L’Union européenne a affiché jeudi un soutien clair au gouvernement espagnol sur la crise catalane, affirmant qu’il n’existait « pas d’espace pour une intervention » de sa part, contrairement à ce que réclament les indépendantistes.
« On ne va pas vous cacher que la situation est préoccupante », a déclaré le président du Conseil européen Donald Tusk lors d’un sommet des dirigeants de l’UE à Bruxelles.
« Mais il n’y a pas de place, pas d’espace pour une médiation, une initiative ou une action internationales », a insisté M. Tusk, appuyant ainsi fortement la position de Madrid.
Un peu plus tôt, la chancelière allemande Angela Merkel et le président français Emmanuel Macron avaient eux aussi soutenu le gouvernement espagnol, tandis que leur homologue belge Charles Michel appelait à une « désescalade » en Espagne.
Madrid veut éviter que la question catalane ne soit traitée dans le cadre européen et les institutions européennes ont pour l’heure toujours considéré qu’il s’agissait d’une « affaire intérieure » espagnole.
Le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy, qui s’apprête à suspendre l’autonomie de la région, est arrivé sans un mot au sommet.
Il n’a pas non plus évoqué le sujet jeudi après-midi devant ses pairs, selon des sources diplomatiques.
La grave crise née du référendum d’autodétermination du 1er octobre, interdit par la justice et le gouvernement espagnols, ne figure pas à l’agenda du sommet, mais elle occupe tous les esprits.
« Nous soutenons la position du gouvernement espagnol (…) Nous espérons aussi que des solutions pourront être trouvées sur la base de la Constitution espagnole« , a déclaré Mme Merkel en arrivant à Bruxelles.
Les dirigeants européens vont « envoyer » un « message d’unité autour de l’Espagne », a dit M. Macron, qui a rencontré M. Rajoy en fin d’après-midi. La Catalogne n’a pas été évoquée au cours de l’entretien consacré, selon les deux parties, à la question du travail détaché.
De leur côté, les chefs de gouvernement belge et luxembourgeois, Charles Michel et Xavier Bettel, ont préféré insister sur un appel au dialogue entre Madrid et les indépendantistes catalans.
Malgré les protestations espagnoles, MM. Michel et Bettel ont rappelé qu’à leurs yeux, « la violence n’est pas une réponse », une condamnation à peine voilée des violences policières qui ont émaillé le vote interdit du 1er octobre.
« Qui peut valider la violence, d’où quelle vienne ? Personne ! », a lancé le Premier ministre belge, qui a démenti de supposées tensions avec Madrid dont la presse s’est fait l’écho.
Appel à la désescalade
L’Espagne est « un pays ami » et il n’y a « aucun incident, aucune crise », a assuré M. Michel. Mais il a aussi plaidé « pour une désescalade » en Espagne.
« Je ne pense pas qu’on trouvera une solution dans l’intérêt de tous dans une logique d’escalade politique », a-t-il fait valoir, semblant renvoyer dos à dos le gouvernement et les dirigeants indépendantistes catalans.
Le Premier ministre slovène Miro Cerar a pour sa part reconnu avoir « une position émotionnelle » dans ce débat en raison du processus d’indépendance de son pays, sorti de la fédération yougoslave en 1991.
« La situation en Catalogne actuellement est tout à fait différente », a-t-il souligné.
Mais « si la question de l’autodétermination est soulevée, cela doit être résolu conformément à l’ordre constitutionnel (…) et par-dessus tout d’une façon pacifique », a commenté le Slovène.
Le gouvernement espagnol a fait jeudi un pas de plus vers une suspension de l’autonomie de la Catalogne, accusant le dirigeant séparatiste Carles Puigdemont de chercher « l’affrontement systématique » dans une crise sans précédent depuis 40 ans.
« Si le gouvernement persiste à empêcher le dialogue et poursuivre la répression, le Parlement de Catalogne pourra procéder (…) au vote d’une déclaration formelle d’indépendance », a écrit jeudi M. Puigdemont dans une lettre adressée à M. Rajoy.
Ne pas faire référence à l’indépendance aurait pu ouvrir la voie à un apaisement des tensions. Mais le gouvernement espagnol a jugé ces propos menaçants.
Les mesures de suspension de l’autonomie seront définies samedi lors d’un conseil des ministres extraordinaire qui devra les transmettre au Sénat, en vue de leur validation fin octobre.