Corse : l’indépendance n’est pas à l’ordre du jour mais…

La victoire en Corse de la liste nationaliste au premier tour des élections territoriales consacre l’alliance entre autonomistes et indépendantistes.

Selon eux, la question de l’indépendance ne se pose pas… du moins pour les dix prochaines années.

Alors que la crise catalane bat son plein, la large victoire, dimanche 3 décembre, en Corse de la liste nationaliste au premier tour des élections territoriales consacre la stratégie pragmatique de l’alliance entre autonomistes et indépendantistes.

Ils espéraient recueillir un peu plus de 35 % des voix. Finalement, au premier tour des élections territoriales en Corse, les nationalistes de la liste « Pé a Corsica » (« Pour la Corse ») ont remporté 45,36 % des suffrages. Une victoire plus large qu’attendue qui interroge sur une éventuelle demande d’indépendance ou d’autonomie de l’île de Beauté.

Pour l’historien Michel Vergé-Franceschi, auteur de « L’identité corse » (Éd. Payot), le scrutin de dimanche constitue « une victoire de l’histoire de la Corse » du fait notamment de « l’effacement des partis venant de Paris » : les Républicains et la République en marche plafonnent, en effet, respectivement à 12,77 % et 11,26 %… derrière la droite régionaliste et très loin derrière les nationalistes de « Pé a Corsica ».

 « Pour les nationalistes, ce sont des résultats importants qui confirment l’élan né aux territoriales de décembre 2015, qui avaient porté Gilles Simeoni à la présidence du conseil exécutif de Corse et Jean-Guy Talamoni à la tête de l’Assemblée de Corse », estime l’historien.

« Il n’y aura pas, pendant dix ans, de procédure d’indépendance »

Car la victoire de dimanche consacre une nouvelle fois l’alliance pragmatique entre deux hommes qui n’ont pas forcément, à long terme, les mêmes desseins pour la Corse. « Gilles Simeoni est un autonomiste qui est persuadé que la majorité des Corses ne voudront pas de l’indépendance. Il défend l’idée d’une Corse ancrée dans la Constitution, jouissant d’un statut d’autonomie de plein droit et de plein exercice », résume Paul-François Torre, directeur délégué à la coordination éditoriale de France 3 Corse.

Quid de l’indépendantiste Jean-Guy Talamoni ? « Il a compris qu’il fallait convaincre les Corses, et non les contraindre. Sans rien renier de ses solidarités avec la lutte du Front de libération nationale corse (FLNC) depuis quarante ans, il joue la carte de la démocratie pour lever l’hypothèque de la violence clandestine, qui lui était opposée jusqu’à présent pour ouvrir le dialogue avec les nationalistes », estime-t-il. Le renoncement à la violence du FLNC en 2014 sera d’ailleurs un préalable à l’alliance entre autonomistes et indépendantistes.

Lundi matin, au lendemain de leur victoire commune, les deux hommes affichaient d’ailleurs leur accord sur le déroulé des dix prochaines années, mais pas au-delà. Ainsi, Jean-Guy Talamoni assurait sur France Inter préparer « la séquence suivante, qui pourrait être l’indépendance dans 10 ans ou dans 15 ans ». Et de préciser : « Nous avons un accord de mandature avec nos partenaires autonomistes pour dix ans. Il n’y aura donc pas, pendant ces dix ans, de procédure d’indépendance ».

Presqu’au même moment, Gilles Simeoni déclarait sur Europe 1 : « La question de l’indépendance n’est pas posée aujourd’hui. […] Nous voulons un statut d’autonomie. […] Les indépendantistes aujourd’hui inscrivent leur action dans un cadre exclusivement démocratique et disent que ce sont les Corses qui décideront. Si les Corses ne veulent pas d’indépendance, il n’y aura pas d’indépendance ».

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