (CMCE), organe représentatif devant l’Union européenne, la CIE rassemble les deux plus grosses fédérations islamiques d’Espagne : l’Union des communautés islamiques d’Espagne (UCIDE) et la Fédération espagnole des entités religieuses islamiques (FEERI).
La première réunit en son sein la majorité des fidèles, « des musulmans espagnols d’origine marocaine ou syrienne », avance le Père Gonzalo Villagran, jésuite, professeur à la faculté de théologie de Grenade (Espagne) et spécialiste de l’islam dans l’Espagne contemporaine. La seconde est « plutôt composée d’Espagnols convertis », note ce professeur, avant d’ajouter : « Ces deux fédérations entretiennent de mauvaises relations, chacune se présentant comme la plus légitime et représentative ». La commission islamique qui les chapeaute doit ainsi faire fréquemment face à des situations de blocage.
La formalisation récente des relations entre État et musulmans
Après une parenthèse de quatre siècles, la première loi permettant aux musulmans de s’organiser est promulguée en 1967. Résultat de l’ouverture progressive de l’Espagne et du Concile Vatican II, « elle signe les bonnes relations entre Franco et les musulmans », jauge le Père Villagran. Un an plus tard se crée une première association musulmane locale, à Melilla, l’enclave espagnole au Maroc. En 1971, un Syrien naturalisé espagnol, Riad Tatary Bakry, crée l’Association musulmane en Espagne (AME). Association d’ampleur nationale, elle édifie la première mosquée moderne de Madrid depuis 1 085 : la mosquée Abu Bakr.
Au total, l’Espagne compte 1 400 lieux de prières musulmans, soit 21 % de l’ensemble des lieux de culte, apprend-on dans un rapport de l’UCIDE sur l’étude démographique de la population musulmane en décembre 2015.