Le syndicat tunisien des journalistes porte plainte contre le prince-héritier saoudien

Le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) a porté plainte lundi auprès du tribunal de première instance de Tunis, contre le prince héritier du Royaume d’Arabie Saoudite Mohammed Bin Salman pour “crimes contre l’humanité, crimes de guerre et violations de la liberté de presse et des droits de l’homme au Yémen”.

Le SNJT accuse l’homme fort de Ryad d’être “le responsable direct de ces crimes” et demande aux autorités judiciaires tunisiennes compétentes d’ouvrir une enquête à ce sujet.

La partie plaignante appelle à prendre les mesures légales pour porter le dossier devant le Tribunal pénal international (TPI).

Elle fait valoir que le prince héritier saoudien qui est attendu mardi en visite en Tunisie, ne peut se prévaloir de l’immunité diplomatique s’agissant de crimes contre les droits humanitaires régis par la Convention de Rome signée en 2011.

Par ailleurs, de nombreuses organisations de la société civile tunisienne ont organisé lundi une conférence de presse au siège du syndicat des journalistes pour dénoncer la visite du responsable saoudien.

Parmi les ONG participantes figuraient l’Association contre la torture (OTCT), l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD), la Ligue tunisienne de défense des droits de l’homme (LTHD) et le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES).

Dans un communiqué, ces organisations expriment leur “rejet catégorique” de la visite du prince Bin Salman en Tunisie dans le cadre d’une tournée dans plusieurs pays arabe “qui vise à rompre son isolement après son implication dans le crime horrible dont a été victime le journaliste Jamal Khashoggi”.

Les signataires y font part de “leur étonnement” de voir cette visite qui “porte atteinte à l’image de la Tunisie”, “faire fi des principes des droits de l’homme et de faire body_abstraction du processus démocratique que vit la Tunisie depuis la fuite de son ex-président Zine El Abidine Ben Ali en Arabie Saoudite après sa chute en 2011”.

Selon eux, cette visite est une “tentative des gouvernants du Royaume saoudien de redorer leur image et de contenir les retombées du meurtre de Khashoggi, surtout après les révélations faites sur l’atrocité sans précédent de ce crime”.

Ils notent que l’assassinat du journaliste dissident est “un maillon d’une série de violations abjectes des droits de l’homme et de pratiques répressives contre la liberté d’opinion, et ce, au mépris des critères internationaux régissant les droits humains”.

La façade du bâtiment du SNJT a été, pour l’occasion, recouverte d’une banderole géante sur laquelle figurait le prince Bin Salman tenant une tronçonneuse à la main.

La visite du prince-héritier saoudien intervient en pleines turbulences autour du meurtre de Khashoggi dont les péripéties n’ont pas encore été totalement éclaircies, s’agissant notamment du ou des commanditaire (s) de l’opération et du sort de la dépouille de la victime non élucidé jusque-là.

La présidence tunisienne a rappelé la position de Tunis à ce sujet, notant que “la Tunisie a, dès le début, dénoncé cet assassinat et appelé à dévoiler toute la vérité sur le meurtre du journaliste, tout en s’opposant à ce que cette affaire soit instrumentalisée pour déstabiliser le Royaume et la région”.

Auparavant, un collectif de 50 avocats avait annoncé par la voix de son coordinateur Nizar Boujallel, qu’il déposera ce lundi une plainte en urgence auprès du tribunal de première instance de Tunis pour annuler la visite du prince héritier saoudien considéré comme suspect dans le meurtre de Khashoggi.

S’exprimant dans une déclaration à Anadolu, Boujallel a indiqué que le collectif n’exclut pas d’autres formes de protestation dont une manifestation à l’aéroport de Tunis-Carthage à l’arrivée du prince.

D’autres activistes tunisiens ont appelé à manifester à l’avenue Habib Bourguiba, contre la visite prévue du prince héritier saoudien en Tunisie.