« Pas de renoncement » mais « pas non plus l’aveuglement »: Emmanuel Macron annoncera mardi des mesures « à court et à long terme » pour répondre aux « colères » exprimées par les « gilets jaunes ».
En ouvrant le conseil des ministres lundi, le chef de l’Etat a regretté les « scènes de guerre » de samedi sur les Champs-Elysées, retransmises par les chaînes de télévisions à l’étranger, a indiqué le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux.
Mais Emmanuel Macron a pris acte des « colères et inquiétude » d’une partie de la France qui, selon lui, « n’a pas trouvé sa place dans l’Union européenne, qui n’a pas non plus trouvé sa place dans la mondialisation ».
La réponse de l’exécutif sera « une réponse globale » qui « passera par une nouvelle méthode mais pas par un changement de cap », a-t-il dit. A priori, pas de grand geste financier ou de moratoire sur la hausse des taxes sur le carburant qui a mis le feu aux poudres.
Frappant du point sur la table, le Sénat, dominé par l’opposition de droite, a voté lundi le gel de la hausse de la taxe sur les carburants, une décision qui a peu de chance d’être validée au parlement, le parti présidentiel étant majoritaire à l’Assemblée nationale.
Sur l’île de La Réunion, le préfet a lui annoncé une baisse des prix des carburants et du gaz dès mardi, « à la demande de la ministre des outre-mer » Annick Girardin, qui sera dès mercredi sur l’île pour faire des annonces sur le coût de la vie et l’emploi.
A Paris, Emmanuel Macron présentera mardi ses arbitrages devant des élus, associations, syndicats et ONG sur la stratégie énergétique à long terme, par exemple le nombre de centrales nucléaires à fermer. Un discours que Jean-Luc Mélenchon a décidé de boycotter.
« Extrême droite identitaire »
Lundi matin, hasard du calendrier selon le gouvernement, la ministre des Transports, Elisabeth Borne, a présenté un projet de loi qui propose des aides à la mobilité durable, en faveur du vélo, de la voiture électrique ou encore du covoiturage.
Pour réduire la pollution, le gouvernement a annoncé l’élargissement du chèque énergie pour aider les ménages modestes ou encore la super prime à la conversion, ou l’exclusion des péages urbains du projet de loi pour ne pas « accentuer les fractures entre territoires ».
Ces annonces n’ont pas entamé la mobilisation des « gilets jaunes », qui menaient lundi encore plusieurs blocages, après un week-end de mobilisations parfois émaillées de violences et dénoncées par l’exécutif qui pointe du doigt l’ultradroite, voire comme Gérald Darmanin « la peste brune ».
Benjamin Griveaux a fustigé une minorité d' »extrême droite identitaire » qui, selon lui, a « usurpé l’identité des gilets jaunes », scandant des slogans comme: « On est chez nous ».
Il a par ailleurs assuré que le gouvernement est « ouvert » à une rencontre avec des représentants du mouvement, qui a créé une « délégation » de huit « communicants officiels » pour engager une « prise de contact sérieuse et nécessaire » avec les autorités.
Ces « huit citoyens », « apolitiques », dont deux des initiateurs du mouvement, demandent aussi bien la suppression du Sénat que la baisse des charges patronales ou une hausse du smic et des retraites.
A quelques semaines de Noël, patrons, commerçants et artisans pressent le gouvernement de prendre des mesures rapides pour les soutenir. Selon de premières évaluations du ministère de l’Economie, « les baisses de chiffre d’affaires peuvent atteindre 60 % à 70 % pour certains artisans bouchers, coiffeurs ou boulangers ».
Emmanuel Macron doit installer mardi un « Haut Conseil pour le climat », composé de 13 experts et scientifiques, décrié avant même d’être lancé.
Sur le terrain, certains « gilets jaunes » envisagent déjà un acte III le 1er décembre. « Si le gouvernement ne répond pas concrètement, on va avoir un mouvement encore plus fort », a mis en garde Jose Espinoza, coordinateur des « gilets jaunes » à Montreuil.
Pour le politologue Frédéric Dabi, « ce mouvement des ‘gilets jaunes’ (…) enracine ce quinquennat dans une bataille pour le pouvoir d’achat ». « C’est un mouvement qu’on va retrouver (…) dans les mois, dans les années qui viennent », prophétise le sociologue Alexis Spire.
« Cette révolte fiscale risque de tourner à la crise démocratique », a estimé le chef de file des sénateurs Les Républicains, Bruno Retailleau.
La présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen, a exigé un « moratoire » sur les hausses de taxes et une augmentation des salaires. Pour La France insoumise, Alexis Corbière a de nouveau réclamé, lundi sur franceinfo, le rétablissement de l’impôt sur la fortune et de soumettre à référendum les propositions d’Emmanuel Macron.