Les magistrats espagnols ont réclamé lundi la démission du ministre de la Justice pour avoir mis en doute la compétence d’un des juges qui ont disculpé cinq jeunes accusés de viol, suscitant une vague d’indignation en Espagne.
Les juges n’ont retenu contre les cinq Sévillans, qui s’appelaient eux-mêmes « la Meute », que le chef d’accusation d' »abus sexuels » et non de viol, après des relations sexuelles non consenties avec une Madrilène de 18 ans pendant les fêtes de la San Fermin à Pampelune en 2016. Ils avaient diffusé la vidéo de leur agression sur les réseaux sociaux.
L’un des trois juges s’était même prononcé pour leur relaxe, suscitant une vague de protestation en Espagne contre « la justice patriarcale ».
« On m’a dit que c’est quelqu’un qui a été sanctionné, qui a un problème… », a déclaré lundi à la radio le ministre Rafael Catala, s’étonnant que l’organe de direction du pouvoir judiciaire n’ait pas « agi préventivement » contre ce magistrat.
Il a néanmoins admis ne pas savoir « en détail » ce qui lui était reproché.
« Les commentaires sur la capacité ou non d’un magistrat sont une imprudence pour qui exerce les fonctions de ministre de la Justice », ont réagi dans un communiqué commun sept associations de juges et de procureurs.
« Aujourd’hui, c’est pour le jugement de +La Meute+, mais demain, cela peut être pour n’importe quel agissement qui ne soit pas du goût du ministre ou de son gouvernement (…). C’est pourquoi nous exigeons (…) la démission du ministre de la Justice », écrivent-elles.
Le parquet a annoncé qu’il ferait appel de la décision et le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy s’est prononcé pour une révision du Code pénal afin de mieux définir les agressions sexuelles et les viols.
Dans un communiqué, le Conseil général du pouvoir judiciaire (CGPJ), l’organe qui nomme les juges en Espagne, a souligné qu’il était essentiel d' »éviter l’usage politique du (pouvoir) judiciaire et la remise en cause de l’indépendance, de l’impartialité et du professionnalisme des juges et des magistrats ».
Une pétition demandant à l’organe de direction du pouvoir judiciaire la révocation des trois juges a recueilli 1,3 million de signatures.
Des Espagnoles se sont également mises à raconter sur les réseaux sociaux les agressions sexuelles qu’elles ont subies avec le hashtag #Cuéntalo (« Raconte-le »), donnant un nouvel écho à la vague mondiale #MeToo qui avait eu peu de répercussions en Espagne.