A l’annonce par le Pentagone de sa «nouvelle posture nucléaire», le 3 février, nombreux ont été les experts qui ont estimé que, contrairement à ce qu’avaient déclaré
les responsables américains de la Défense qui avaient désigné la Russie suivie de la Chine comme une menace, la véritable cible du Pentagone est la Corée du Nord.
Ces analystes ont justifié leur hypothèse par le choix des Etats-Unis de privilégier cette fois des armes atomiques moins puissantes, équivalentes des bombes qui ont été larguées sur Hiroshima et Nagasaki peu avant la fin de la Seconde Guerre mondiale. Si la Défense américaine annonce se doter de nouvelles armes nucléaires de faible puissance, croient savoir ces experts, ce n’est pas seulement pour prévenir ses adversaires stratégiques que sont Moscou et Pékin de la poursuite du programme nucléaire américain en réponse à leurs doctrines respectives, mais c’est pour envisager des attaques d’un impact nettement moins important que celui prévu par exemple en cas d’usage des armes nucléaires fabriquées dans le passé (avant les accords New Start de 2010)– et toujours stockées bien qu’inactives- contre des cibles russes. Selon ces mêmes experts, le scénario d’une frappe contre la Corée du Nord n’a jamais été exclu. Il représente une option non seulement actuelle mais appuyée par la Corée du Sud, placée depuis le début des années 1950 sous le parapluie militaire américain, davantage par le Japon qui n’a jamais accepté que Pyongyang devienne une puissance nucléaire et fasse de l’archipel nippon une cible potentielle. Le jeune autocrate qui dirige la Corée du Nord, Kim Jong Un, 33 ans, est depuis quelques semaines présentée par de nombreux titres de la presse américaine et occidentale comme un «stratège» dont il faut se méfier et qu’il s’agit de contenir au double plan militaire et surtout économique ! Pareille lecture trouve une sérieuse justification dans les déclarations du vice-président des Etats-Unis. Hier, à Tokyo, Michael Pence a annoncé que son pays s’apprêtait à dévoiler les sanctions économiques «les plus dures» jamais prises contre Pyongyang. «J’annonce aujourd’hui que les Etats-Unis vont bientôt dévoiler les sanctions économiques les plus dures et les plus offensives jamais prises contre la Corée du Nord», a déclaré M. Pence, ajoutant que Washington allait «intensifier» ses pressions pour pousser le régime nord-coréen à renoncer à son programme de développement nucléaire et balistique. M. Pence n’a donné aucune précision sur les nouvelles sanctions envisagées mais l’année dernière, rappelle-t-on, à l’initiative des Etats-Unis, le Conseil de sécurité a imposé trois séries de sanctions économiques à la Corée du Nord. Elles touchent notamment ses exportations de charbon et de fer, sa pêche et son industrie textile, et limitent ses approvisionnements en pétrole. Ces sanctions qui touchent par ricochet les intérêts russes et chinois, Moscou et surtout Pékin continuant d’entretenir un «smig» d’échanges commerciaux avec Pyongyang, peuvent être aggravées. Fait important à souligner, le vice-président américain s’exprimait hier aux côtés du Premier ministre japonais Shinzo Abe à l’issue de «discussions sur la menace nord-coréenne», au deuxième jour d’une étape de trois jours au Japon.
Ses déclarations interviennent deux jours avant l’ouverture, vendredi prochain, des Jeux olympiques d’hiver en Corée du Sud et pour lesquels une délégation sportive nord-coréenne est attendue. «Toutes les options sur la table» «Nous ne permettrons pas à la propagande de la Corée du Nord de prendre en otage le message et l’image des Jeux olympiques», a déclaré Michael Pence alors que Séoul avait auparavant salué la présence nord-coréenne aux jeux mais sans rien lâcher sur la question nucléaire. Les Etats-Unis et la Corée du Sud avaient accepté de reporter leurs exercices annuels militaires conjoints, mais seulement jusqu’à la fin des Jeux paralympiques de mars prochain. «Toutes les options sont sur la table et les Etats-Unis ont déployé au Japon et ailleurs dans la région des équipements militaires parmi les plus sophistiqués, pour protéger notre patrie et nos alliés et nous continuerons de le faire», a ajouté le vice-président américain. Les «options» que le responsable américain a évoquées sont ouvertement soutenues par Tokyo. «Que le monde sache bien cela : nous allons continuer à intensifier notre campagne de pression maximale tant que la Corée du Nord ne fera pas de pas concrets dans la direction d’une dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible», a déclaré M. Pence dans la capitale du Japon. Le Premier ministre japonais Shinzo Abe, qui se rendra lui aussi à Pyeongchang pour les jeux d’hiver, a réitéré que le Japon ne pourrait «jamais accepter une Corée du Nord équipée de l’arme nucléaire». «Nous ne devons pas nous laisser distraire par l’offensive de charme de la Corée du Nord», a-t-il ajouté.
M. Pence a néanmoins déclaré mardi que les Etats-Unis ne fermaient pas la porte à une rencontre avec les Nord-Coréens en marge des Jeux olympiques de Pyeongchang. «Concernant toute interaction avec la délégation nord-coréenne, je n’ai pas sollicité une rencontre, mais nous verrons ce qu’il se passera», avait-il indiqué mardi dernier à des journalistes au cours d’une escale en Alaska, alors qu’il était en route pour le Japon.