Le Mexique intronise ce samedi 1er décembre son nouveau chef de l’Etat.
Andrés Manuel López Obrador prend les rênes du pays alors que 6 000 migrants continuent de s’entasser dans le nord-ouest à Tijuana, à la frontière américaine. Vendredi à Buenos Aires, en marge du G20, son prédécesseur Enrique Peña Nieto a signé un traité de libre-échange avec Donald Trump et le Canada. Mais pour les migrants, la porte reste fermée. Certains renoncent, d’autres ont entamé une grève de la faim.
« On voudrait plus d’humanité pour ces familles qui demandent l’asile. » Le « rêve américain » a poussé des milliers de ressortissants d’Amérique centrale à parcourir plus de 4 000 kilomètres en direction du Nord, pour atteindre la célèbre ville mexicaine de Tijuana, aux portes des Etats-Unis. Mais la fatigue et la déception commencent à entamer leur patience, voire leur détermination.
Pour l’heure, une dizaine de femmes centraméricaines ont annoncé qu’elles entamaient une grève de la faim, pour protester contre leurs conditions d’accueil au Mexique et contre la politique des Etats-Unis, qui leur refusent l’entrée sur leur territoire. Irineo Mujica est directeur de l’ONG Pueblos sin Fronteras. Interrogé par la rédaction Amérique latine de RFI, il explique la démarche :
« Nous avons entamé cette grève de la faim, parce que les camps, les abris où les migrants sont entassés, sont dans de très mauvaises conditions à cause de la pluie. Tout est mouillé, les enfants sont malades. Nous demandons au gouvernement mexicain un autre endroit. La deuxième revendication est d’avoir des visas de la part du Mexique, et pas seulement pour quelques personnes. »
Il demande que ces visas concernent « plus de gens », pour leur permettre de bouger dans le pays. « Ce qui les fait rester ensemble, c’est la peur d’être expulsés, dit-il. S’ils ont des visas, ils pourront travailler, vivre dans différents endroits du Mexique. » Et de demander aux Etats-Unis une troisième requête : qu’ils arrêtent « d’interférer dans les démarches pour les demandes d’asile ».
Vendredi, le ministère américain de la Sécurité intérieure a demandé que les près de 5 600 soldats déployés à la frontière, en plus des gardes-frontières, restent au-delà du 15 décembre. « Selon le droit international, les demandeurs d’asile peuvent entrer où ils veulent pour demander l’asile. Ces familles ont déjà beaucoup souffert et elles sont en danger au Mexique », rappelle Irineo Mujica.
Face à ce « mur » américain, la résignation commence à gagner les rangs
Certains migrants actuellement massés à la frontière commencent à repartir chez eux. L’Organisation internationale pour les migrations (OIM), qui dépend de l’ONU, affirme avoir aidé 453 migrants à retourner dans leur pays d’origine en un mois. Pourquoi ces migrants, qui ont quitté leur pays, la pauvreté et quelquefois la violence, sont-ils volontaires au retour ? La réponse du porte-parole de l’OIM :
« Ce qu’ils nous disent, c’est qu’ils sont partis de leurs petites villes sous l’impulsion des médias sociaux, relate Joël Millman. Ils étaient pleins d’enthousiasme à l’idée de rejoindre ces caravanes, ils étaient heureux et optimistes. Mais les semaines passées sur les routes les ont épuisés.
Et ces personnes ont laissé de la famille dans leur pays, c’est assez habituel: des gens qui sont pendant des années à l’étranger, surtout en Europe, se rendent compte que leur famille a besoin d’eux, ajoute-t-il. On a organisé des retours pour des gens en Afghanistan ou en Irak. Là, c’est un peu pareil, on entend les mêmes choses : les gens n’ont pas trouvé ce qu’ils cherchaient, ou ils trouvent qu’il faut attendre trop longtemps par rapport à ce qu’ils avaient prévu. »
Andrés Manuel Lopez Obrador, premier président de gauche de l’histoire récente du Mexique, prend officiellement ses fonctions ce samedi après son élection du 1er juillet dernier, et sa majorité obtenue dans les deux chambres du Congrès. Un candidat « anti-système », qui a promis d’accomplir une « transformation » historique dans ce pays marqué par la corruption, la pauvreté et la violence.
Vendredi, les Etats-Unis, le Mexique et le Canada ont fini par signer un nouveau traité de libre-échange, après que Donald Trump a fait voler en éclat le précédent accord en vigueur depuis plus de 20 ans. Ce texte ne concerne pas la caravane. Certains ont déjà accepté un travail local, lors d’une « foire de l’emploi ». A ceux-là, le Mexique a fourni un visa humanitaire et un accès à la sécurité sociale.