Des fakirs qui jouent de la flûte à d’horribles cobras, un dentiste natif du lieu en tongs peu ragoûtantes, avec un pot rempli de dents arrachées, des tambourineurs en un costume national bariolé, des stalles où on vous sert des plats épicés dans de brillants tajines; la place centrale de Marrakech, l’ancienne capitale du Maghreb, est exotique, vibrante et tapageuse, tout à fait à la hauteur des attentes d’un nouveau Paul Bowles.
La place est entourée d’un réseau de ruelles étroites, qui rappellent la vieille ville à Séville. Le Maghreb et l’Espagne sont unis par bien des traits de leur culture. Le Bahia Palace de Marrakech est un petit frère du magnifique Alcazar de Séville, et ses minarets imitent la Giralda. Les Maures, ou Maghrébins, ont créé les perles de la civilisation espagnole à Grenade, Cordoue et Séville, mais ils n’ont pas renouvelé l’exploit après leur expulsion, de retour sur leur propre sol.
Marrakech, c’est un nœud de vieilles routes reliant Tombouctou par le Sahara et l’Andalousie par le détroit de Gibraltar, les rivages de l’Atlantique avec ses surfeurs et le reste de l’Afrique du nord par Fès et Tunis. La première de ces routes est la plus romantique. La meilleure évocation de la navigation transsaharienne, c’est le film glorieux quoique sous-estimé de Bernardo Bertolucci, Un thé au Sahara. Si le cinéma devait disparaître comme les enluminures des vieux manuscrits, hors de la conscience publique, ce film resterait, avec une poignée d’autres films, comme témoignage de ce jadis grand art. Les résidences carrées, les kasbah, avec leurs murs aveugles et leurs toits crénelés, bordent les routes fréquentées par les camions qui ont remplacé les chameaux. L’Afrique sub-saharienne est très loin, 52 journées à dos de chameau la séparent du Maghreb. Le ciel étoilé, un ciel incroyable, incomparable, est une raison suffisante pour aller voir le Sahara de près.
La deuxième route, vers Gibraltar et au-delà, est plus importante, parce que le Maghreb est bien relié à l’Europe. La Méditerranée rattache le Maghreb à l’Europe, alors que le Sahara le sépare du reste de l’Afrique. Arnold Toynbee considérait le Maghreb comme une extrémité de l’Europe, comme les Balkans ou la Scandinavie. Si l’Europe a pris la suite de l’Empire romain, le Maghreb, ou l’Afrique et la Mauritanie, ont été les provinces romaines les plus riches et les plus durables, alors que la Germanie et la Scandinavie étaient encore terra incognita. Cette proximité se voit contrebalancée par la différence de croyances. Les Maures ont été parmi les premiers à accepter le Christ, et ils ont donné les Pères de l’Eglise Tertullien et saint Augustin; mais ils ont bifurqué vers l’islam il y a fort longtemps, et sont devenus non seulement des voisins mais des concurrents et des adversaires pour l’Europe.
Ce sont eux, les Maures, le sujet de cet article. Avec les Européens, ils envahissent et s’invitent les uns chez les autres à tour de rôle, comme les vagues qui affluent et refluent sur le rivage. Ce n’est pas qu’il y ait eu un sens toujours prévalent. Les Maures ont colonisé l’Europe et les Européens ont colonisé le Maghreb. Ils ont également expulsé leurs colonisateurs même au bout de plusieurs siècles. Rien n’est éternel. Les Maghrébins, ou Maures, ne sont pas particulièrement dociles, pas du tout. Ce sont des gens dynamiques, vigoureux, des gaillards bien pourvus en testostérone. N’allez pas vous y frotter, vous le regretteriez. Vous le regretterez de toute façon, comme Desdémone avec le Maure de Venise. Les Maures ne sont pas noirs. Ils ressemblent à des Européens du sud, les uns plus clairs, les autres plus foncés, comme les Grecs, les Espagnols ou les Italiens. Il y en a maintenant des quantités qui vivent en Europe, principalement en France et aux Pays-bas, au point qu’on peut parler d’une nouvelle conquête mauresque. Les invasions réciproques ont commencé il y a 2000 ans. Dans la confrontation entre Carthage, la principale ville d’Afrique du nord, et Rome, la première capitale européenne, les Romains avaient gagné; ils conquirent et colonisèrent les Maures, et leur firent place dans l’empire; ils embrassèrent la foi chrétienne et entrèrent dans l’église latine. Tout comme l’Espagne le Maghreb fut submergé par les Vandales, un peuple d’Europe du nord, mais ils revinrent sous la houlette de la Rome orientale, sous Justinien. La domination européenne prit fin avec l’arrivée des Arabes, qui se mêlèrent aux autochtones, leur amena l’islam, les mobilisèrent et entreprirent l’aventure européenne. Les Maures s’emparèrent de l’Espagne (c’est ce qui s’appelle la Conquista) et leur civilisation y atteignit son apogée. Mais rien ne dure éternellement.
Des centaines d’années plus tard, les Espagnols vainquirent les Maures et les renvoyèrent en Afrique du nord. Même les Maures chrétiens furent expulsés, un peu plus tard (c’est ce qu’on a appelé la Reconquista, ou reconquête) [1].
Et pourtant, l’idée de séparation, ça ne marcha pas. Les Maures ne se résignèrent pas après leur défaite. Ils commencèrent à entreprendre des raids sur les rivages européens, et à attaquer les bateaux européens. On les appela alors les corsaires barbaresques, les redoutables adversaires des Européens. Ils firent des percées en Europe jusqu’en Islande, et dépeuplèrent villes et villages du sud de la France et de l’Espagne. L’Europe était pour eux un gisement d’esclaves.
Elle était là, la grande différence entre l’Europe et le monde musulman: l’esclavage. C’était un phénomène marginal en Europe (après la chute de l’Empire romain), mais populaire en Dar al Islam. Les musulmans faisaient usage d’esclaves, ils en avaient besoin, et apparemment ils préféraient les esclaves européens chrétiens. Lorsque l’Espagne était musulmane, les Vikings ravagèrent l’Europe orientale, ils capturaient les habitants et les vendaient aux juifs, et ceux-ci négociaient cette denrée hautement appréciée à Cordoue. Plus tard, les Européens de l’Est, ancêtres des Russes modernes, firent l’objet de razzias par les Tatares de Crimée, qui les convoyaient vers Istanbul. Mais la demande était forte, les profits considérables, et les Maures entreprirent de faire des incursions sur les plages de l’ouest, et d’attaquer les bateaux en Méditerranée. Ces corsaires étaient fort différents des pirates des Caraïbes. Le peuple de Jack Sparrow, c’étaient des Européens, qui convoitaient les bateaux. Ils n’avaient cure des équipages ni des passagers des vaisseaux arraisonnés; on pouvait les jeter par-dessus bord ou les débarquer sur une plage en leur donnant un canot; on les gardait rarement contre rançon. Les corsaires de Barbarie visaient surtout les équipages et leurs passagers. Ils traitaient les Européens comme les Européens traitèrent les Africains sub-sahariens noirs: ils étaient capturés, mis en esclavage et vendus sur le marché. Oui, chère Virginie, les blancs aussi ont été esclaves. Tout Européen pouvait tomber en esclavage en Dar al-islam, et des millions d’Européens de l’est et de l’ouest, des Français, des Espagnols, des Britanniques et des Russes ont été vendus et achetés sur les marchés d’Istanbul. Les Européens ont été forcés de s’emparer du Maghreb (tout come les Russes ont été obligés de conquérir la Crimée) pour en finir avec les razzias des esclavagistes. Et ce fut le début de la colonisation européenne du Maghreb.
Les Maures cessèrent de venir en Europe, mais à cette époque, les Européens s’étaient installés au Maghreb. Ils avaient construit des villes et des cités, implanté des industries, et relié le Maghreb à l’Europe. Ils s’étaient fixés au Maghreb, en espérant y rester à jamais.
Mais cela ne marcha pas: à leur grand surprise (?), les Maures n’appréciaient guère leur présence. Ils se soulevèrent, se rendirent indépendants, et chassèrent tous les colons européens, des millions de gens, direction l’Europe. Un demi million de colons du Maroc, un million et demi d’Algérie, deux cent mille de la petite Tunisie durent quitter leurs maisons et s’en aller vers le pays où ils n’avaient probablement jamais mis les pieds.
Se sont-ils tourné le dos pour autant? Pas vraiment. En peu de temps, les Maures ont débarqué en Europe par centaines de milliers et y ont fait souche. Aujourd’hui la France et les Pays Bas ont plus de Maures, entre trois et quatre millions, que l’Espagne n’en eut à l’apogée du pouvoir maure.
Cela n’a pas aidé les Européens expulsés. Les maisons des colons européens en Algérie, au Maroc et en Tunisie ne furent pas rendues à leurs propriétaires. Elles sont toujours là, comme un mémorial de l’époque où les Européens vivaient en Afrique du nord.
Le général De Gaulle garantit à l’Algérie son indépendance, pour arrêter une migration de masse de Maures en France, disait-il. Cela ne marcha pas; l’Algérie devint indépendante, mais la migration ne s’est pas tarie. J’évoquais avec mon ami marocain Hamid un éventuel déménagement en Europe. Il ne veut rien savoir, même si nombre de ses amis, connaissances et parents ont sauté le pas. Il dit qu’il a ses aises, dans son Maghreb natal. S’il voulait vivre en France avec le même statut, il faudrait qu’il travaille bien plus dur. Se loger en France, ça coûte très cher. Chez lui, au Maroc, il vit bien, dans la classe moyenne qui es son élément, et il continue à travailler normalement, sans excès. Il est sage, mais cela n’empêche pas bien d’autres Maures de choisir l’Europe.
Dans la vieille ville de Marrakech, j’ai trouvé une synagogue. C’est un complexe tentaculaire, avec une cour intérieure, et elle se trouve à quelques centaines de mètres du Palais royal, comme c’est généralement le cas pour tous les centres communautaires juifs. Malgré des histoires de « persécutions », mes ancêtres étaient largement privilégiés, même au Maroc et en Espagne. Ils ont été bien utiles dans les mouvements de population entre Europe et Maghreb, pendant des siècles.
Les Juifs ont été au premier rang pour aider les Maures à conquérir l’Espagne, prolongeant la tradition consistant à changer de camp au bon moment (en Palestine, les juifs soutinrent l’invasion perse, puis l’invasion arabe). Les juifs jouèrent un rôle important dans l’Espagne mauresque, et durent plier bagage avec eux.
Au Maghreb ils prêtèrent main forte à nouveau aux Européens. C’est le ministre de la justice juif Adolphe Crémieux qui donna, au XIX° siècle, la citoyenneté française aux juifs algériens (mais non aux autres Algériens) C’était un acte astucieux: les juifs locaux influents soutinrent la France contre les autochtones.
En Tunisie, les juifs étaient extrêmement puissants depuis des siècles. En 1819, le consul des Etats-Unis à Tunis, Mordecai Manuel Noah, écrivait à leur sujet: « Les juifs sont ceux qui commandent; en Barbarie ce sont les principaux mécaniciens, ils dirigent la douane, ils prélèvent les impôts; ils contrôlent la menthe, ce sont les trésoriers du bey, ses secrétaires et ses interprètes. Ces gens donc, quoiqu’on puisse dire de leur oppression, possèdent une capacité de contrôle, et il faut se méfier de leur éventuelle opposition, qui serait redoutable ».
Quand les Français arrivèrent, ce « peloton de tête » changea de bord et ils apportèrent leur soutien à l’administration coloniale française. Pourtant, même alors ils n’avaient pas de sympathie envers les colons français, et leur expulsion a été expliquée comme une mesure parfaitement justifiable par Albert Memmi, l’éminent écrivain tunisien juif. Pour Memmi, c’étaient des rapaces obsédés par la convoitise. « Vous allez aux colonies parce que les emplois y sont garantis, les salaires sont élevés, les carrières plus rapides, et les affaires plus profitables. Le jeune diplômé se voit offrir une situation, le fonctionnaire un rang plus élevé, l’homme d’affaires est soumis à des taxes bien plus basses, les industriels trouvent des matières premières et de la main d’œuvre bien meilleur marché. On vous entend souvent rêver tout haut: dans quelques années vous quitterez votre purgatoire rentable et repartirez vous acheter une maison dans votre pays ». Il n’avait pas remarqué que l’on pouvait attribuer la même attitude aux Tunisiens juifs et musulmans qui venaient s’installer en France.
Les juifs s’en iraient en Israël ou au Québec le moment venu; les musulmans rentreraient chez eux. Mais cela ne marchera probablement pas comme ça.
Les juifs d’Europe adorent l’émigration du Maghreb. En tout cas ils font tout pour l’encourager. Mais pourquoi donc est-ce que les Européens ont accueilli lls immigrants maghrébins? Après avoir été expulsés de ces contrées, on pouvait s’attendre à ce que les Européens disent : « vous avez voulu vous débarrasser de nous, eh bien maintenant restez où vous êtes et savourez votre libération des Européens ». Mais les pays d’Europe voulaient des immigrants, et ce n’était pas au premier chef parce qu’ils avaient besoin de main d’œuvre, puisque certains pays européens s’en sont très bien tirés sans y avoir recours.
Après la longue guerre mondiale, l’Europe s’était retrouvée occupée; à l’Ouest par les US, à l’est par l’URSS. Les dirigeants menèrent des politiques très différentes; les dirigeants européens n’avaient guère confiance dans leurs nations, et c’est la raison pour laquelle ils commencèrent à attirer des immigrants d’Afrique du nord et de Turquie, tout en prêchant la diversité.
Les dirigeants prosoviétiques ne voulaient pas d’immigrants du tout, et ils menèrent des politiques nationalistes modérées. L’expérience de l’Allemagne de l’est, de la République tchèque et de la Hongrie ont prouvé que les pays européens n’ont pas besoin d’immigrants pour faire tourner l’économie.
Ces pays connurent l’homéostasie, c’est à dire un équilibre relativement stable avec un développement faible, une quasi stagnation qui allait de pair avec l’amélioration constante du niveau de vie des travailleurs du commun. C’est ce qui se produisit dans les Etats socialistes, y compris les Etats scandinaves, au socialisme modéré.
Les Européens auraient pu connaître une vie calme et paisible, en voyant s’élever doucement et graduellement leur niveau de vie, tout en chutant du point de vue démographique. Le monde n’est pas un gisement sans fond, les ressources sont limitées, la construction de logements prend du temps. Cela pourrait être bon pour l’Europe de voir décroître sa population jusqu’aux niveaux des années 1880. Ce serait un nouvel âge d’or, avec des pelouses vertes partout, des forêts, des conditions de vie modestes mais agréables pour tous.
Pourrait-il y avoir une immigration sans les juifs? Oui, parce qu’il y a assez de non-juifs pour imiter les juifs. Même si tous ne réussissent pas, il y en a beaucoup, et ils veulent aller beaucoup plus loin. Pour mettre un terme à l’immigration, il faut arrêter la croissance et l’expansion, mettre à bas le capitalisme tel que nous le connaissons.
La production et le marché sont tout à fait compatibles en homéostasie; les taux d’intérêt, l’actionnariat et le change monétaire ne le sont pas.
Les Gilets jaunes français ont proposé de faire des produits durables. C’est un pas en avant radical et salutaire, au lieu de faire du monde une poubelle, avec des modèles qui sont apparus il y a deux ans et qui sont déjà périmés ou inutilisables. Nous avions tout cela autrefois, je me souviens d’un frigidaire en parfait état de marche au bout de vingt ans, d’une coccinelle Volkswagen en parfait état de marche au bout de trente ans de bons et loyaux services. Si nous le voulions, nous pourrions fabriquer des objets qui durent pratiquement toujours, des choses réparables et serviables.
Le Japon est un bon exemple dans son évolution; notre collègue Linh Dinh s’est rendu sur la terre de Yamato, et il a été choqué par ce qu’il voyait, une population vieillissante et une jeunesse sans amour. Moi aussi, je me rends souvent au Japon; oui, le Japon était peut-être plus drôle il y a des années, mais ça se passe bien, là-bas. Il n’y a pas une forte croissance, les commerçants américains et européens ne s’enrichissent pas du jour au lendemain en spéculant sur les biens des Japonais. Les parts des actionnaires ne grimpent pas, c’est vrai. Mais pour les Japonais ordinaires c’est très bien comme ça. Ils pourraient connaître encore moins de progressions, et s’en trouver satisfaits quand même.
Mes amis japonais m’ont souvent dit, quand je faisais des réserves sur la lenteur de la croissance de l’économie japonaise: nous n’en voulons pas plus. Les années de croissance rapide ont été nos années de misère. Les années de stagnation nous conviennent très bien. Si les US voulaient bien nous oublier complètement, au lieu de nous harceler pour nous faire adopter leurs idées de croissance et de diversité, nous serions encore plus heureux. Notre monde a besoin de moins en moins de main d’œuvre. Qu’est-ce qui nous empêche de nous réjouir de cet état de fait? La population européenne ne grossit pas, elle décroît doucement. Les immigrants d’Afrique du nord et d’ailleurs connaissent quant à eux une croissance certaine, mais qu’ils aillent donc poursuivre leur croissance sur leurs terres ancestrales. Quand ils chassaient les Européens de leurs pays, ce n’était pas la durée de leur séjour qui les arrêtait. Des familles qui vivaient en Algérie depuis un siècle ont été forcées de partir. Par conséquent, ce sont les peuples d’Afrique du nord eux-mêmes qui se sont prêtés à des expulsions. Ce sont de braves gens, mais pas meilleurs que les colons européens en Afrique du nord.
Il n’y a pas de raison de s’alarmer de la croissance de la population africaine. C’est une affaire africaine, après tout. Le Sahara est trop grand à traverser; on peut arrêter les compagnies aériennes qui font du trafic d’hommes. Certes, bien des Africains préfèreraient résider en France ou en Hollande, et il y a sûrement des Africains qui vont y parvenir. Mais pas de vagues massives de peuplement, par pitié, sauf s’il y avait des Théodoric ou des Gengis Khan pour mener la danse.
Quand j’étais petit, il y avait un jeu très populaire, les chaises musicales. Tant que la musique jouait, on pouvait choisir sa chaise, et s’asseoir aussitôt que la musique s’arrêtait. Maintenant ça suffit, ce jeu. Laissez les gens là où ils ont toujours été. Cette tentation de la croissance sans fin, il faut s’en débarrasser, et c’est faisable. Il suffit de porter nos coups contre la rapacité, l’esprit d’avarice, cette envie de posséder toujours plus; et nous allons atterrir tout doucement sur nos vertes prairies.
[1] On lira avec profit Chrétiens, juifs et musulmans dans al-Andalus, Mythes et réalités de l’Espagne islamique, par Dario Fernandez Moreira, préface de Rémi Brague, éd. Jean-Cyrille Godefroy, novembre 2018