Le président Erdogan verrouille le système électoral turc

Après des heures de débats et d’altercations, le Parlement turc a adopté, mercredi 14 mars à l’aube, une série d’amendements destinés à renforcer la mainmise sur le processus électoral du président, Recep Tayyip Erdogan, et de son Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur).

A dix-huit mois d’une échéance électorale cruciale — municipales en mars 2019, législatives et présidentielle en novembre 2019 —, le « Reis » (« chef« , son surnom) et ses partisans font feu de tout bois pour assurer leur maintien au pouvoir. Le scrutin de 2019 marquera un tournant car c’est alors qu’entrera en vigueur le système d’ « hyperprésidence » voulu par l’homme fort de la Turquie et approuvé par référendum en avril 2017.

Pour garantir son succès, l’AKP a consolidé son alliance avec le Parti de l’action nationaliste (MHP), réalisant la synthèse « islamo-nationaliste » imaginée dès les années 1970, soit la convergence de vue entre les tenants de l’islam politique et les ultranationalistes.

« Le risque de voir les élections se dérouler sous la menace des armes pourrait mettre la pression sur les votants »

Avec 357 sièges sur 550 au Parlement, l’alliance n’a eu aucun mal à faire voter les amendements. A la faveur de ceux-ci, les autorités nomment désormais les responsables des bureaux de vote, dont la localisation peut être modifiée pour raison de sécurité.

Encore plus déroutant, tout électeur peut appeler les forces de l’ordre à intervenir sur les lieux du scrutin s’il se sent lésé d’une manière ou d’une autre, une prérogative jusqu’ici réservée au seul responsable du bureau de vote. « Le risque de voir les élections se dérouler sous la menace des armes pourrait mettre la pression sur les votants », a dénoncé le député Ugur Bayraktutan, du Parti républicain du peuple (CHP, kémaliste).