Londres annonce son plan pour réduire l’immigration après le Brexit

Le gouvernement britannique publie mercredi son livre blanc sur le système d’immigration qu’il compte mettre en place après le Brexit, à 100 jours du divorce avec l’UE qui ne cesse d’inquiéter les milieux économiques.

Le ministre de l’Intérieur, Sajid Javid, a affirmé que ce nouveau système d’immigration, qui mettra fin à la libre circulation des citoyens européens au Royaume-Uni, répond au souhait des Britanniques de « reprendre le contrôle des frontières ».

« Ce sera un système d’immigration unique, basé sur les compétences et l’expertise que les gens peuvent apporter, plutôt que sur leur pays d’origine », a déclaré M. Javid avant la publication du document.

Il a annoncé son intention de ramener le solde migratoire à un niveau « viable », sans préciser de chiffre, alors que le programme de son Parti conservateur prévoit de le réduire à moins de 100.000 personnes par an, contre 280.000 en 2017.

Les nouveaux critères de délivrance des visas auront pour objectif d’inciter les entreprises britanniques « à se tourner en priorité vers la main d’oeuvre nationale », a souligné Sajid Javid sur la BBC.

Il a précisé que le niveau de salaire requis pour entrer sur le sol britannique serait fixé ultérieurement, après de nouvelles consultations mais pourrait tourner autour de 30.000 livres (33.300 euros).

Ce nouveau système sera mis en oeuvre « par phases » à partir de 2021, soit après la période de transition post-Brexit prévu dans l’accord conclu entre Londres et Bruxelles, qui doit encore être ratifié par le parlement britannique.

Avant même sa publication, ce livre blanc a suscité de vives réactions.

Le NHS, système public de santé britannique, a fait part de ses craintes de rencontrer des difficultés à recruter si le seuil de salaire minimum pour les travailleurs étrangers était fixé à 30.000 livres.

« Des compétences élevées ne sont pas synonymes de salaires élevés », a déclaré l’un des directeurs du NHS, Saffron Cordery, à la BBC. « Le salaire initial des infirmières est de 23.000 livres, celui des médecins juniors de 27.000 livres, et celui des aide-soignants de 17.000 livres ».

Le maire de Londres, le travailliste Sadiq Khan, a dénoncé « l’approche aberrante » du gouvernement. « Fermer la porte à des milliers de travailleurs européens qui veulent venir ici pour remplir des rôles cruciaux nuira à notre compétitivité », a-t-il déploré dans un communiqué.

L’immigration avait été l’une des questions au coeur de la campagne du référendum sur le Brexit, en 2016. Suite au vote, la Première ministre, Theresa May, s’était engagée à mettre fin à la liberté de circulation des Européens vers le Royaume-Uni.

La cheffe du gouvernement s’apprête à affronter mercredi sa dernière séance de questions de l’année à la Chambre des Communes, devant des députés remontés depuis sa décision de repousser à janvier le vote, initialement prévu le 11 décembre, sur l’accord de Brexit, pour éviter d’essuyer un échec annoncé.

Le parti indépendantiste écossais SNP a annoncé avoir demandé l’organisation du vote d’une motion de censure contre le gouvernement avant la pause parlementaire de fin d’année qui démarre jeudi soir, avec cependant peu de chance d’obtenir satisfaction.

L’opposition au texte, exprimée aussi bien par les europhiles que les eurosceptiques, et dans les rangs de la majorité comme de l’opposition, renforce la probabilité d’un Brexit sans accord au 29 mars 2019.

Le gouvernement a annoncé mardi qu’il accélérait ses préparatifs en prévision de ce scénario : il a débloqué deux milliards de livres supplémentaires (2,2 milliards d’euros) pour faire face à cette éventualité, et annoncé la possible mobilisation de militaires.

Mais une sortie sans accord est inimaginable pour les milieux économiques, qui ont adressé une nouvelle mise en garde au gouvernement mercredi.

« Les entreprises observent avec horreur que les politiciens se concentrent sur des disputes partisanes plutôt que sur les mesures concrètes dont les entreprises ont besoin », ont déclaré dans un rare communiqué commun les cinq principales organisations patronales britanniques.

En cas de « no-deal », « les entreprises seraient confrontées à de nouveaux coûts douaniers énormes », avertissent-elles. « Des perturbations dans les ports pourraient détruire des chaînes d’approvisionnement soigneusement construites ».

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