Les « assises de l’Islam de France » créent la polémique

Les « assises de l’Islam de France » menées par les préfets jusqu’au 15 septembre dans toute la France suscitent l’indignation dans les rangs des musulmans où de nombreuses figures dénoncent l’ingérence de l’Etat dans les affaires cultuelles.

Tout avait commencé lorsque le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb avait annoncé en juin dernier, avoir mandaté les préfets du pays pour entendre les responsables du culte musulman.

Cette annonce faisait suite aux déclarations du président Emmanuel Macron qui avait exprimé sa volonté de « poser les jalons de toute l’organisation de l’Islam de France d’ici l’automne».

Dans les faits, les préfets ont adressé à certains acteurs associatifs, des invitations.

Dans le département des Bouches-du-Rhône (Sud-est), le préfet indique dans son mail que ces assises visent à «donner un nouvel élan à ces consultations, notamment en permettant à de nouveaux participants représentatifs de la société civile et ayant des liens avec l’islam, sans nécessairement être pratiquants ou impliqués de façon institutionnelle».

Les discussions aborderont « l’organisation de l’islam en France, le financement du culte, ou encore la formation des imams », indique la préfecture.

Rapidement, de nombreuses voix se sont élevées dans les rangs des musulmans pour dénoncer une intrusion du gouvernement dans la gestion de leur culte.

Pour Fateh Kimouche, fondateur du site d’information Al-Kanz, interrogé par Anadolu, « il est question de mettre les musulmans sous tutelle, dans un système de gestion indigéniste qui répond à une logique qui ne peut que choquer, parce que la France a été directement frappée par des actes terroristes, alors il faudrait réformer l’islam de France » avant de conclure que « ce que sous-entendent ces assises est détestable ».

Il estime qu’il ne s’agit pas « d’une volonté positive » du président Macron ou d’une initiative visant à « accompagner une certaine partie de la population parce qu’elle aurait certaines difficultés ».

Même son de cloche du côté d’un responsable associatif du sud de la France pour qui « le vrai problème c’est qu’on consulte (soi disant) alors que le projet est déjà bouclé et connu ».

À Nice (Sud-est) cette fois, l’imam de la plus grande mosquée de la ville ne fait pas partie des invités. Certains fidèles avancent l’hypothèse que le conflit qui l’oppose à la municipalité niçoise pourrait être à l’origine de son boycott.

Ali Rahni, cadre associatif à Roubaix (Nord), dénonce pour sa part le fait que « nous sommes en 2018 et notre gouvernement gère toujours la question de l’islam comme à l’époque coloniale.

En 2003 déjà, le Conseil Français du Culte Musulman (CFCM) avait été créé sous l’impulsion du président Nicolas Sarkozy et avait toujours souffert, auprès des communautés musulmanes, d’un lourd déficit de légitimité.

Si la polémique continue d’enfler, elle est consécutive à la fuite dans la presse française, vendredi dernier, d’une information indiquant que l’ancien conseiller du président tunisien Ben Ali, Hakim El Karoui s’apprête à remettre un rapport sur l’Islam de France à l’Elysée.

Devenu, aujourd’hui, conseiller d’Emmanuel Macron sur les questions liées à l’Islam, Hakim El Karoui préconise l’instauration d’une taxe sur le Halal pour financer la construction de mosquées et dénonce dans son rapport « l’islamisation des musulmans » par certaines associations.

Une critique qui n’a pas manqué de faire réagir les concernés notamment sur Twitter ou Marwan Muhammad, qui a récemment lancé une « grande consultation des musulmans » a tourné en dérision le rapport en indiquant « le conseiller d’élite de Macron est à deux doigts de découvrir que la religion des musulmans est l’Islam ».

Cette consultation initiée par l’ex-porte-parole du collectif contre l’Islamophobie en France avait été un franc succès auprès des musulmans, tant sur internet que lors des rencontres locales.

Elle aboutira, le 30 septembre à Paris, au lancement d’un grand projet autonome et libre de toute influence, qui rassemblera cadres associatifs, imams, responsables religieux, influenceurs, théologiens ou encore sociologues.

Lien