« Vous êtes les bienvenus chez nous pour travailler, étudier, rendre visite à vos familles, dépenser votre argent avenue Louise, visiter l’Atomium ou Bruges, la plus belle ville du monde, mais ne demandez pas l’asile en Belgique », a martelé jeudi le secrétaire d’Etat Theo Francken à Tirana.
« La Belgique n’est pas l’eldorado, elle n’est pas le pays où ruisselle le lait et le miel », a-t-il insisté auprès de différentes autorités et lors d’une conférence de presse au cours de laquelle il a rappelé que les Albanais entrant irrégulièrement sur le territoire belge étaient refoulés immédiatement.
Le secrétaire d’Etat à l’Asile et la Migration a indiqué que les motifs de voyage de nombreux ressortissants restaient souvent flous, ceux-ci ne disposant bien souvent pas des moyens de subsistance requis pour séjourner sur le territoire, même pour un court séjour. Depuis la libéralisation des visas, il y a 7 ans, le nombre d’Albanais à la frontière a augmenté spectaculairement en Europe, y compris en Belgique, à la conquête d’un avenir meilleur. Or, malgré la libéralisation, des conditions restent fixées concernant l’octroi du visa. Le message du secrétaire d’Etat N-VA se veut double, de prévention et d’information à destination de la population albanaise, et de coercition à l’égard des autorités locales, invitées à intensifier les contrôles au départ.
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Une campagne de sensibilisation avait été lancée par la Belgique et les Pays-Bas, avec l’Organisation internationale des Migrations (OIM), afin d’informer les ressortissants albanais sur leurs droits et devoirs lorsqu’ils désirent se rendre dans l’espace Schengen, et notamment en Belgique. Le secrétaire d’Etat s’est informé à l’aéroport de Tirana (Rinas) de l’efficacité des contrôles. Il en fera de même demain vendredi au port de Durres. « Ce serait bien de checker ceux qui se rendent à Brussels Airport », a-t-il lancé à deux des trois officiers de Frontex, l’agence européenne des frontières, présents à Rinas Airport pour soutenir et observer leurs collègues albanais.
Theo Francken a eu jeudi des entretiens, qu’il a qualifiés de « constructifs », avec le ministre de l’Intérieur Fatmir Xhafaj et sa ministre adjointe, Rovena Voda. Une délégation se rendra à Bruxelles dans les prochaines semaines pour mesurer l’ampleur des problèmes soulevés par la Belgique.
Comme c’est le cas dans d’autres pays Schengen, de nombreux Albanais arrivés en Belgique y demandent l’asile, une requête généralement refusée alors que le pays se trouve sur la liste des pays sûrs. « Vous avez un gouvernement démocratique. Il n’y a pas de conflit ici, ce n’est pas la Syrie ou l’Afghanistan », a scandé Theo Francken. « Les Albanais demandent l’asile en Belgique mais ne l’obtiennent pas », a-t-il insisté. Seules 5% des demandes sont acceptées. Malgré cela, leur nombre augmente. On en comptait une bonne septantaine par mois l’année dernière, on est passé à 100 le mois dernier. 136 ressortissants albanais ont été expulsés depuis le début de l’année. Un vol européen de rapatriements est organisé chaque semaine par l’Europe à destination de Tirana.
Theo Francken s’est félicité jeudi de la bonne coopération avec les autorités albanaises en matière d’identification de leurs ressortissants et des rapatriements. Celle-ci vaut aussi pour les personnes ayant fait l’objet d’une condamnation en Belgique. 180 ex-détenus albanais ont été expulsés vers leur pays d’origine en 2017, ce qui en fait le troisième pays avec lequel la Belgique collabore en la matière (309 ex-détenus Roumains ont été expulsés ainsi que 182 ex-détenus marocains).
En dépit de cette « bonne collaboration », les problèmes persistent et le secrétaire d’Etat espère que cette nouvelle visite en Albanie fera en sorte de les résoudre, faute de quoi, estime-t-il, il faudra suivre le chemine d’une « suspension provisoire » de la libéralisation de visa. M. Francken n’a cependant pas été jusqu’à évoquer cette piste, qui devrait passer par un aval européen, jeudi lors de ses entretiens. C’est que le premier ministre Charles Michel est attendu, lui, lundi à Tirana.
Toujours flanqué du directeur général de l’Office des étrangers Freddy Roosemont, Theo Francken reprendra son bâton de pèlerin pour aller en juin à Tbilissi où la Belgique est également vue comme un pays d’asile depuis la libéralisation des visas.