Les relations que la France et l’Allemagne entretiennent, et tentent de présenter comme inébranlables, se fragilisent, les deux pays ayant des intérêts différents, selon le quotidien Die Welt.
Objectifs financiers, enjeux énergétiques et militaires: leurs désaccords sont grandissants entre la France et l’Allemagne, écrit Die Welt.
Fin décembre, Angela Merkel et Emmanuel Macron ont publié une déclaration commune en réponse à la capture par la Russie de navires de guerre ukrainiens dans le détroit de Kertch. Tous les deux ont exigé «la libération immédiate et inconditionnelle de tous les marins ukrainiens illégalement détenus».
Il se pourrait que les Russes, «avec leur sens bien développé des forces réelles», estiment que la France et l’Allemagne se sont affaiblies de par les nombreux désaccords qu’ils rencontrent, publie le journal. Raison pour laquelle Moscou n’aurait pas réagi. Cela ressemblerait davantage à un geste dans le vent et pratique pour sauver les apparences aux yeux des observateurs orientaux et occidentaux.
Fin novembre, le vice-chancelier Olaf Scholz a proposé à la France d’abandonner son siège au Conseil de sécurité des Nations unies au profit de l’Union européenne, une proposition considérée comme une «farce stupide» par Die Welt et comme étant un manque de respect non dissimulé vis-à-vis de la France de la part du social-démocrate et ministre des Finances qui souhaite se présenter comme candidat à la chancellerie.
En décembre, le commissaire européen Günther Oettinger (CDU) a remué le couteau dans la plaie, soulignant que la France d’Emmanuel Macron tentait de s’attirer la sympathie des Gilets jaunes en multipliant les programmes de paiement provenant de fonds publics, rappelle Die Welt. Oettinger a déclaré: «L’argent supplémentaire promis par M.Macron n’est pas un cadeau de Noël ponctuel, mais une dépense structurelle permanente.» Selon lui, la France enfreint la règle du déficit public prévue par le traité de Maastricht. L’homme politique présente ainsi la France comme un pays peu fiable, dirigé par une administration incompétente.
Une des explications à ces critiques anti-françaises serait le désir de détourner l’attention des Allemands sur les problèmes économiques que rencontre actuellement l’Allemagne, explique l’auteur de l’article. Mais il y aurait une raison plus profonde: le mécontentement de l’Allemagne face à la tentative de Macron d’imposer sa France pro-réformiste comme dirigeante de l’UE. M.Macron est intervenu militairement en Syrie et en Afrique, et a parfois même contredit Vladimir Poutine. Le leader français présenterait donc une figure plus vive que celle d’Angela Merkel, considérée comme plutôt passive.
En France, les sentiments anti-allemands sont actuellement articulés tant par la gauche de Jean-Luc Melenchon, qui qualifie l’Allemagne de «monstre», que par Marine Le Pen qui reste plus prudente et estime que le rôle de Berlin en Europe se limite à la protection de ses propres intérêts. Le projet de gazoduc Nord Stream 2, par lequel le gaz naturel russe sera acheminé via la mer Baltique vers l’Allemagne, représente également un point de désaccord entre les deux pays, conclut Die Welt.