Après dix jours de mobilisation pour dénoncer la baisse du pouvoir d’achat en France, le mouvement des « gilets jaunes » a obtenu mardi quelques concessions de la part du président français Emmanuel Macron qui ne veut toutefois pas changer en profondeur sa stratégie pour l’environnement.
Voici le point sur ce mouvement de colère qui a engendré des débordements à Paris samedi :
Que veulent les « gilets jaunes » ?
Les « gilets jaunes » s’inscrivent dans une longue tradition française de contestation de l’impôt.
Au départ, la colère de ces manifestants ainsi baptisés en référence aux vestes fluorescentes obligatoires pour tout automobiliste français en cas d’accident était focalisée sur la hausse des taxes sur les carburants, dont une nouvelle salve doit intervenir le 1er janvier.
Mais au fil des manifestations, les revendications du mouvement qui s’organise sur les réseaux sociaux et qui se veut apolitique, asyndical et sans leader ont muté.
Au-delà d’une baisse des taxes sur l’essence et le diesel, leurs revendications sont assez hétéroclites. Certains réclament le rétablissement d’un impôt sur les grandes fortunes, d’autres des mesures pour le pouvoir d’achat des plus modestes et les plus radicaux d’entre eux appellent à la dissolution de l’Assemblée nationale, voire la démission d’Emmanuel Macron.
Pour éviter d’être trop désorganisés, une « délégation » de huit « communicants officiels », a été créée afin de porter une série de revendications. Ils demandent principalement de « revoir à la baisse toutes les taxes », et la création d’une « assemblée citoyenne ».
« On est face à un mouvement qui est assez innovant, sans point de comparaison. Mais l’absence de structuration entraîne un manque d’organisation, personne ne fixe réellement un cap » souligne auprès de l’AFP Jérôme Sainte-Marie, le président de l’institut de sondage PollingVox.
Quelles ont été les annonces d’Emmanuel Macron ?
Face à ce mouvement de grogne soutenu par environ 70 % des Français selon plusieurs sondages, Emmanuel Macron a annoncé son intention de limiter l’impact des taxes sur le carburant.
Il a notamment indiqué que la fiscalité sur l’essence et le diesel serait adaptée aux fluctuations des prix du pétrole.
En résumé, si le baril grimpe, le gouvernement pourrait décider de suspendre ou réduire la hausse de la fiscalité qui reste maintenue au 1er janvier 2019.
Le chef de l’Etat a en outre annoncé une « grande concertation de terrain sur la transition écologique et sociale », rassemblant associations, élus et « représentants des gilets jaunes », pour, « dans les trois mois qui viennent », élaborer des « solutions », des « méthodes d’accompagnement.
Des représentants des « gilets jaunes » seront par ailleurs reçu par le ministre de la Transition écologique, François de Rugy.
Pas question cependant de remettre en cause la politique de « transition écologique » du gouvernement qui doit encourager les Français à adopter des modes de vie et de transport moins polluants.
Le mouvement peut-il durer ?
A lire les réactions sur les divers groupes Facebook où les « gilets jaunes » organisent leur mouvement, les annonces d’Emmanuel Macron n’ont pas convaincu.
« Ce qu’il raconte c’est de la poudre de perlimpinpin ! On ne va pas changer de cap certainement pas, ici on voit de la misère tous les jours », explique à l’AFP Bruno Herry, 52 ans, employé de pompes funèbres, interrogé à Trégueux (ouest).
Avec une mobilisation en baisse, la question d’un essoufflement du mouvement se pose néanmoins.
La première journée de protestation des « gilets jaunes », le 17 novembre, a réuni près de 300.000 manifestants dans toute la France, sous diverses formes d’action, principalement des blocages routiers.
Et lors de l’acte II, samedi dernier, ils étaient trois fois moins à reprendre leurs actions, dont 8.000 à Paris.
C’est d’ailleurs dans la capitale que l’attention s’est focalisée, avec des incidents entre manifestants et forces de l’ordre sur la célèbre artère des Champs-Elysées.
Depuis son lancement, le mouvement des « gilets jaunes » a fait deux morts et plusieurs centaines de blessés.
« Le mouvement peut très bien disparaître par usure naturelle. Si samedi prochain, il n’y a que 50.000 personnes, ça sera terminé », prédit M. Sainte-Marie.
« Mais ce qui a fait naître le mouvement – l’insatisfaction et la colère par rapport à la politique du gouvernement – ne va pas disparaître de si tôt », conclut-il.