L’Europe a délaissé les pays des Balkans où, pourtant, l’Etat islamique a posé ses pions, estime Charles Nonne, spécialiste de l’ex-Yougoslavie.
Les Balkans sont sortis des écrans radars depuis l’implosion de l’ex-Yougoslavie et la fin de la guerre de Bosnie. L’Union européenne (UE) prêche désormais les bienfaits du développement économique et social de la région, reléguant au second plan la préservation de l’Etat de droit et de la démocratie. Quant à la sécurité, la Russie, la Corée du Nord et la Syrie priment. La recrudescence du radicalisme observée depuis quelques années dans les Balkans recèle pourtant son lot de menaces potentielles et réelles.
Entre 1992 et 1995, la guerre de Bosnie a provoqué l’arrivée de contingents de combattants islamistes étrangers venus d’Europe occidentale et du Moyen-Orient. Implantés sous divers groupuscules, ils ont depuis contribué à la diffusion d’un islam d’un genre nouveau, parfois associé au salafisme, tranchant avec l’islam tolérant propre aux Balkans.
En Albanie et au Kosovo à majorité musulmane, ainsi qu’en Bosnie et dans le Sandjak au sud de la Serbie, l’extrémisme germe dans des mosquées dont le contrôle échappe aux autorités religieuses locales, notamment dans les zones rurales où elles ne disposent que d’un contrôle de façade des candidats au djihad.
Inévitablement, la torpeur économique des Balkans alimente le phénomène : paralysée par un système institutionnel byzantin et sclérosé, la Bosnie demeure réticente aux réformes. Sous perfusion de l’UE et du FMI, le Kosovo n’a pas encore trouvé de gouvernement capable de faire reculer un chômage de 28,7 % et de faire sortir un quasi tiers de la population du seuil de pauvreté. Les voisins progressent sans décoller.