Parti avec cinq mois de retard, le gouvernement Merkel IV va avoir du pain sur la planche car la nouvelle grande coalition allemande est attendue sur plusieurs gros dossiers.
Les adhérents du Parti social-démocrate (SPD) ont approuvé à 66 % l’accord de coalition avec le bloc conservateur d’Angela Merkel (CDU-CSU). Ce vote ouvre la voie à la formation d’un gouvernement en Allemagne, plus de cinq mois après les élections législatives. De nombreux chantiers attendent déjà cette nouvelle grande coalition, déjà éprouvée en 2005 – 2009 puis 2013 – 2017.
La politique européenne
La réponse allemande au discours de la Sorbonne d’Emmanuel Macron sur l’Europe se faisait attendre tant que le gouvernement d’Angela Merkel n’était pas en place. Désormais, quand et comment l’Allemagne va-t-elle se positionner pour réformer une Union européenne qui en a bien besoin ? Très pro-européen, Martin Schulz (SPD) a réussi à faire de l’Europe le tout premier volet du contrat de coalition. Le nouveau gouvernement veut « en partenariat étroit avec la France renforcer durablement et réformer la zone Euro, pour que l’Euro puisse mieux résister aux crises globales ». La grande coalition est même prête à « une participation plus élevée de l’Allemagne ». Emmanuel Macron, qui a déjà salué le vote des militants SPD hier, pourra compter sur les socio-démocrates aux postes très stratégiques des Affaires Étrangères et des Finances.
La politique migratoire
C’est sans aucun doute le sujet qui a marqué le troisième mandat d’Angela Merkel. Sa politique d’ouverture a permis à des centaines de milliers de migrants de trouver refuge en Allemagne. Mais cette décision a divisé le pays et a alimenté la montée de l’extrême-droite. La CSU a donc obtenu l’inscription dans le contrat de coalition un plafond « allant de 180 000 à 220 000 par an ». Le regroupement familial sera également limité à 1000 personnes par an.
La politique de santé
Cela a été la dernière pomme de discorde entre le SPD et la CDU. Les socio-démocrates souhaitaient mettre en place une protection santé unique pour remplacer le système actuel à deux vitesses (privé/public), jugé inégalitaire. La CDU/CSU a freiné et le contrat de coalition ne comprend donc pas de réformes profondes. Mais la pression des socio-démocrates ne devrait pas cesser pour autant. Angela Merkel a peut-être réussi un nouveau coup stratégique en plaçant à ce poste épineux du Ministère de la Santé son principal rival interne, Jens Spahn.
La question du diesel
Plutôt inattendue, cette question s’est invitée sur l’agenda politique avec la décision de la Cour administrative la semaine dernière concernant les interdictions de véhicules diesel dans les centres-villes en cas de pollution. Le tout nouveau gouvernement est déjà pris de court. Avant même d’entrer en vigueur, le contrat de coalition qui voulait « éviter les interdictions » est déjà dépassé sur ce point. Le nouveau gouvernement va devoir jongler entre les multiples conséquences de ce jugement, la pression de l’UE et le mécontentement des usagers du diesel.
La montée de l’extrême-droite
Avec la prolongation de la Grande coalition, c’est finalement au parti d’extrême-droite Alternative für Deutschland que reviendra le rôle de plus grand parti d’opposition. Son leader, Alexander Gauland, veut tout simplement « chasser Madame Merkel ». Après son score historique de septembre (12,6 %), l’AfD a profité du grand flou autour du nouveau gouvernement pour continuer à monter dans les sondages. Elle est désormais au coude-à-coude avec les socio-démocrates. CDU/CSU et SPD ne pourront donc pas faire l’économie d’une forte remise en question s’ils veulent éviter une nouvelle débâcle lors des élections régionales en Bavière et en Hesse à l’automne. Avec en ligne de mire les élections européennes qui se tiendront au printemps 2019.