La plus décisive des batailles, celle pour la libération de la Ghouta orientale, a été achevée, puis tout le Sud syrien a été libéré, et tous les regards se sont braqués ensuite sur la bataille pour la reprise d’Idlib, repère du plus grand rassemblement terroriste, et qui était à deux doigts d’être menée, sauf que les tentatives d’investissement américano-occidental sur la rengaine « éculée » du chimique ont poussé Moscou à conclure l’accord de Sotchi, contraignant la Turquie à œuvrer pour démanteler la capacité terroriste à Idlib, selon les termes de cet accord qui a été alors salué par Damas.
Cet accord peut être considéré comme la concrétisation d’une indéniable et unique vérité : la fatalité de la libération d’Idlib, quelles que soient les considérations et les échéances ; ce qui signifie que, selon les termes de cet accord, Idlib est déjà et pratiquement dans le processus de libération, même ultérieurement…
Damas a toujours affirmé que la prochaine étape est Idlib et que l’armée syrienne se dirigera ensuite vers l’est de l’Euphrate, mais l’évolution des événements à l’est de l’Euphrate semble avoir opéré un changement de priorités pour tous les acteurs. Une question urgente et très importante se pose alors : la libération de l’Euphrate oriental syrien se concrétisera-t-elle avant celle d’Idlib ?
Dans un communiqué daté du vendredi 28 décembre, le haut-commandement de l’armée syrienne a annoncé « l’entrée d’unités de l’armée syrienne à Manbij et le lever du drapeau syrien », soulignant que c’était en réponse aux « appels de la population » là-bas.
Quelques heures auparavant, un communiqué des forces démocratiques syriennes, « FDS » a été diffusé, annonçant « leur retrait de la ville de Manbij » dans le nord syrien, après les récentes menaces d’agression turques contre elles. Elles ont appelé l’Etat syrien, « auquel nous appartenons en termes de territoire, de peuple et de frontières », à envoyer ses troupes « pour recevoir ces positions et protéger la région de Manbij contre les menaces turques », selon le communiqué.
Est-il possible que la récente décision de Trump de retirer définitivement ses troupes des positions qu’elles occupent illégalement sur le territoire syrien ait été suffisante pour que tous ces effondrements dramatiques et ces bouleversements successifs aient lieu d’un coup ?!
Ce qui fait accourir les ennemis de Damas pour rentrer dans sa grâce, les visites présidentielles, la réouverture des ambassades et des points de passage frontaliers, l’édulcoration du langage diplomatique et médiatique, les limogeages, le réajustement des agendas turc et français, les appels au retour à la Ligue arabe, même les agressions israéliennes répétées et infructueuses, échouant dans tous leurs objectifs internes et externes, coulent de même source, sont dans le même contexte et ne s’en écartent pas d’un pouce. C’est clairement le cri de Netanyahou : « nous sommes prêts à négocier sans conditions. Y aurait-il quelqu’un pour me répondre » ?
Et cela va jusqu’au bout de ce long, très long « chapelet », dont nous connaissons le début avec certitude et assurément la fin. En effet, dans cette guerre, le commanditaire a jeté l’éponge et s’en est allé, alors qu’est-ce qui motive le mandataire à se battre seul ?
Nous pensons que personne ne peut outrepasser ou occulter l’évolution de la guerre syrienne, ni la façon dont la situation a tourné de près de 360 degrés. Après que les factions armées, quelles que soient leurs désignations, aient contrôlé durant les cinq premières années de la guerre près de 85% du territoire syrien, selon les déclarations de leurs dirigeants et de leurs sponsors, l’État syrien, avec ses forces armées et la participation de ses alliés, contrôle désormais, depuis la fin 2015 à ce jour, plus de 90% du territoire. C’est ce qui a permis à l’axe antiterroriste d’accumuler, jour après jour, plus de puissance, de sorte que sa dissuasion politique équivaut dès lors sa politique de dissuasion dans sa confrontation à la plus violente vague de terrorisme soutenu aux niveaux régional et international.
Tout ceci nous fait dire que la guerre syrienne est maintenant au stade des derniers spasmes de la délivrance, contrairement à tout ce propagent certains qui font valoir des desseins tactiques américains calculés pour créer de nouveaux champs de bataille et de nouvelles conditions d’agression contre l’Etat syrien depuis l’extérieur, se basant sur la récente déclaration de Trump, faite il y a quelques jours lors de sa visite à la base aérienne al-Assad en Irak, sur la possibilité « d’utiliser des bases américaines » en Irak pour mener des opérations militaires en Syrie.
L’Amérique qui, par la décision du retrait programmé et progressif, s’il devait s’accomplir, a perdu sa seule et meilleure opportunité de se maintenir sur le sol syrien avec son corps armé, ne pourra ni créer ni imposer de nouveaux espaces d’affrontement contre l’état syrien de l’extérieur et à distance. Ce ne sont que pures balivernes … !
Et l’Amérique, qui a toujours eu des stratégies pour déclencher des guerres et livrer des combats, n’a plus aujourd’hui de stratégie pour en sortir et cherche à sauver sa tête en se retirant face à cette nouvelle résurgence mondiale, déclenchée à partir du Moyen-Orient, qui rejette son uni-polarité, abandonnant tous ses alliés, même Israël. « Ils peuvent se protéger convenablement », dit Trump en parlant de l’impact du retrait américain de Syrie sur Israël. Cette déclaration a été rapportée par le journal israélien Haaretz.
Et ce que semble avoir enfin commencé à saisir les frères kurdes de la morale de ces signaux américains, ce qui les a peut-être poussés à chercher un compromis avec Damas, allant jusqu’à céder récemment leurs positions à Manbij, une région dont l’importance stratégique augmente exponentiellement tant elle représente la confluence des intérêts régionaux et internationaux pendant la guerre, reflète leur conscience de la réalité, depuis longtemps sous leurs yeux, qu’ils n’ont pas d’autre choix ni d’autre alternative que de rester au sein de l’État syrien, seul garant de la sécurité, de la paix et de la souveraineté. L’Américain, qui abandonne Israël, son sésame dans cet Orient, ne perdra pas une minute à se soucier des Kurdes syriens ni des autres… !
Nous espérons que nos frères kurdes ont placé leurs intentions sur la bonne voie nationale. C’est lié à de nombreuses avancées futures, sur la base desquelles l’ensemble de la région orientale syrienne sera reprise en un temps relativement court, par rapport à ce qui était estimé si la présence américaine avait continué et si la « perdition » et le rêve séparatiste avaient persisté chez certains, contribuant ainsi au retour à la vie normale, à la stabilité et à la décision nationale qui revient aux seuls Syriens sur leurs terres.
La réalité réaffirme que, jusqu’à présent, la seule constante est que rien n’est impossible en politique et que, dans la guerre syrienne, la seule constante est qu’il n’y a pas de solution politique avant la solution militaire. Cela a été consolidé en imposant le fait accompli sur la scène internationale, qui a aboli les priorités des uns, reporté celles des autres, et contribué à la création de nouvelles priorités. Ce qui se passe actuellement n’a qu’un sens : la Syrie, avec sa résilience et son choix de la résistance, et avec ses alliés, se dirige vers la victoire totale. Sinon, que signifie tout ce qui arrive ?
En conclusion : Qui sera le premier ? Idlib ou l’Euphrate oriental ? Ce n’est pas la question fondamentale ou la plus importante ; en fin de compte, tôt ou tard, le territoire syrien sera complètement libéré. Mais ce qui est très important, c’est que la décision américaine de se retirer de l’Est syrien n’est pas le fruit d’un réveil de conscience ici ou là, dans n’importe laquelle de toutes les administrations américaines successives. Elles sont du même bois, mais avec des facettes différentes.
C’est une confession américaine de la défaite totale, et une reconnaissance qu’au cours des dernières années, les sacrifices de milliers de Syriens et de leurs alliés ont brisé le rêve américain de contrôler le Moyen-Orient à travers la Syrie, l’intersection politique, militaire et stratégique de cet Orient, et le cœur de ses alliances et de ses résistances. Il n’y a pas d’Orient accompli si Damas n’en est pas la couronne.
Article en arabe :
traduit par Rania Tahar