Le discret fondateur de Huawei, Ren Zhengfei, a démenti farouchement, dans une rarissime interview diffusée mardi, que le géant chinois des télécoms puisse espionner pour le compte de Pékin, comme le redoutent nombre de pays occidentaux… tout en tressant des lauriers à Donald Trump.
« J’aime mon pays, je soutiens le Parti communiste. Mais je ne ferai jamais rien pour nuire au monde », a affirmé M. Ren devant un groupe de journalistes étrangers, selon des propos rapportés par l’agence Bloomberg.
« Je ne vois aucune relation particulière entre mes convictions politiques personnelles et les activités de Huawei », a asséné Ren Zhengfei, qui fut ingénieur de l’armée chinoise avant de fonder la société. L’entreprise refuserait toute requête de Pékin pour obtenir des données sensibles de ses clients, a-t-il assuré.
Ren Zhengfei, qui n’apparaît quasi-jamais dans les médias, sort de l’ombre à l’heure où la récente arrestation en Pologne d’un employé chinois de Huawei pour espionnage renforce les suspicions autour du groupe.
Devenu l’un des plus grands équipementiers télécoms du monde, Huawei se trouve au centre de soupçons d’espionnage dans plusieurs pays dont les Etats-Unis, l’Australie et le Japon, qui lui ont interdit de bâtir un réseau d’internet ultrarapide 5G — et des médias se sont fait l’écho de doutes en France, en Allemagne et au Royaume-Uni.
Autre coup dur pour Huawei: l’arrestation le 1er décembre au Canada, sur demande de la justice américaine, de la directrice financière du groupe Meng Wanzhou… la propre fille de Ren Zhengfei. Les Etats-Unis, qui demandent son extradition, la soupçonnent de complicité de fraude pour contourner les sanctions contre l’Iran.
Alors que Pékin, ulcéré par cette arrestation, est engagé dans une vive passe d’armes à ce sujet avec Ottawa, M. Ren a déclaré que sa fille lui manquait mais a nié farouchement tout contact avec le gouvernement chinois, selon le Financial Times.
Pour certains analystes, la vive réaction de Pékin et l’arrestation peu après de deux citoyens canadiens en Chine tendraient plutôt à confirmer l’existence d’étroites connexions entre Huawei et le régime communiste.
En revanche, Ren Zhengfei a fait un éloge appuyé du président américain Donald Trump, qui s’était dit prêt en décembre à intervenir dans le dossier Meng Wanzhou pour préserver les négociations commerciales avec Pékin.
« C’est un grand président. Il ose sabrer massivement les impôts, ce qui est bon pour les affaires », a-t-il relevé, ajoutant que Huawei « n’est qu’une graine de sésame dans le conflit commercial sino-américain ».
Ren Zhengfei annonce par ailleurs tabler sur des revenus annuels de 125 milliards de dollars en 2019 : face aux interdictions occidentales, « nous pouvons réduire nos activités, mais tant que nous pouvons survivre et nourrir nos employés, nous aurons un avenir ».