Lors de la célébration de l’Armistice de 1918, le Premier ministre arménien par intérim, Nikol Pachinian, qui est à Paris pour une visite de travail, a participé au Forum de Paris sur la paix. Le Forum se tenait dans le cadre d’événements consacrés au centième anniversaire de l’armistice de la Première Guerre mondiale.
Le forum s’est ouvert par les mots de bienvenue de la vice-présidente du comité général du Forum de Paris “Sur la paix”, Trisha Shetty, et du président de la République française, Emmanuel Macron. La chancelière allemande Angela Merkel et le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, ont également prononcé des discours.
Le Premier ministre arménien par intérim, Nikol Pachinian, a prononcé lui aussi un discours, dans lequel il a notamment déclaré :
“Excellences Messieurs les chefs d’Etat et de gouvernement
Mesdames et Messieurs,
Nous sommes ici pour célébrer le centième anniversaire de la fin de la Première guerre mondiale. C’est un événement exceptionnel appelé à commémorer notre mémoire collective et à exprimer notre message commun de paix.
Aujourd’hui, nous devons parler des leçons de la Première Guerre mondiale.
Si un pays est en guerre ou tente de résoudre ses problèmes par des moyens militaires, alors il croit en sa force et sa victoire. Néanmoins, la Première Guerre mondiale fut une tragédie mondiale pour tous les peuples impliqués et a finalement conduit à l’effondrement des États.
Il existe une conviction que, sur le plan géopolitique et militaire, il y a toujours des gagnants et des vaincus dans les guerres. Cependant, du point de vue humain, personne ne gagne. Les guerres ne causent que des pertes, des souffrances et des destructions.
Et malgré nos efforts communs et nos appels à tirer les leçons des erreurs précédentes, ces leçons sont facilement oubliées.
Il y a des milliers d’années, l’humanité comprenait la nécessité d’interdire les armes de destruction massive. Malheureusement, cela n’a pas empêché la création de nouvelles armes.
Au cours de la Première Guerre mondiale, pour la première fois, les puissances de l’ententes ont utilisé la définition de « crime contre l’humanité et la civilisation » condamnant ainsi les autorités ottomanes pour l’extermination de 1,5 million d’Arméniens. Ce crime horrible a été qualifié plus tard de premier génocide du XXe siècle.
Cependant, à peine quelques décennies plus tard, l’humanité a été témoin de l’Holocauste, des génocides du Cambodge, du Rwanda, des génocides des chrétiens et des Yézidis au Moyen-Orient, de la violence contre le peuple Rohingya.
L’une des leçons de la guerre a été la formulation du droit des peuples à l’autodétermination dans les 14 points de Wilson. Il a ensuite été inclus dans la Charte des Nations Unies, dans l’Acte final d’Helsinki et est devenu la base de l’indépendance de la moitié du monde moderne.
À la suite de la Première Guerre mondiale, les peuples du monde ont confirmé par la force de la loi leur droit de disposer de leur propre destin avec la libre expression de leur volonté. Ici, en France, j’estime nécessaire de souligner qu’il y a quelques jours à peine, la France a clairement réaffirmé sa position de principe sur cette question ; le peuple de Nouvelle-Calédonie ayant eu la possibilité d’organiser un référendum. Malheureusement, l’approche de ce droit est élective.
C’est pourquoi, la lutte de plusieurs décennies du peuple du Haut-Karabagh n’a toujours pas reçu de solution juridique appropriée pour disposer de son propre destin. Au XXIe siècle, il est absolument inacceptable que le désir d’appliquer le droit des peuples à l’autodétermination devienne une menace pour la vie.
À la suite de la Première Guerre mondiale, la Société des Nations – prototype de l’ONU – a été formée, dans un but ultime d’établir la paix.
Néanmoins, dans le monde moderne, les manifestations extrémistes s’intensifient. Les institutions susmentionnées ont tout d’abord pour but la protection des droits de l’homme. Mais aujourd’hui, presque tous les jours, nous sommes témoins de cas de violations des droits de l’homme, notamment du droit à la vie.
Après la Première Guerre mondiale, beaucoup pensaient que ce serait la dernière guerre. Mais bientôt la Seconde Guerre mondiale a suivi. Et une nouvelle étape de guerre a commencé, qui n’est toujours pas terminée aujourd’hui. Elle devient même plus profonde.
C’est pourquoi je souligne l’importance de telles réunions. Elles nous donnent l’occasion de réfléchir sur notre passé commun, sur l’histoire de l’humanité. Certes, nous ne pouvons pas changer l’histoire et il n’y en a pas besoin. Mais l’histoire peut nous changer pour que notre avenir soit meilleur.
C’est pourquoi nous devons nous rappeler la leçon la plus importante de la Première Guerre mondiale. Aucun État ne peut construire son succès sur la misère des autres, personne ne peut se libérer de l’esclavage des autres.
La fin de la Première Guerre mondiale a pris fin il y a cent ans. Et c’est une excellente occasion de penser à l’ère de la paix, à une ère sans guerre.
Je crois que les dirigeants réunis ici à Paris seront en mesure d’atteindre cet objectif. Et ce sera le meilleur hommage aux victimes innocentes du siècle précédent.”