Au tribunal administratif de Lille, un dossier sur deux est lié aux migrants

Face à l’afflux de dossiers, la juridiction administrative a créé un pôle spécifique, avec quatre magistrats, entièrement consacré au contentieux des étrangers.

Au tribunal administratif de Lille, presque une requête sur deux concerne des contentieux liés à des étrangers (44 %), un chiffre bien au-dessus de la moyenne nationale où il représente «seulement» un tiers des dossiers. Avocats comme juges confirment que les recours contre les décisions prises par le préfet se sont fortement multipliés. Au point qu’un pôle spécifique est entièrement consacré, depuis septembre 2017, aux contentieux liés aux étrangers.

Ces quatre magistrats dédient désormais leur temps aux dossiers des personnes en situations irrégulières. Ils sont saisis par les associations ou les migrants eux-mêmes pour revoir par exemple, les demandes d’expulsion, et juger de la légalité des actes posés par le préfet. Une sorte de combat de la dernière chance. «Parfois, après le refus de titre de séjour, c’est le seul moyen d’avoir un contact avec l’État, de se défendre coûte que coûte, de pouvoir s’expliquer», remarque Élodie Beharel, déléguée nationale en région Hauts-de-France, pour la CIMADE, association de soutien aux migrants.

Parmi les requêtes: des arrêtés préfectoraux portant refus de titre de séjour ou ordonnant l’éloignement des étrangers en situation irrégulière (OQTF, obligation de quitter le territoire français), à savoir le renvoi dans le pays où ils ont laissé leurs empreintes (Dublin III) ou l’expulsion vers leurs pays d’origine .

Les raisons de ces recours sont très variées. Certains souhaitent rester avec leur famille, qui se trouve en France. D’autres refusent de retourner dans le pays où ils ont fait une première demande d’asile, à leur arrivée. «Ils ont peur de retomber dans un réseau de traite des êtres humains, à des fins prostitutionnelles comme en Italie, et dont ils ont réchappé. Ils peuvent aussi vouloir bénéficier de meilleures conditions d’accueil et de soin que celles rencontrées dans certains pays comme l’Espagne, débordée par l’afflux d’étrangers», observe Me Sophie Danset, avocate lilloise spécialisée dans le droit des étrangers, qui plaide régulièrement au tribunal administratif.

Elle note que les assignations à résidence – en attendant l’expulsion – sont désormais systématiques. Une observation que confirme le tribunal administratif: en 2017, les litiges sur ces mesures ont connu une hausse de 600 % – pour arriver à 140 recours.