L’Iran et les talibans afghans ont accéléré les négociations pour relancer le processus de paix en Afghanistan, après l’annonce d’une prochaine réduction des troupes américaines stationnées dans ce pays en conflit depuis 17 ans.
Dimanche, les talibans ont effectué une rare visite à Téhéran pour tenir de nouvelles discussions avec les responsables iraniens, quelques jours après des pourparlers en Afghanistan, a indiqué lundi le porte-parole du ministère des Affaires étrangères iranien Bahram Ghassemi.
Les talibans combattent les autorités en place à Kaboul depuis l’intervention militaire américaine en Afghanistan pour chasser les insurgés du pouvoir après les attentats du 11-Septembre 2001.
L’année 2018 en Afghanistan a été marquée par des violences record avec des attentats menés par les talibans et du groupe jihadiste Etat islamique, le pays se classant désormais selon certaines estimations en tête des zones de conflit les plus dangereuses au monde.
Et la récente décision du président Donald Trump, annoncée par un responsable le 21 décembre, de retirer « environ la moitié » des 14.000 soldats américains présents en Afghanistan, avant un aboutissement du processus de paix réduit à néant les espoirs de nombreux Afghans après 17 ans de guerre.
« Une délégation de talibans afghans a eu de longues discussions à Téhéran dimanche avec le vice-ministre iranien des Affaires étrangères (Abbas) Araghchi », a indiqué M. Ghassemi.
« Le principal objectif des négociations est d’aider à faciliter des négociations entre les groupes afghans (talibans) et le gouvernement en vue de faire avancer le processus de paix », a-t-il dit.
M. Araghchi doit se rendre en Afghanistan dans les deux prochaines semaines, a ajouté le porte-parole sans autres précisions.
Plus grande influence de l’Iran
Le 26 décembre, l’Iran a annoncé avoir tenu des pourparlers en Afghanistan avec les talibans, et qu’il en avait informé le gouvernement afghan.
« L’Iran a été un pilier pour la stabilité dans la région et la coopération entre les deux pays va certainement aider à régler les problèmes de sécurité » en Afghanistan, avait alors déclaré le secrétaire du Conseil suprême de la sécurité nationale, Ali Shamkhani.
Dans le passé, l’Iran, à majorité musulmane chiite, avait démenti des informations sur la tenue de négociations avec les talibans, des sunnites.
Cette plus grande implication de l’Iran, ennemi juré des Etats-Unis, pourrait inquiéter les faucons à Washington pour qui les retraits annoncés d’Afghanistan et de Syrie risquent de renforcer l’influence iranienne dans la région.
Un proche de M. Trump, le sénateur républicain Lindsey Graham, a déclaré dimanche avoir exhorté le président américain à retarder tout retrait de Syrie pour s’assurer que « l’Iran ne devienne pas le grand gagnant de notre départ ».
L’Iran appuie militairement le régime syrien dans sa guerre contre les rebelles et les jihadistes.
Pour le général Stanley McChrystal Stanley McChrystal, un ancien commandant des forces américaines en Afghanistan s’exprimant sur ABC, « l’Iran a augmenté son influence dans la région. Si vous retirez l’influence américaine, vous risquez une plus grande instabilité ».
« Liens historiques »
« Vu notre longue frontière avec l’Afghanistan et nos liens historiques et culturels, de même que notre rôle important dans la stabilité de la région, la République islamique veut jouer un plus grand rôle dans les efforts de paix en Afghanistan », a dit le porte-parole Ghassemi.
L’Iran partage une frontière de plus de 900 km avec l’Afghanistan, pays avec lequel il a toujours entretenu des relations complexes.
La République islamique a longtemps soutenu ses coreligionnaires chiites – la minorité ethnique Hazara en Afghanistan, violemment persécutée sous le règne des talibans dans les années 1990.
Elle a en outre travaillé au côté de l’ONU et de pays occidentaux pour aider à chasser les talibans après l’invasion dirigée par les Etats-Unis en 2001.
Mais, ces dernières années, des informations de sources afghane et occidentale ont fait état de liens établis entre les Gardiens de la révolution, armée d’élite du régime iranien, et les talibans pour chasser les forces américaines d’Afghanistan.
L’Iran n’a pas commenté l’annonce américaine d’un retrait partiel de son contingent en Afghanistan, que la Maison Blanche n’a toujours pas confirmée.