Le Président camerounais Paul Biya a annoncé jeudi 13 décembre l’arrêt des poursuites contre 289 personnes arrêtées pour des délits commis dans le cadre de la crise des régions anglophones. Une décision qui rentre dans le processus de désarmement, démobilisation et de réintégration des combattants des zones en conflit lancé par le chef de l’État.
La désescalade avance à petits pas au Cameroun. Le président Paul Biya a en effet ordonné ce jeudi 13 décembre 2018 l’arrêt des poursuites engagées devant les tribunaux militaires du Cameroun contre 289 personnes. Celles-ci avaient été interpellées pour des délits commis dans le cadre de la crise en cours dans les régions anglophones du pays. Une information qui émane d’un communiqué signé de Ferdinand Ngoh Ngoh, secrétaire général de la présidence.
L’arrêt des poursuites ordonné intervient après la création d’un Comité national de désarmement, démobilisation et réinsertion (CNDDR) en faveur des combattants en zone de conflit au Cameroun.
«Cette décision du chef de l’État procède de sa volonté de permettre à ceux de nos jeunes compatriotes de ces deux régions désireux de renoncer à la violence et de revenir dans le droit chemin de pouvoir nouveau participer à la grande œuvre de construction nationale», indique le même communiqué.Cet arrêt de poursuites constitue une nouvrllr main tendue de Paul Biya aux séparatistes.
«Le chef de l’État réaffirme sa détermination à poursuivre sans relâche ses efforts dans la recherche des voies et moyens d’une résolution pacifique de la crise», poursuit le communiqué.
Cette annonce a reçu un accueil mitigé. Si certains y voient une amorce de sortie de crise, d’autres observateurs estiment que la décision de Paul Biya ne pourra pas ramener la paix dans les zones anglophones.
«Le pouvoir commence à écouter. C’est un début de solution, mais tout dépendra de qui est concerné par la décision. J’espère qu’on a procédé à un bon profilage des acteurs pour identifier les prisonniers stratégiques à relâcher», estime Joseph Léa Ngoula, analyste des conflits et du terrorisme.
Contrairement à lui, Gérard Kuissu, président du Comité de résistance pour la revendication, la récupération et la restitution du vote du peuple (C4R) mouvement né après la présidentielle du 7 octobre dernier pour dire «non» à ce qu’ils considèrent comme un «hold-up électoral», est très critique.
«Cela ne peut pas être un début de solution. Et ça ne représente rien dans l’océan de mesures qu’il faut prendre. La libération des détenus, tout comme le DDR, ne sont pas des mesures issues d’un dialogue. Ici, nous avons affaire à des mesures unilatérales. Tout comme il [Paul Biya ndlr] avait déclaré tout seul, il dialogue tout seul. Tout cela est regardé avec curiosité par la classe politique et les anglophones.»
Cette décision de Paul Biya intervient quelques jours après l’ouverture du procès pour terrorisme des leaders séparatistes anglophones, le 6 décembre dernier à Yaoundé. Sisiku Ayuk Tabe, le Président autoproclamé de l’État fantôme d’Ambazonie et ses 9 coaccusés comparaissaient pour la première fois depuis leur arrestation au Nigéria. À la lecture du communiqué de la présidence, qui n’évoque que les délits, ces leaders accusés notamment de «terrorisme» et de «sécession» ne sont pas concernés par cette mesure.
Leur procès avait été renvoyé au 10 janvier, à la demande des avocats des accusés qui ont sollicité du temps pour prendre connaissance du dossier.