Une association sud-africaine de défense des femmes a intenté, lundi 28 août, une action en justice pour forcer l’État à reconnaître, dans la loi, le mariage islamique, y compris polygame.
La Haute cour de la province du Cap occidental, en Afrique du Sud, va examiner, le 8 septembre, une action intentée lundi 30 août par le Women’s Legal Center (WLC), une organisation sud-africaine de défense des femmes, contre l’État sud-africain.
Objectif : contraindre ce dernier à reconnaître dans la loi les mariages musulmans… y compris dans les cas de polygamie. Selon l’association en effet, l’absence de reconnaissance du mariage musulman constitue une discrimination envers les femmes musulmanes.
La polygamie déjà reconnue dans les mariages coutumiers
Ni la reconnaissance à l’état civil d’un mariage religieux, ni celle d’un mariage polygame, ne seraient des nouveautés au pays de Mandela. L’État sud-africain reconnaît déjà les mariages chrétiens, et surtout les mariages coutumiers.
Au titre du respect des cultures des peuples indigènes d’Afrique du Sud, ces mariages traditionnels, non reconnus sous le régime de l’apartheid, ont été peu à peu acceptés à partir de 1994, jusqu’à être officiellement reconnus et encadrés par une loi spécifique, entrée en vigueur en 2000, le Recognition of Customary Marriage Act.
La polygamie, qui existe dans ces mariages coutumiers, en particulier chez les Zoulous, principale ethnie sud-africaine, est également reconnue et encadrée par cette loi. Même si elle reste marginale, cette pratique connaît une certaine publicité ces dernières années dans le pays puisque le président sud-africain lui-même, Jacob Zuma, s’est marié six fois et a aujourd’hui quatre épouses.
La petite minorité musulmane sud-africaine (2 % de la population) n’est en revanche pas inclue dans cette législation spécifique. Ainsi, les mariages musulmans, même monogames, ne sont donc pas reconnus par l’État, à moins que le couple ne se marie aussi civilement. Quant aux situations de polygamie, seule la première épouse peut être mariée aux yeux de l’État.
Des procès réguliers
En l’absence de l’arbitrage d’un juge civil, divorces et héritages tournent souvent au désavantage de ces femmes, et des cas litigieux se terminent régulièrement devant les tribunaux, lors de procès parfois ubuesques, qui réactivent régulièrement les débats sur la nécessité d’un «Muslim Marriage Act», une loi encadrant le mariage musulman. Ce débat ressurgit, au gré des procédures, régulièrement depuis 1998, date à laquelle une commission législative avait pour la première fois travaillé, sans suite, sur le projet.
Le dernier cas en date remonte à la mi-août, lorsque l’administration a refusé d’exécuter le testament d’un homme musulman qui avait légué à parts égales ses biens à ses deux femmes, au motif que seule l’une des deux était son épouse aux yeux de l’État.
Ce cas récent est aujourd’hui brandi par l’association WLC, qui a bénéficié ces derniers jours d’un important soutien médiatique, dans une société au multiculturalisme revendiqué et qui se targue d’avoir la Constitution la plus avancée du monde en matière d’égalité hommes-femmes.
La Haute cour du Cap doit statuer sur la requête le 8 septembre.