« Il est important que le règlement afghan soit abordé de manière transparente », selon le MAE russe

Une rencontre inédite entre représentants talibans et hauts dignitaires de l’opposition au gouvernement afghan, autour de l’ex-président Hamid Karzaï, s’est tenue aujourd’hui à Moscou, où le groupe insurgé a détaillé la vision du pouvoir qu’il compte exercer à l’issue d’un accord de paix.

C’est la première fois dans une retransmission en direct à la télévision afghane qu’apparaissent côte à côte les plus hauts dignitaires talibans menant les négociations de paix et certains des opposants les plus puissants au président afghan Ashraf Ghani.

Pour le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, cité dans un communiqué, « il est important que le règlement afghan soit abordé de manière transparente et avec la participation de toutes les forces politiques du pays ainsi qu’en tenant compte des intérêts de tous ses voisins ». Mais pour l’analyste Michael Kugelman, du Wilson Center, interrogé par l’AFP, « il y a quelque chose de surréaliste dans le fait que les politiciens les plus puissants de l’opposition afghane rencontrent les talibans pour amorcer un dialogue intra-afghan qui n’inclut pas le propre gouvernement du pays ».

Parmi les quelques 80 membres de la délégation de l’opposition afghane figuraient d’anciens chefs de guerre de l’Alliance du Nord, qui ont fait la guerre aux talibans dans les années 1990: Mohammad Mohaqiq, Younus Qanooni, qui soutiennent tous deux Mohammad Hanif Atmar, sérieux prétendant à la présidentielle du 20 juillet prochain, ou encore Atta Mohammad Noor. Le chef du bureau politique taliban au Qatar, Sher Mohammad Abbas Stanikzai, a profité de la tribune qui lui était offerte – les dernières discussions avec les Etats-Unis fin janvier à Doha s’étaient tenues à l’abri des caméras – pour expliquer quel pouvoir les talibans comptaient exercer si un accord de paix était signé.

En premier lieu, il réclame une nouvelle « constitution islamique » pour l’Afghanistan, en remplacement de l’actuelle, qu’il a qualifiée de « vague et contradictoire » ou encore d »invalide parce qu’elle a été copiée de l’Ouest ». Les talibans « ne veulent pas le monopole du pouvoir mais un système islamique inclusif », a-t-il assuré, après avoir égrené une longue liste de requêtes. « Nous ne permettrons à personne d’utiliser le sol afghan contre quiconque », a lancé le représentant taliban.

Il a également promis d’éradiquer la culture du pavot, qui fournit 90% de l’opium mondial et dont les talibans tirent actuellement d’importants revenus, et de prendre des mesures pour prévenir les pertes civiles dans un conflit qui a fait des dizaines de milliers de morts et de blessés. Les organisations humanitaires seront, selon lui, invitées à pénétrer « sans risque » sur les territoires contrôlés par les talibans.