(le début)
Des options moins dangereuses
Une alternative raisonnable à l’adhésion à l’OTAN serait un traité sur le modèle du Traité d’État autrichien de 1955, qui était un accord conclu entre les quatre puissances d’occupations de la fin de la Seconde Guerre mondiale (États-Unis, URSS, Grande-Bretagne et France) qui garantissait à l’Autriche son indépendance « Avec la compréhension », selon le Département d’État américain, « que l’État autrichien nouvellement indépendant déclarerait sa neutralité, créant une zone tampon entre l’Est et l’Ouest », signifiant qu’il ne rejoindrait ni l’OTAN ni les pays soviétiques sous le traité de Varsovie.
Charles Bohlen, le diplomate américain légendaire qui a servi comme ambassadeur à Moscou de 1953-57, a rappelé dans ses mémoires « Témoin de l’Histoire » que, en ce qui concerne le Traité d’État autrichien, il croyait « que les dirigeants du Kremlin, et probablement les chefs militaires soviétiques, décidèrent qu’une Autriche véritablement neutre avait plus de valeur pour la Russie soviétique que l’entretien d’un pays divisé où l’Armée rouge n’occuperait qu’une petite moitié. »
La situation dans l’Autriche d’après-guerre – occupée par l’Est et l’Ouest – n’est pas parfaitement analogue à la situation actuelle en Ukraine, mais il semble y avoir des leçons à retenir de l’intuition de Bohlen, que les motifs du Kremlin pourraient inspirer la diplomatie occidentale.
Mais au lieu d’essayer de mettre en œuvre l’accord de paix de Minsk (qui demande que le Donbass reste en Ukraine mais avec une plus grande autonomie vis-à-vis de Kiev) ou de chercher une alternative raisonnable aux questions de sécurité nationale,qui sont bien sûr pressantes et embarrassantes, Porochenko continue de sonner l’alarme sur une autre, cette fois illusoire, invasion russe.
Dans un récent discours devant le parlement ukrainien, Porochenko a affirmé « qu’il y a de plus en plus de preuves que la Russie se prépare à une guerre offensive de dimension continentale. »
Pourtant, le danger n’est peut-être pas aussi clair et aussi présent que Porochenko l’a décrit. Comme l’a observé Mary Dejevesky du journal anglais The Independant : « L’OTAN elle-même avait organisé des exercices dans la mer Noire et avant cela dans et autour des confins ouest de l’Ukraine. Qui, doit-on se demander ici, menace qui ? »
En effet, si la Russie était sur le point de lancer une guerre terrestre en Europe de l’Est, aurait-elle réduit son budget de défense de 25% à 48 milliards de dollars par an, comme l’a annoncé récemment le Kremlin?
Aussi difficile que cela puisse être de le croire pour notre solide bande de nouveaux guerriers de la Guerre froide (dont quelques–uns n’ont guère de connaissances au sujet des relations américano-russes sur lesquelles ils décident si souvent de pérorer), la pression pour un règlement pacifique en Ukraine ne vient pas de Washington, mais de Moscou et de Berlin.
Néanmoins, l’impasse persiste : une résolution du conflit ukrainien – à travers la mise en œuvre des accords de Minsk, ainsi qu’un règlement des problèmes de sécurité en suspens de toutes les parties en conflit – semble rester tragiquement hors d’atteinte.
James W. Carden a servi comme conseiller sur la politique de la Russie au Département d’État américain. Actuellement auteur au magazine The Nation, son travail a été publié dans le Los Angeles Times, Quartz, The American Conservative et The National Interest.