Macron tente de reconquérir le cœur des Français, et en même temps…
Après avoir privilégié la sourde oreille dans les premiers temps du mouvement citoyen ou encore avoir alerté sur le rôle de la «peste brune» dans celui-ci, l’exécutif n’a pas réussi à endiguer le mouvement des Gilets jaunes, encore largement populaire auprès des Français. De fait, selon un récent sondage en amont de leur dernier acte de mobilisation, les Gilets jaunes bénéficiaient encore du soutien de 62% de la population, 74% des sondés estimant le mouvement justifié. Et ce, malgré la décision du gouvernement, le 5 décembre, de renoncer à la taxe écologique qui avait mis le feu aux poudres. Nouvelle tentative du gouvernement pour jouer l’apaisement, lors de ses vœux de Nouvel an, Emmanuel Macron soulignait la nécessité d’organiser un «Grand débat national». Toutefois, s’il est attendu par une partie des Français, l’événement ne parvient pas à contenir la défiance d’autres citoyens ; «défiance transformée en sécession» relevait ainsi l’ancien chargé de communication de la présidence, Sylvain Fort.
Ce 13 janvier, Emmanuel Macron a enfin dévoilé sa lettre aux Français, dans laquelle il a communiqué ses ambitions quant au déroulement de l’événement.
Reprenant, entre autres, certaines thématiques développées par les Gilets jaunes (dont il s’est pour l’heure toujours défendu de prononcer le nom), le chef de l’Etat entend aujourd’hui «transformer avec [les Français] les colères en solutions».
«Et en même temps», Emmanuel Macron rappelle qu’il n’a «pas oublié [avoir] été élu sur un projet, sur de grandes orientations auxquelles [il entend] demeurer fidèle», se montrant notamment catégorique au sujet des réformes fiscales déjà effectuées. Une précision qui a été interprétée par de nombreux politiques de gauche comme un refus de réintroduire l’impôt sur les grandes fortunes (ISF).
L'IVG, la peine de mort et le mariage pour tous "ne sont pas sur la table" du grand débat national et "il n'est pas question" de revenir sur ces "avancées conquises de haute lutte", a déclaré mercredi le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux #AFP pic.twitter.com/OgnXZi26Ea
— Agence France-Presse (@afpfr) January 9, 2019
En ce qui concerne les questions évoquées, le «en même temps» macronien est également de mise. «Le grand débat ce n’est pas le grand déballage», prévenait le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, à l’issue du conseil des ministres du 9 janvier 2019. Il expliquait ainsi que seraient exclus du débat les thèmes de l’interruption volontaire de grossesse (IVG), de la peine de mort ou encore du mariage pour tous, affirmant qu’«il n’é[tait] pas question de revenir sur des avancées conquises de haute lutte».
Anxiété face à la potentielle émergence de thématiques pourtant éloignées des revendications principales des Gilets jaunes ? Ou volonté de présenter un exécutif encore à même de définir le cadre permettant «à toutes et tous de débattre de questions essentielles» ?
La question semble aujourd’hui ne plus se poser, l’actuel locataire de l’Elysée ayant, dans sa lettre adressée aux Français, quelque peu contredit les propos de Benjamin Griveaux, affirmant de son côté : «Pour moi, il n’y a pas de questions interdites.»