L’Europe attend des « idées très concrètes » du gouvernement arménien

Assez de belles promesses et paroles… On veut des actes ! C’est en substance le message qu’a adressé l’Union européenne au nouveau pouvoir en place en Arménie, dont elle avait néanmoins salué l’arrivée, à la faveur de la révolution de velours menée par Nikol Pachinian, aujourd’hui premier ministre, comme une promesse d’ouverture et de démocratie pour l’Arménie.

L’UE souhaite que le nouveau gouvernement arménien lui soumette des “idées très concrètes” pour pouvoir réviser à la hausse son aide économique à l’Arménie, a déclaré lundi 16 juillet le chef de la Délégation de l’UE à Erevan, Piotr Switalski, au risque de froisser davantage encore les autorités arméniennes. Répondant aux critiques qu’avait exprimées N. Pachinian la semaine passée à l’encontre de l’UE, P.Switalski a jugé utile de préciser que le gouvernement arménien devait désormais mettre en œuvre un programme de réformes spécifiques satisfaisant aux critères de financement de l’UE. “Nous voudrions entendre du gouvernement arménien des idées concrètes”, a déclaré le représentant européen lors d’une conférence de presse en ajoutant : “Sous quelle forme, de quelle manière, l’Union européenne peut-elle être utile ? Dans certains ministères, nous avons déjà pu recueillir certaines propositions préliminaires. Nous aimerions avoir une vision globale. Et quand nous aurons cette vision, alors nous pourrons discuter des modalités de cette aide”. “Nous, c’est-à-dire tous ceux qui travaillent sur l’Arménie, attendons ces idées concrètes de la partie arménienne”, a insisté le délégué de l’UE. N.Pachinian avait critiqué l’UE jeudi 12 juillet à l’issue de rencontres avec les leaders de l’Europe des 28 à Bruxelles, en marge du sommet de l’Otan, dont le président du Conseil européen Donald Tusk.

Le nouveau premier ministre arménien âgé de 43 ans s’était plaint de ce que l’UE n’avait toujours pas promis d’accroître son aide à l’Arménie, alors même qu’elle avait exprimé avec force son soutien au train de programmes inscrit à l’agenda du programme politique de son gouvernement. “En toute franchise, j’ai fait comprendre à nos partenaires que cela est plutôt incompréhensible et inacceptable … Nous attendons une assistance plus concrète et plus importante”, avait déclaré N.Pachinian devant les journalistes. “La politique de l’UE [concernant l’Arménie] est la même que celle pratiquée il y a trois ou quatre mois. Je pense qu’ils devraient soit nuancer l’enthousiasme de leurs déclarations [en soutien au nouveau gouvernement arménien] ou changer profondément cette politique”, ajoutait le premier ministre arménien avec une colère non dissimulée.

Visiblement déçu par la politique bruxelloise et par ses lenteurs et pesanteur, auxquelles il n’est pas familiarisé, N. Pachinian attendait des mesures rapides de la part de l’UE en faveur de l’Arménie, à l’aune des déclarations enthousiastes qu’avaient suscitées la Révolution de velours qui le porta au pouvoir à Erevan et les promesses de réformes qu’elle a fait naître. Mais s’il espérait une « assistance plus concrète » de l’UE, celle-ci n’a pas tardé à lui faire comprendre que cette aide dépendrait de « propositions plus concrètes » de son gouvernement, reprenant ainsi implicitement un reproche qu’avait adressé l’ancien pouvoir de Serge Sarkissian au nouveau dirigeant, en critiquant le caractère flou de son programme politique.

N. Pachinian, qui s’en est pour l’instant tenu à la ligne suivie par ses prédécesseurs en politique étrangère, entre une loyauté à la Russie maintes fois réaffirmée, y compris en marge du Mondial de football à Moscou où N. Pachinian avait une fois encore rencontré V. Poutine, et un rapprochement avec l’Europe hérité de S. Sarkissian, qui avait clôt son double mandat par un accord de partenariat global et renforcé signé avec l’UE en novembre 2017. Cet accord, le CEPA, reste le cadre d’une collaboration plus étroite entre l’Arménie et l’Europe, dont les Parlements des Etats membres doivent encore le ratifier, après celui de l’Arménie qui l’a approuvé avec enthousiasme. P.Switalski a d’ailleurs fait valoir que N. Pachinian lui-même n’avait pas annoncé de changement majeur dans la politique de l’Arménie concernant l’UE, ni fait part de quelque volonté de signer un nouvel accord, allant plus avant dans le processus d’intégration dans l’UE. “Si la partie arménienne estime que ces textes [existants entre l’UE et l’Arménie] devraient être renforcés … nous avons besoin d’idées concrètes [ sue s’il y lieu] ce qu’ils voudraient voir changer dans notre politique”, a ajouté le délégué européen.