Okinawa vote contre le déplacement d’une base américaine

Une majorité des habitants de la région subtropicale d’Okinawa au Japon a voté dimanche par référendum contre le déplacement controversé d’une base militaire américaine, selon les résultats des sondages de sortie des bureaux de vote donnés par les médias.

Ce vote sans valeur légale appelait à se prononcer sur un projet soutenu par les gouvernements japonais et américain de transfert de la base du corps des Marines de Futenma depuis la zone densément peuplée d’Okinawa où elle se trouve vers un site isolé sur le littoral, en partie gagné sur la mer.

Le référendum stipule que le gouverneur de ces îles situées à plus de 1.500 km au sud-ouest de Tokyo, Denny Tamaki, est appelé à « respecter » le résultat des urnes si celui-ci rassemble au moins un quart des quelque 1,15 million d’inscrits, soit environ 290.000 voix. Le nombre précis d’opposants devait être connu plus tard dans la soirée.

Le taux de participation tourne autour de 50 %, selon les médias, laissant ouverte la question de l’effet concret de ce référendum. Quelle qu’en soit l’issue, elle ne constituera aucune obligation pour le gouvernement central du conservateur Shinzo Abe.

Selon un sondage publié cette semaine par le quotidien de gauche Asahi Shimbun, 80 % des personnes interrogées souhaitaient que Tokyo respecte le résultat.

« Un vote important »

Mais rien n’a semblé indiquer, ces derniers temps, que l’exécutif serait prêt à renoncer à ce déplacement, son porte-parole Yoshihide Suga ayant clairement dit qu’il n’était pas prévu d’arrêter ce projet.

Les habitants opposés à ce déménagement souhaitent que la base quitte totalement la région d’Okinawa, arguant qu’elle supporte une part disproportionnée du fardeau militaire américain. Okinawa totalise moins de 1% de la superficie totale du Japon mais héberge plus de la moitié des quelque 47.000 militaires américains stationnés dans le pays.

Pour les Etats-Unis, ces îles proches de Taïwan ont une très grande importance stratégique en Asie.

Les bulletins de vote devaient initialement porter les mentions tranchées de « oui » ou « non », contrairement à la pratique fréquente au Japon consistant à pouvoir aussi dire ni oui ni non. Mais plusieurs villes proches du gouvernement central ayant menacé de boycotter le scrutin si l’on n’introduisait pas cette option, une réponse « ni l’un ni l’autre » a été ajoutée.

« Ils dépensent beaucoup d’argent du contribuable et de ressources humaines pour ce référendum, bien que le résultat n’ait pas force légale. Alors on s’est dit qu’on devait saisir cette occasion pour bien réfléchir à ce sujet », a déclaré à l’AFP Yuki Miyagaki, après avoir voté.

« Généralement nous crions notre opposition à la construction de la nouvelle base. C’est une bonne occasion de dire directement au gouvernement et avec des chiffres concrets: +Non+. C’est un vote important », a affirmé à l’AFP Narumi Haine, 32 ans.

Tokyo « se moque d’Okinawa »

« Ce référendum a à nouveau souligné la forte opposition d’Okinawa à ce déménagement », a déclaré à l’AFP, Yoshinobu Yamamoto, professeur de sciences politiques à l’Université de la préfecture de Niigata. « Le résultat pourrait servir d’atout au gouverneur dans la négociation mais il a peu de chance d’avoir un impact immédiat », a-t-il ajouté.

Le gouverneur Denny Tamaki, fils d’un Marine américain et d’une Japonaise, est également opposé au transfert de la base.

« Cette dispute est loin d’être résolue », a estimé M. Yamamoto.

Le déplacement de Futenma vers la région de Nago, à 50 kilomètres, avait été décidé une première fois en 1996 alors que les Etats-Unis s’efforçaient de calmer la colère des habitants après le viol collectif d’une écolière par des militaires américains. Depuis ce projet avait été gelé en raison des oppositions auxquelles il était confronté.

Le site militaire suscite des tensions avec les habitants d’Okinawa qui se plaignent de problèmes allant du bruit à des accidents ou crimes impliquant des occupants de la base.

Les manifestations contre elle ont été quotidiennes à Okinawa depuis le début de la campagne pour le référendum mi-février. Mais les travaux d’extension des terres se sont néanmoins poursuivis à Nago.

« Nous espérons que le référendum va doper notre lutte », avait déclaré à l’AFP vendredi un manifestant parmi une centaine qui tentait d’empêcher l’accès des camions. « Le gouvernement se moque d’Okinawa ».

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