La question de la suspension de la libération de MM. Gbagbo et Blé Goudé est en train d’être débattue en audience. La décision de la Cour pourra faire l’objet d’un appel de la part de la Défense, a souligné Fadi El Abdallah, porte-parole de la Cour pénale internationale.
Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a fait savoir, mercredi 16 janvier, qu’il comptait interjeter appel de la décision d’acquittement de Laurent Gbagbo et de son ex-ministre, Charles Blé Goudé, prononcée la veille par la juridiction internationale.
Une requête, présentée par l’Accusation et rendue publique par la CPI, contestait le bien-fondé des motivations de la décision d’acquittement et demandait à surseoir à la libération immédiate des deux accusés.
«L’Accusation demande que la Chambre impose des restrictions à la libération des accusés […], et ce, conformément aux stipulations de l’article 81 (3) (c) (i) du Statut [de Rome qui a institué la CPI en 1998, ndlr]. L’Accusation, sur la base d’une évaluation préliminaire de l’annonce d’acquittement des accusés, rendue à la majorité par la 1re Chambre, a décidé qu’elle entend faire appel de l’ensemble de la Décision, ainsi que de ses motivations détaillées», peut-on lire dans la note d’une vingtaine de pages sur l’affaire Procureur c/Charles Blé Goudé et Laurent Gbagbo.
«La question de la suspension de la libération de MM. Gbagbo et Blé Goudé est en train d’être débattue, en ce moment, dans une audience. La décision sera rendue aujourd’hui, ou plus tard. Cette même décision pourra faire l’objet d’un appel» de la part de la Défense, a souligné Fadi El Abdallah, porte-parole de la CPI, joint au téléphone.
Sans préjudice de l’élargissement éventuel des deux anciens dignitaires ivoiriens, la durée d’un procès en appel pourrait «ne pas durer aussi longtemps que le procès en première instance. Il n’est pas possible, en revanche, d’avancer une estimation sur la durée moyenne d’un procès en appel à la CPI. Cela change d’une affaire à une autre», poursuit l’officier international.Régulièrement accusés de cibler prioritairement des personnalités africaines, les juges de La Haye avaient rendu, en juin 2018, une autre décision d’acquittement en faveur de l’ex-chef rebelle congolais Jean-Pierre Bemba.
À la suite d’une première condamnation à 18 ans de prison, prononcée en juin 2016, une décision d’acquittement est intervenue, en appel, au terme de 2 ans de procès. M. Bemba était poursuivi pour «crimes de guerre» et «crimes contre l’humanité» en Centrafrique, pour la période allant d’octobre 2002 à mars 2003. Ses troupes avaient, à l’époque, soutenu les forces loyalistes du Président Ange-Félix Patassé contre la rébellion de M. François Bozizé, auteur d’un coup d’État.
L’enjeu de la durée du procès en appel est en rapport avec l’échéance de la présidentielle ivoirienne, prévue dans moins de deux ans, en Côte d’Ivoire, et à laquelle M. Gbagbo n’exclut pas de se présenter, d’après ses proches.
L’acquittement de Laurent Gbgabo, 73 ans, intervient au terme de huit ans de détention, dont trois ans de procès, au cours desquelles plusieurs demandes de remise en liberté provisoire avaient été présentées, sans succès.L’ancien président ivoirien et son ex-ministre devaient répondre de plusieurs chefs d’accusation sur fond de leur implication présumée dans les violences post-électorales de 2010-2011 en Côte d’Ivoire qui ont fait 3.000 morts, imputés aux deux camps en conflit.
Cette crise politico-sécuritaire est née d’un différend électoral qui aboutit à la proclamation de deux vainqueurs, à la suite du second tour de la présidentielle, MM. Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara. L’arrestation du premier, le 11 avril 2011, par les troupes du second, soutenues par l’armée française, a signé la fin de la crise.