Le ministre de l’Education Jean-Michel Blanquer veut développer l’enseignement du latin et du grec, y compris dans les quartiers en difficulté, estimant que les langues anciennes sont «modernes» et vecteurs de «lutte contre les inégalités», dans une critique implicite à Najat Vallaud-Belkacem.
«Une pensée facile consiste à dire que (le latin et le grec) sont désuets et élitistes», a-t-il déclaré mardi lors de la conférence de presse de rentrée du ministère. «C’est tout le contraire. Elles sont modernes car au coeur du langage (…) et pas élitistes car il faut précisément les implanter dans des quartiers en difficulté».
Sous le gouvernement Hollande, la ministre de l’Education avait supprimé les options de langues anciennes dans le cadre de la réforme du collège.
Jean-Michel Blanquer a, lui, demandé à un inspecteur général honoraire, Pascal Charvet, «d’identifier les voies et les leviers pour développer l’enseignement des langues anciennes en France, d’une manière qui corresponde au 21e siècle et qui sache nous donner +des racines et des ailes+».
Pascal Charvet, linguiste et helléniste, avait émis de vives critiques contre la réforme du collège mise en oeuvre par Mme Vallaud-Belkacem à la rentrée 2016.
Parmi les mesures de cette réforme, fortement amendée par le nouveau ministre pour la rentrée 2017, figurait la suppression des options de latin et de grec. Elles étaient remplacées par un enseignement pratique interdisciplinaire (EPI) Langues et cultures de l’Antiquité, et un enseignement de complément facultatif, un dispositif ouvert en théorie à plus d’élèves que les options d’auparavant.
Cette mesure avait été l’une des plus contestées par une partie des professeurs, des intellectuels et des ténors de la droite.
L’enseignement des langues anciennes n’avait toutefois pas attendu la réforme du collège pour s’effriter. L’option latin était suivie par environ 20 % des collégiens au début des années 2000, et 16,7 % en 2015, selon les chiffres de la direction des statistiques du ministre de l’Education. Il est enseigné surtout dans les collèges privés (20,2 %, contre 15,8 % dans le public).
L’intérêt des élèves diminue au fil des classes: ils étaient 19,7 % en cinquième à suivre cette option (chiffres de 2015), 15,4 % en troisième et 5,1 % en seconde. Le grec, une option qui démarre seulement en 3e, était choisi par 1,9 % des élèves en 3e et 1,1 % au lycée.
Enfin, l’étude de ces langues est très fortement corrélée à l’origine sociale de l’élève. Ainsi, en classe de 3ème, 9% des élèves de milieux très défavorisés étudiaient le latin en 2015, contre 23,2 % des élèves très favorisés.