Deux Unes et dossiers consacrés cette semaine au chef de l’Etat. Décryptages de l’exercice du pouvoir par Emmanuel Macron, sa stratégie politique, ses ambitions, parfois démesurées, parfois inquiétantes mais toujours rationnelles car réfléchies.
On découvre, ou redécouvre pas mal de choses, avec Le Point pour commencer, qui titre en Une : « Macron 2, le compte à rebours ». « Malgré les conflits sociaux, le président prépare une nouvelle étape clé de son quinquennat », peut-on lire en annonce de l’enquête. Car, si « les français perçoivent le Macron des salons internationaux et des tribunes françaises », ils ignorent tout en revanche de « celui qui s’active en cuisine », explique Le Point avant de nous éclairer : « Il existe pourtant au Palais de l’Elysée des rendez-vous dont la stratégie politique constitue l’essentiel du menu. » L’hebdo fait ici référence aux diners de la majorité réunissant, bien souvent le lundi, responsables parlementaires et ministres, une dizaine de convives autour du président. Et là, pas de plan de table, « ne prime pas l’ordre protocolaire, mais l’intérêt politologique des participants », nous confie Le Point. Le seul ordre du jour à ces occasions, c’est « la structuration de la vie politique », selon les dires de François Patriat, le président du groupe La république en Marche au Sénat. Mais attention précise le magazine, ici « règne une atmosphère de confidentialité requise : Emmanuel Macron a horreur de voir le moindre écho transparaitre dans la page 2 du Canard Enchainé. » Il ne doit pas être le seul me direz-vous.
Que se passe-t-il pendant les diners de la majorité ?
Visiblement, comme pendant les autres rendez-vous – pas toujours notés à l’agenda – avec les élus du groupe LREM, le président lance les sujets et puis il écoute, raconte Le Point. Il « grogne » tout de même de temps en temps. Comme récemment, selon les confessions anonymes d’un ministre, lorsque le président s’est montré mécontent de l’apathie de son parti politique, un mouvement qui lui semble manquer d’initiative et qui n’échappe pas, ajoute Le Point, à la méthode Macron, à savoir l’hyper centralisation du pouvoir. Dans une interview quelques pages plus loin, la ministre du travail Muriel Pénicaud défend d’ailleurs la méthode en admettant qu’il « faut parfois bousculer les corps intermédiaires ».
Tout cela car le Président regarde déjà vers l’avenir et il le sait bien, estime Le Point, il doit aborder les prochaines élections en position de force. A commencer par les élections européennes de 2019, Emmanuel Macron souhaite « gouverner l’Europe » et « contrer la vague populiste en fédérant les modérés du continent » explique un autre article. Ces élections européennes permettront par ailleurs de préparer les municipales de 2020, en « filtrant » les élus compatibles avec la présidence, c’est l’explication donnée par Sébastien Lecornu le secrétaire d’Etat à la Transition écologique. Et pour remplir ces objectifs, poursuit Le Point, Emmanuel Macron devra parachever la recomposition politique du pays : « incarner pour de bon le progressisme et renvoyer les autres partis au statut d’extrême »… Tout un programme !
Un programme qui inquiète Marianne
Nouvelle formule pour Marianne, qui promet d’être « plus percutant, plus proche des attentes des lecteurs », Marianne qui souhaite, selon ses mots, « éclairer les coulisses où se prennent les décisions qui engagent la marche du monde et notre pays »… Là aussi vaste programme, mais le début est plutôt percutant il faut l’admettre. Marianne titre en Une sur « Macron, la tentation de la toute puissance », et nous propose un photo-montage, montrant le visage d’Emmanuel Macron incrusté sur le corps de Louis XIV, le Roi Soleil, qui pose fièrement en armure.
Pour les amateurs d’art, c’est une toile de Hyacinthe Rigaud datant de 1701 qui est détournée, et Marianne légende ainsi : « Au fil d’une geste présidentielle, Jupiter occupe désormais une place de roi soleil, au centre de la galaxie de la politique française ». Certes, Marianne n’est pas le premier à le faire, mais il faut reconnaitre que ça fait toujours sourire un photomontage. Par contre, passée cette première impression, l’article est moins amusant… On peut y lire qu’« à trop prétendre incarner l’autorité présidentielle restaurée, le chef de l’Etat en vient à gouverner seul, en contournant les corps intermédiaires. Au risque de se couper du pays,même certains soutiens du président commencent à s’en inquiéter eux aussi… »
Nicolas Sarkozy, inquiété par des fantômes du passé
« Sarkozy, rattrapé par le fantôme de Kadhafi », annonce par ailleurs Marianne, qui livre quatre pages pour décrypter les rôles des protagonistes d’une « affaire d’Etat hors norme ». On n’apprend rien de neuf, mais on a une bonne vue d’ensemble pour ceux qui auraient loupé le train. Non, ce qui est neuf, c’est l’interview que Nicolas Sarkozy a accordé au Journal du Dimanche. Il se défend une nouvelle fois après sa mise en examen pour le financement dit libyen de sa campagne présidentielle de 2007.
Mais, si l’entretien est inédit, les arguments eux ne le sont pas, ce sont les mêmes que ceux livrés lors de son passage remarqué au journal télévisé de TF1 jeudi 22 mars. Dans le JDD, Nicolas Sarkozy vise « trois groupes d’individus qui ont intérêt à le salir ». Il cible « une bande d’assassins qui entouraient Kadhafi », « les gens du journal Mediapart et leurs comparses qui se comportent en militants politiques », et « les affidés du régime déchu de Kadhafi, dont le plus visible est Ziad Takieddine ». Nicolas Sarkozy entend utiliser toutes les voies de recours, et il blanchit ici de tout soupçons Brice Hortefeux, son « plus vieil ami » déclare-t-il, et Claude Guéant, présenté comme « un excellent collaborateur ».
La crise de Mayotte
L’Obs pour sa part présente en Une un dossier « spécial immobilier, Paris, Ile de France ». « Profitez de la reprise ! » nous invite l’hebdo. Mais ce qui a retenu notre attention, ce ne sont pas les conseils pour un acquérir un appartement parisien que la majorité des Français ne peuvent plus s’offrir. Non, c’est le grand format sur Mayotte, une « île aux urgences », « bloquée par des manifestations contre l’insécurité », comme la présente l’Obs. Une île qui cumule « les problèmes sociaux » nous explique le magazine, c’est le département le plus pauvre. Et on trouve un reportage sur ce qui est désormais la plus grande maternité de France, la maternité de Mamoudzou « où viennent accoucher des centaines de comoriennes clandestines », souligne l’Obs. Des mères qui, bien souvent, rejoignent l’ile en risquant leur vie à bord de kwassa kwassa. Vous savez ces embarcations dont le président Macron s’était amusé…
Le Point se penche lui aussi sur les problèmes de Mayotte, et le magazine cible plus particulièrement les tensions inter-communautaires qui « enflamment l’ile, déjà au bord de l’implosion ». Le Point revient par exemple sur les « milices » qui organisent des rondes de nuit dans le nord de l’ile, pour intercepter elles-mêmes les clandestins comoriens. Une situation particulièrement instable et préoccupante…