La Première ministre britannique Theresa May affronte mardi un débat à haut risque lors du nouvel examen de son projet de loi sur le Brexit par les députés, qu’elle a mis en garde contre une rébellion qui pourrait affaiblir sa main face à Bruxelles.
Ce texte, intitulé « Loi (de retrait) de l’Union européenne », doit mettre fin à la suprématie du droit européen sur le droit britannique, et organiser la transposition de certaines règlementations européennes.
Les députés, qui avaient adopté une première version en janvier, doivent se prononcer sur une série d’amendements introduits lors de l’examen du texte à la Chambre des Lords, la chambre haute du Parlement britannique, allant à l’encontre du projet gouvernemental et que Mme May compte bien voir annulés.
Etant donné sa courte majorité aux Communes, et face à des récalcitrants contre la ligne qu’elle a tracée, la cheffe du gouvernement a convoqué l’ensemble des députés de son parti lundi soir pour les rappeler à l’ordre.
« Grande trahison »
« Le message que nous envoyons au pays cette semaine avec nos votes est important », a-t-elle prévenu. « Nous devons montrer clairement que nous sommes unis, en tant que parti, dans notre détermination à mettre en place la décision prise par le peuple britannique » qui avait voté à 52% pour sortir de l’Union européenne en juin 2016.
« J’essaie de négocier le meilleur accord possible pour le Royaume-Uni » avec Bruxelles, a-t-elle fait valoir. « Mais si les amendements des Lords sont maintenus, cela ébranlera notre position dans les négociations ».
Une mise en demeure qui a conduit le secrétaire d’Etat à la Justice et député conservateur pro-UE Phillip Lee à annoncer sa démission mardi matin afin de voter librement, a-t-il expliqué.
Signe des tensions provoquées par ces votes, le tabloïd pro-Brexit The Sun a mis en garde les députés : « Vous avez le choix: Grande-Bretagne, ou grande trahison ? », a-t-il titré en une mardi. « Ignorez la volonté du peuple à vos risques et périls », a pour sa part admonesté le Daily Express.
La position du gouvernement semble particulièrement fragile sur l’un des 15 amendements, adoptés par les Lords, qui donne au Parlement le pouvoir de renvoyer, avec des directives, le gouvernement à la table de négociations si l’accord obtenu avec Bruxelles ne lui convient pas.
Amendements de compromis
Cependant, le député conservateur europhile Dominic Grieve a proposé une alternative de dernière minute, qui laisserait plus de latitude au gouvernement en offrant la possibilité au Parlement d’adopter une motion contraignante seulement en cas d’absence d’accord avec Bruxelles.
Sur l’autre sujet qui posait problème, la possibilité de maintenir le Royaume-Uni dans l’union douanière, l’exécutif semble avoir trouvé un arrangement avec sa majorité avec un amendement de compromis porté par quatre députés tories, Oliver Letwin et Nicky Morgan -pro-UE-, et Jacob Rees-Mogg et Bill Cash -anti-UE.
Selon Dominic Grieve sur la BBC, la question de l’amendement sur l’union douanière serait ainsi « résolue » tandis que celle sur les prérogatives du Parlement en cas de rejet de l’accord final reste « source de difficultés ».
Son collègue Jacob Rees-Mogg s’est lui montré confiant quant à la discipline qui sera observée au sein de son parti.
« Il y aura de l’unité. Ce ne sera pas parfait mais cela devrait suffire pour faire passer le texte et renforcer la position de Theresa May », a-t-il estimé sur la radio LBC.
Car le rapport de force actuel au sein du gouvernement pourrait forcer les députés conservateurs pro-européens à modérer leurs velléités de rébellion : s’ils infligent de nouvelles défaites à Mme May, ce sont les ministres partisans d’une ligne dure sur le Brexit qui pourraient en sortir renforcés.
« La position de la Première ministre est périlleuse, il se peut que les gens estiment qu’elle a déjà assez de problèmes comme ça », souligne, sous couvert d’anonymat, un député conservateur pro-européen.
Parmi les autres amendements étudiés figurent notamment l’exigence du maintien des normes environnementales européennes ou la suppression de date de retrait de l’UE, le 29 mars 2019, du texte de loi.