Aux élections européennes, « il s’agira de battre Macron », empêtré dans la crise des « gilets jaunes » : Marine Le Pen a présenté dimanche sa liste, désireuse aussi de profiter des difficultés de ses adversaires et de l’arrivée au pouvoir d’alliés en Europe.
« Si Emmanuel Macron n’a pas la sagesse de changer la politique (ou) de se tourner à nouveau vers le peuple par une dissolution, (…) alors l’arbitrage démocratique devra venir des élections européennes », qui seront « comme une réplique de la présidentielle », a estimé la présidente du Rassemblement national, devant quelque 2.000 militants réunis à Paris.
« Dans le contexte de la saine révolte des +gilets jaunes+ », ces élections seront « l’occasion de dénouer la crise politique née de l’aveuglement, de l’intransigeance, du mépris de classe, de la spoliation fiscale et de la déconnexion humaine d’un président, dérangeant dans ses attitudes, inquiétant dans ses comportements, incompétent dans ses fonctions », a lancé la chef du RN.
Ses militants ont scandé à plusieurs reprise le slogan de campagne, « on arrive », déjà entendu dans les 1er mai de son père et ex président du FN, Jean-Marie Le Pen.
« Drôle de bilan »
« Le RN martèle pour les européennes #OnArrive. Pour le parti qui a le + de députés au Parlement européen, quel aveu ! C’est vrai qu’on ne les a pas vus: soupçons de détournement de fonds publics et d’emplois fictifs, aucune avancée européenne à leur actif…drôle de bilan », a tancé sur Twitter la ministre des Affaires européennes, Nathalie Loiseau. Le patron du parti présidentiel LREM, Stéphane Guérini, a écrit qu’il « cherchait encore les avancées européennes » du RN.
Marine Le Pen a présenté les 12 premiers candidats de sa liste, qui sera conduite par son fidèle porte-parole Jordan Bardella, 23 ans.
Sans prompteur et sur un ton offensif, la jeune tête de liste s’en est pris aux migrants « que M. Macron et la commission européenne veulent imposer » et qui « doivent être relocalisés mais pas chez nous », pendant que des militants clamaient « Macron démission ».
L’ancien ministre LR Thierry Mariani, qui a rallié la liste du RN à la 3e place, a dénoncé une Commission européenne présidée par « un ivrogne notoire, Jean-Paul Juncker (sic, bien Jean-Claude Juncker, ndlr), qui incarne à la perfection le bateau ivre ». Pour ce fervent défenseur de la Russie, « la principale menace ne vient plus de l’est » mais de « l’islamisation » et de « l’immigration ».
Il participera, ainsi que Jordan Bardella, au premier meeting en province de Marine Le Pen samedi 19 janvier, à Le Thor, dans le Vaucluse.
La colère, le vote
Le RN a désigné à la deuxième place une nouvelle venue, Hélène Laporte, conseillère régionale de Nouvelle Aquitaine et analyste bancaire, membre du bureau national (direction élargie).
« Nous allons donner un nom à la colère des +gilets jaunes » qui monte, (…) c’est le vote », a déclaré l’essayiste Hervé Juvin, caution de la société civile, nommé à la 5e place.
Parmi les sortants, l’eurodéputé et co-président du groupe du RN au Parlement européen, Nicolas Bay, n’arrive qu’à la 7e place. Le parti a retenu à la 10e place la candidature de Catherine Griset, pourtant soupçonnée par la justice d’avoir été l’assistante parlementaire fictive de Marine Le Pen quand elle était eurodéputée.
Outre des nouveaux visages, la chef du RN a surfé sur les difficultés de ses adversaires. Les Républicains ont « vocation à disparaître » en raison de leurs contradictions, a-t-elle souligné, en tendant aussi la main aux électeurs de La France Insoumise.
Aucun représentant des « gilets jaunes » ne sera pourtant sur la liste. « Nous sommes tous +gilets jaunes+ », explique Marine Le Pen qui a gardé ses distances à l’égard d’un mouvement défiant la représentation politique.
En dépit des violences, dont elle attribue la responsabilité à l’exécutif, sa prudence semble avoir payé. Son parti ne cesse de progresser dans les sondages et est devenu celui qui « incarne le mieux l’opposition » au chef de l’État, devant La France Insoumise, selon l’Ifop.
Au niveau européen, le RN entend former une coalition de partis souverainistes, dont plusieurs sont au pouvoir, pour « reconstruire une Union européenne différente », voire quitter l’euro « si on n’y arrive pas », a redit au Parisien M. Bardella.