Édouard Philippe a dévoilé le contenu du plan d’action contre le terrorisme, insistant notamment sur «cinq axes prioritaires».
Le premier ministre Édouard Philippe s’est rendu vendredi matin au siège de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) à Levallois-Perret pour dévoiler les contours du nouveau plan d’action contre le terrorisme (Pact). Il contient au total 40 mesures opérationnelles, dont 8 qui resteront secrètes mais à effet immédiat. Accompagné de la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, et du ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, l’hôte de Matignon a insisté sur «cinq axes prioritaires». Sur le plan de la «connaissance», il a annoncé la création d’une inédite cellule de profilage des auteurs d’attaques terroristes et d’identification des facteurs de passage à l’acte. Placée au sein de la Coordination nationale du renseignement et de la lutte contre le terrorisme (CNR-LT), elle va permettre de passer au crible, dans «les plus minuscules détails», les attaques qui ont déjà visé le sol français pour «mieux identifier et comprendre la menace terroriste et ses évolutions».
Sur le front de l’«entrave», le plan prévoit, comme l’avait annoncé l’Élysée, la mise en place d’une cellule spécifique chargés du suivi des détenus terroristes ou les détenus de droit commun radicalisés en fin de peine. Placée au sein de l’UCLAT et associant le renseignement pénitentiaire, elle aura une lourde tâche. Au 1er juin 2018, les prisons françaises comptaient 506 individus détenus pour actes de terrorisme et 1109 prisonniers de droit commun identifiés comme radicalisés. 450 d’entre eux devraient être libérés d’ici fin 2019. «Certains représentent encore une menace, même à l’issue de leur incarcération, et doivent évidemment faire l’objet d’un suivi renforcé», a concédé Édouard Philippe, qui a par ailleurs révélé sa volonté de «renforcer la détection et l’identification» des radicalisés en associant les maires aux Groupes d’évaluations départementaux (GED). Les élus, qui ne sont «pas appelés à devenir des agents de la DGSI», comme l’a répété le premier ministre, auront en retour accès à des données confidentielles dans le cadre de conventions passées avec les préfets.
Au chapitre de la «protection», le plan va intensifier les «enquêtes administratives de sécurité permettant de renforcer la sécurisation de l’accès à des lieux ou des fonctions sensibles». Ainsi, a rappelé le chef du gouvernement, «le service national d’enquêtes administratives et de sécurité (SNEAS) sera en mesure, à l’horizon 2019, d’effectuer chaque année environ 800.000 enquêtes ou ‘criblages’, lors du recrutement dans les professions de souveraineté nationale, des habilitations au secret de la défense nationale, de l’organisation de grands événements et des emplois dans le domaine des transports».
Création d’un parquet antiterroriste
Au niveau européen, le premier ministre a rappelé «la création de l’académie européenne du renseignement, annoncée par le président de la République à la Sorbonne en septembre 2017 et dont la première session se tiendra au premier semestre 2019» avant d’insister sur «l’action résolue de la France, désormais soutenue par la Commission, pour renforcer l’effectivité du retrait rapide des contenus illicites sur Internet». Enfin, le plan envisage de mieux considérer la protection des victimes du terrorisme, «élément déterminant de la capacité de résilience de notre société».
«Deux années après la mise en œuvre du plan d’action contre la radicalisation et le terrorisme (PART), la conception de ce nouveau plan d’action contre le terrorisme répond à une donne sécuritaire en mutation, marquée par la répétition d’attaques perpétrées au cours des dix-huit derniers mois par des acteurs essentiellement endogènes, précise-t-on à Matignon. Le caractère meurtrier et l’imprévisibilité des récents passages à l’acte appellent un nouvel ajustement des leviers d’action de l’État». En effet, si en 2016, trois attentats ont endeuillé le pays, causant la mort de 89 personnes, l’année 2017 a été marquée par trois attentats meurtriers et le début de l’année 2018 par deux attaques terroristes ayant causé sur la période un total de huit morts.
Depuis janvier 2017, 25 attentats ont été déjoués par les services antiterroristes français. Sur le volet répression, Édouard Philippe a confirmé la création d’un parquet national antiterroriste qui «permettra de renforcer encore l’action publique dans la lutte contre le terrorisme». Bénéficiant d’une «équipe de magistrats et de fonctionnaires renforcée», cette nouvelle entité judiciaire s’accompagnera par ailleurs de la désignation de procureurs délégués antiterroristes au sein des parquets territoriaux les plus exposés.