Une entreprise française est soupçonnée d’avoir vendu du matériel de cybersurveillance au régime égyptien.
Des juges d’instruction français enquêtent sur la société Nexa Technologies (ex-Amesys), soupçonnée d’avoir vendu du matériel de cybersurveillance au régime du président égyptien Al-Sissi pour l’aider à traquer ses opposants. Cette information judiciaire pour « complicité d’actes de torture et de disparition forcée », confiée en novembre au pôle crimes contre l’humanité à Paris, fait suite à une plainte de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de la Ligue des droits de l’Homme (LDH). Amesys est déjà au cœur d’une autre enquête pour avoir fourni du matériel similaire à la Libye sous le régime Kadhafi.
Un système d’écoutes à 10 millions d’euros. La plainte des deux ONG s’appuyait sur une enquête du magazine Télérama qui révélait en juillet la vente, en mars 2014, par d’ex-dirigeants d’Amesys, opérant derrière deux nouvelles entités, d' »un système d’écoutes à 10 millions d’euros pour lutter – officiellement – contre les Frères musulmans, l’opposition islamiste en Égypte. Appelé « Cerebro », ce programme permet de traquer en temps réel les communications électroniques d’une cible, à partir d’une adresse mail ou d’un numéro de téléphone par exemple. Il s’agit d’une version actualisée de celui vendu en 2007 par Amesys, à l’époque filiale de Bull, au régime libyen de Mouammar Kadhafi.
40.000 prisonniers politiques. Selon le Cairo Institute for Human Rights Studies, une ONG qui soutient leur démarche, cette vague répressive s’est notamment concrétisée par « plus de 40.000 prisonniers politiques en détention en Égypte » sous le régime Al-Sissi. « C’est le premier dossier ouvert en France en compétence universelle qui concerne l’Egypte », s’est félicité Me Clémence Bectarte, une de leurs avocats. « On sait que l’arme de la surveillance, présentée comme un outil de lutte contre le terrorisme islamiste en Egypte, est en réalité destinée à surveiller les opposants et toutes les voix contestataires », a-t-elle ajouté.