Promettant un « changement radical », le candidat de gauche Andrés Manuel Lopez Obrador espère marquer l’histoire ce dimanche et obtenir une large victoire à l’élection présidentielle mexicaine, où il fait figure de favori.
« Ce sera un événement historique, la victoire de tout un peuple face à l’immoralité et la décadence de ces derniers temps », a-t-il lancé à ses partisans lors de son dernier meeting de campagne dans l’emblématique stade Azteca de Mexico.
A 64 ans, « AMLO », comme le surnomment les Mexicains, d’après ses initiales, se présente comme le candidat anti-système et anti-corruption, voulant chasser « la mafia du pouvoir ».
Après deux précédents échecs, il est cette fois crédité de plus de 20 points d’avance dans les sondages sur ses adversaires des partis traditionnels.
Derrière lui, le jeune conservateur Ricardo Anaya vante sa « modernité » à la tête une coalition de droite et de gauche (formée par le PAN, le PRD et le Movimiento Ciudadano). Il devance José Antonio Meade, du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI, droite), un indépendant choisi par le parti au pouvoir, qui figure en troisième position.
« Nous avons testé le PRI et le PAN et c’était un désastre, le moment est venu de changer, c’est l’heure du Morena (Movimiento Regeneración Nacional/Mouvement de régénérescence nationale – réd.) », le parti de Lopez Obrador, juge Carlos Miguel Salinas, un instructeur d’éducation physique de 26 ans.
DOSSIER : Elections mexicaines
Lopez Obrador a su capitaliser sur le ras-le-bol des Mexicains après un mandat de Peña Nieto marqué par la corruption et des violations des droits de l’homme.
Si les pronostics se confirment, les élections de ce dimanche marqueront un tournant dans la vie politique mexicaine.
« Certains comparent ce tournant à un tremblement de terre, d’autres considèrent qu’il s’agit d’un changement structurel. Ce qui est sûr c’est que le système des partis traditionnels s’est vu ébranlé par la poussée du Morena », analyse Duncan Wood, directeur de l’Institut du Mexique au Centre Woodrow Wilson.
En plus du mandat présidentiel, les quelque 89 millions d’électeurs mexicains devront renouveler plus de 18.000 mandats, dont les sièges de 500 députés et 128 sénateurs, ainsi que de nombreux postes régionaux ou locaux.
La campagne électorale aura été « la plus sanglante » de l’histoire du Mexique, avec au moins 136 assassinats d’hommes politiques – dont 48 candidats ou pré-candidats – selon le cabinet d’études Etellekt.
Un nombre beaucoup plus élevé que lors de la campagne de 2012, où neuf politiciens et un candidat avaient été tués.
La violence est telle que beaucoup de Mexicains craignent de se rendre aux urnes: « Nous ne savons pas si nous allons en revenir vivant », s’inquiète Margarita Rodarte, une femme de Ciudad Juarez (nord), l’une des villes les plus violentes du pays.
La lutte contre la violence et la corruption est au coeur des priorités d’AMLO. L’ancien maire de Mexico (2000-2005) promet de faire reculer la pauvreté qui alimente les cartels et veut combattre la corruption pour financer des programmes sociaux.
Sa proposition d’offrir une amnistie aux petits délinquants travaillant pour les cartels a déclenché une vive polémique. Amnistie « ne veut pas dire impunité », s’est-il défendu.
Il propose un « gouvernement austère, sans luxe ni privilèges », qui réduira de jusqu’à 50% les salaires des hauts fonctionnaires, y compris le sien, et promet de transformer en centre culturel la résidence présidentielle de Los Pinos, « hantée » selon lui à cause des mauvaises ondes.
De nombreux Mexicains et analystes critiquent cependant son manque de propositions concrètes, et sa rhétorique « populiste », craignant qu’il n’entraîne le pays sur la voie du Venezuela.
Beaucoup s’interrogent également sur sa future relation avec le président Donald Trump alors que des dossiers cruciaux sont sur la table, tels que la crise migratoire ou la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain