Le Premier ministres belge Charles Michel et son homologue français, Edouard Philippe, ont annoncé lundi un nouveau renforcement de la coopération bilatérale – déjà intense – en matière de sécurité intérieure et de lutte contre le terrorisme islamique.
Ils ont exprimé l’intention de l’élargir à l’Espagne et au Maroc en les invitant à des réunions associant les ministres de la Justice.
M. Michel et ses ministres de l’Intérieur et de la Justice, Jan Jambon et Koen Geens, se sont rendus à Paris pour une rencontre avec leurs homologues français, dans un format désormais appelé « Val Duchesse » du nom de la première réunion de ce type tenue à Bruxelles.
Elle se tenait, symboliquement dans le nouveau palais de justice de Paris – pas encore inauguré, comme l’a fait remarquer le chef du gouvernement français.
Les deux Premiers ministres ont salué la qualité de la coopération qui s’est établie entre Paris et Bruxelles après les attentats qui ont touché la France (le 13 novembre 2015) et la Belgique (le 22 mars 2016), faisant des centaines de morts et revendiqués par le groupe djihadiste Etat islamique (EI).
« Nous avons été frappés dans notre chair », a rappelé M. Michel lors d’une conférence de presse conjointe avec son homologue français.
Depuis lors, les gouvernements, les autorités judiciaires – également au plus haut niveau – et les services de renseignement ont établi une coopération « à un niveau inégalé », a souligné M. Philippe devant la presse à l’issue de la rencontre, en citant notamment les échanges d’informations et la formation d’équipes communes d’enquêteurs.
Les autorités des deux pays ont déjà échangé cette année 9.200 informations sur les réseaux terroristes et les individus soupçonnés d’en faire partie, a indiqué M. Michel – soit un nombre plus élevé que celles échangées au sein de l’Office européen de coopération policière Europol, basé à La Haye.
« Nous avons voulu aller plus loin, parce que la menace est élevée, endogène et commune », a expliqué M. Philippe.
« Nos deux pays franchissent aujourd’hui une étape importante pour que notre coopération s’étende aux nouveaux risques en matière de terrorisme islamiste et de radicalisation violente. Le lancement de travaux sur les détenus radicalisés violents en fin de peine illustre ainsi notre volonté d’adapter notre coopération à des problématiques sans cesse renouvelées, indique une déclaration commune publiée lundi soir.
Les gouvernements français et belge ont concrètement décidé de collaborer davantage pour la lutte contre la radicalisation, notamment pour les détenus condamnés pour terrorisme et qui arrivent en fin de peine, dont le nombre est appelé à croître.
Les deux pays coopèrent aussi par le biais d’échange d’informations sur la prise en charge des mineurs et envisagent des réunions quadripartites associant également les ministres de la Justice d’Espagne et du Maroc.
« Nos deux pays doivent anticiper, dès aujourd’hui et ensemble, la sortie des détenus condamnés pour des infractions terroristes en lien avec l’islam radical, ainsi que celle des détenus de droit commun quand il aura été observé qu’ils feraient l’objet d’un processus de radicalisation », a déclaré M. Philippe.
La semaine dernière, la ministre de la Justice française, Nicole Belloubet, avait évalué à près de 450 le nombre de détenus radicalisés censés sortir des prisons françaises d’ici fin 2019, dont une cinquantaine de condamnés pour des faits de terrorisme.
Sur plus de 70.000 détenus en France, quelque 500 personnes sont incarcérées pour des faits de terrorisme, et 1.200 prisonniers de droit commun ont été identifiés comme « radicalisés ».
« Nous proposons de réfléchir à une harmonisation, entre services français et belges, des modalités de signalement des détenus radicalisés sortant de prison, dans le système d’informations Schengen », a détaillé M. Philippe.
Selon M. Michel, face à une menace qui « se transforme » – comme l’a montré l’attentat qui a couté la vie à deux policières à Liège le 29 mai dernier – , il faut s’adapter » et « encore renforcer » la coopération en l’élargissant au trafic d’armes et de drogues.