Venezuela : parti d’échecs autour de l’aide humanitaire

Juan Guaido et Nicolas Maduro déplacent leurs pièces pour atteindre leurs objectifs alors que la situation est toujours aussi tendue.

C’est à celui qui se montrera le plus efficace. D’un côté, Juan Guaido, bien déterminé à faire entrer au Venezuela l’aide humanitaire américaine qui se trouve pour l’instant au Brésil et en Colombie. De l’autre, Nicolas Maduro, qui renforce son blocus militaire. « Par mer, par terre (…) Nous devons ouvrir un corridor humanitaire quoi qu’il arrive », a lancé le chef de file de l’opposition devant des dizaines de routiers réunis dans l’est de Caracas pour offrir leur appui, samedi, à l’opération d’acheminement de l’aide humanitaire stockée aux portes du Venezuela.

Reconnu comme président par intérim par une cinquantaine de pays, Juan Guaido a expliqué que des brigades de volontaires se rendraient en différents points de l’Etat de Tachira (ouest), frontalier avec la Colombie, et dans l’Etat de Bolivar (sud), frontalier avec le Brésil. L’opposant de 35 ans, qui n’a pas révélé où lui-même se trouverait, a également mentionné les ports de Cabello et de La Guaira, les deux principaux du pays.

La veille du jour « J », un concert destiné à recueillir des dons pour la population vénézuélienne, organisé par le milliardaire britannique Richard Branson, aura lieu dans la ville colombienne de Cucuta. Le président colombien Ivan Duque et son homologue chilien Sebastian Piñera ont prévu d’y assister. Pour riposter, le gouvernement a annoncé la tenue vendredi et samedi d’un autre concert sur le pont Simon Bolivar qui assure la liaison entre la localité vénézuélienne de San Antonio et Cucuta. Les têtes d’affiche ne sont pas connues. Les deux concerts seront distants d’à peine 15 km.

Une manifestation samedi

Juan Guaido a également appelé ses partisans à manifester en masse samedi pour soutenir les « caravanes » de volontaires qui se rendront à la frontière. Le gouvernement, qui a annoncé l’arrivée mercredi de 300 tonnes de médicaments achetés à la Russie, a aussi appelé ses partisans à descendre dans la rue. « Même s’ils pointent leurs armes vers nous (….) nous n’avons pas peur, la poitrine découverte, nous continuerons à descendre dans la rue, réclamant la liberté pour tout le Venezuela », a lancé Juan Guaido.

La grande inconnue reste toujours la façon dont Juan Guaido et ses partisans comptent forcer le blocus militaire que le gouvernement ne cesse de renforcer. Mercredi, après avoir annoncé la suspension des vols et liaisons maritimes avec les îles néerlandaises de Aruba, Bonaire et Curaçao – cette dernière devant abriter de l’aide en provenance de Miami – le gouvernement à interdit à toute embarcation de quitter les ports du pays.

Un « show politique »

Le président Nicolas Maduro refuse catégoriquement toute entrée d’aide d’urgence qu’il qualifie de « show politique » de la part de l’opposition et des Etats-Unis. « Messieurs de l’armée, vous avez trois jours pour vous ranger du côté de la Constitution (…) Les gens veulent vous voir aider à livrer ces caisses aux hôpitaux « , déclaré l’opposant dans une énième tentative pour briser le soutien déterminant de l’armée au pouvoir chaviste.

Réunis mercredi à Miami, des responsables militaires américains et colombiens ont encore accentué la pression sur les militaires, les exhortant à « faire ce qu’il faut ». L’armée a bloqué avec des conteneurs le pont Tienditas, qui relie la ville de Cucuta – où de l’aide américaine est stockée depuis le 7 février – et la ville vénézuélienne d’Ureña. Mais ce n’est pas le seul point de passage dans la zone. Le plus importante, le pont Simon Bolivar, reste ouvert au piétons. Frappés de plein fouet par une hyperinflation record, des centaines de Vénézuélien traversent chaque jour la frontières avec des cargaisons illégales, selon la police colombienne.

« Nous n’excluons rien du tout « , a dit Juan Guaido interrogé pour savoir si l’aide pourrait entrer par ce type de voies alternatives. « A cette frontière, entrent et sortent quotidiennement des marchandises au nez et à la barbe des autorités des deux pays : à travers la montagne, par des sentiers, par le fleuve. Il n’y a aucune manière de contrôler si ces personnes emmènent un sac d’aide humanitaire », relevait l’analyste Luis Vicente León.

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