Le verdict est cruel et sans appel. Un an après l’élection d’Emmanuel Macron, les ministres restent d’illustres inconnus.
C’est ce qui ressort de l’enquête Odoxa-Dentsu Consulting pour Le Figaro et Franceinfo. Plus d’un sondé sur deux ne les connaît toujours pas. Pire, 78 % des Français considèrent qu’ils «ne sont pas proches des gens».
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Ils sont vus comme des «technocrates» et «mauvais communicants». Lorsqu’ils les connaissent, ils ont plus souvent une mauvaise opinion (31 %) plutôt qu’une bonne (23 %). Globalement, 6 Français sur 10 sont mécontents de l’action du gouvernement, en particulier sur les domaines de la sécurité (53 %), sur l’éducation (54 %) et surtout sur les questions économiques et sociales (64 %).
Voilà donc Emmanuel Macron seul face à l’opinion publique, sans bouclier ni relais. «C’est son choix, explique un proche. Il a trop vu le pouvoir se déliter sous François Hollande. Il a voulu bâtir une équipe efficace, quitte à en payer les conséquences.» Le «choix» s’est donc porté sur des experts, spécialistes dans leur domaine, courant dans leur couloir, ne cherchant pas la lumière pour la lumière, ne cultivant pas d’ambition cachée. Un exemple illustre cette priorité: quand François Bayrou, l’un des rares profils expérimentés, a dû quitter la Chancellerie en juin 2017, emporté par la polémique sur les eurodéputés du Modem, le chef de l’État l’a remplacé par Nicole Belloubet, une juge du Conseil constitutionnel, sans grande notoriété.
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«Quand j’échange avec mes interlocuteurs, je connais les sujets, ça facilite les choses», souligne l’actuelle ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche Frédérique Vidal, qui fut à la tête de la faculté de Nice-Sophia-Antipolis. «Le gouvernement n’est pas constitué de gens qui se sont détestés pendant quinze ans, qui ont bourré les urnes dans des congrès les uns contre les autres, qui ont accumulé les haines recuites, souligne un secrétaire d’État. Devenir ministre n’est pas leur aboutissement. C’est un facteur d’apaisement important.»
Si l’exécutif fonctionne avec moins d’à-coups et de couacs, les néophytes de la politique n’impriment pas dans l’opinion publique. Gênant pour les membres du gouvernement confrontés à des grognes sociales, comme la ministre des Transports Elisabeth Borne ou Frédérique Vidal, qui peinent à faire entendre leurs arguments face aux syndicats. D’ailleurs, 46 % de sondés ne connaissent pas l’ancienne patronne de la RATP et 63 % l’ancienne présidente de l’université Nice-Sophia-Antipolis.
À l’inverse, les ministres les plus connus sont ceux qui bénéficiaient déjà d’un matelas de popularité avant d’arriver au pouvoir. C’est le cas de l’ancienne championne d’escrime Laura Flessel au Sport, du ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, ou de Nicolas Hulot, dont la cote s’effondre toutefois. «L’icône est maintenant exposée au feu, et, du coup, ses silences et ses esquives ressortent aux yeux des gens», grince un ancien de la campagne. Seul membre du gouvernement ayant réussi à se faire un prénom et un nom depuis son arrivée: le premier ministre Édouard Philippe. Inconnu il y a un an, ils ne sont désormais plus que 20 % à ne pas le connaître. En revanche, l’ancien maire du Havre enregistre un taux de 42 % de mauvaises opinions.