Ce document doit permettre à chaque foyer de connaître les consignes à suivre en cas de crise ou d’attaques. Une démarche inédite depuis la Guerre froide alors que la Russie accroît son activité militaire en Mer baltique.
«Si une guerre survient» (Om kriget kommer): tel est le nom du livret destiné à informer la population suédoise sur la meilleure conduite à tenir en cas de «crises et catastrophes en temps de paix, mais aussi d’attaques menées sur la société et la Suède». Il sera distribué à 4,7 millions de foyers en mai.
Ce livret contient «tout ce dont la société a besoin pour être préparée à un conflit, pas seulement militaire», a expliqué au Financial Times Christina Andersson, à la tête du projet mené par l’Agence de contingence civile, qui fait partie du ministère suédois de la Défense. Sont ainsi proposés des conseils en cas de catastrophe naturelle, de terrorisme, ou encore d’attaque informatique. Il fournit ainsi des informations sur les moyens de se protéger et de s’assurer de disposer de denrées de base.
Les premiers ouvrages de ce type avaient été édités dans les années 40, pendant la Seconde Guerre mondiale. La Suède n’en avait plus diffusé depuis les années 80.
La réédition d’un tel livret, et le fait que les municipalités doivent rouvrir les abris mis en place durant la Guerre froide, interviennent alors que la Suède remobilise ses forces de défense. Le service militaire obligatoire a été rétabli, l’augmentation allouée à défense pour la période 2016-2020 s’élève à 1,1 milliard d’euros, portant le budget à 4,9 milliards d’euros.
En décembre 2012, le chef d’état-major de l’armée suédoise d’alors, Sverker Göranson, avait estimé, dans un rapport, que la Suède pouvait tenir une semaine en cas de guerre. En cause, une réduction importante de budget alloué à la défense depuis la fin de la Guerre froide. En 2013, le pays ne comptait que cent cinquante avions de combat, et sept bataillons.
Depuis 2014, la Suède a accordé une attention accrue à la défense. En cause, l’inquiétude envers son voisin russe. Stockholm, qui a condamné l’annexion de la Crimée, a vu Moscou intensifier ses exercices en Mer baltique. Ceux-ci ont notamment mené à l’incursion d’un sous-marin à l’origine non-identifiée dans les eaux territoriales suédoises. Stockholm avait alors été décidé de déployer des troupes de façon permanente sur l’île de Gotland, qui se trouve entre la Suède et les Pays baltes.
Traversée par le pipeline Nord Stream, accueillant régulièrement des exercices militaires, la Mer baltique représente un enjeu important, à la fois pour la Russie, l’Otan et la Suède. En 2016, les tensions avaient atteint un haut niveau, après que des navires de guerres américains avaient été frôlés par des Soukhoï.
Les quatre formations de l’opposition de centre droit ont déclaré que le pays devrait se porter candidat à une entrée au sein de l’Otan. Mais la classe politique est partagée sur la menace que représente la Russie. Et la confusion règne parfois, comme lorsque la commission de défense a écrit, en décembre, qu’«une attaque armée dirigée vers la Suède n’est pas à exclure». À l’opposé, plusieurs ministres de la mouvance centre gauche, majoritaire, ont déclaré la semaine dernière qu’une telle attaque était «peu probable».
Le premier ministre Stefan Lofven a insisté sur la nécessité d’une «défense psychologique», capable, au-delà de l’aspect militaire, de «protéger [le pays] de tentatives extérieures visant à influencer la démocratie».