Les Moldaves ont voté dimanche pour élire leurs députés, un scrutin entaché d’accusations de fraudes qui reflète la profonde division du pays entre partisans d’un rapprochement avec Moscou et ceux qui prônent une adhésion à l’Union européenne.
A la fermeture des bureaux de vote à 21H00 locales (19H00 GMT), le taux de participation dépassait légèrement les 49 % selon la Commission électorale centrale. Les résultats ne seront pas connus avant lundi.
Les électeurs devaient élire les 101 députés du Parlement pour un mandat de quatre ans.
Les élections se jouent entre trois acteurs principaux: le Parti socialiste du président prorusse Igor Dodon, le Parti démocrate au pouvoir du richissime Vlad Plahotniuc, et ACUM, une alliance pro-européenne.
Alors que beaucoup de ses 3,5 millions d’habitants souhaitent le maintien de relations étroites avec Moscou, d’autres veulent suivre l’exemple de la Roumanie, avec laquelle la Moldavie partage une longue histoire ainsi qu’une langue commune, et tournent leurs regards vers l’Union européenne (UE).
Accusations de fraudes
Dans un contexte tendu et face à un résultat incertain, l’élection a été marquée par de nombreuses accusations de fraudes.
« Ces élections n’étaient ni libres, ni correctes, ni démocratiques. C’était les élections les moins démocratiques de l’histoire de la Moldavie », a dénoncé après la fermeture des bureaux Maïa Sandu, l’une des principales figures de l’alliance ACUM.
Igor Dodon et Vlad Plahotniuc, dont le parti est donné seulement troisième par les sondages, se sont notamment accusé mutuellement d’achats de voix.
« N’ayez pas peur et ne vous laissez pas soudoyer. N’ayez pas peur de perdre votre emploi (…) Je sais qu’on vous incite à voter pour certains partis », a asséné le président Dodon devant les caméras après avoir voté à Chisinau, la capitale.
Le président pro-russe a été rejoint dans ses accusations par le pro-européen Andreï Nastase, l’un des leaders de l’alliance ACUM : les militants du parti au pouvoir « amèneront en bus des personnes vulnérables, prêtes à être corrompues », a-t-il dénoncé.
Le parti de l’oligarque Vlad Plahotniuc a lui aussi dénoncé des fraudes. « Nous avons été avertis que des leaders du Parti socialiste offrent de l’argent aux habitants (de Transnistrie) pour soutenir leurs candidats », a déclaré le vice-président du Parti démocrate, Vladimir Tchebotar.
Les partis socialiste et démocrate ont annoncé avoir déposé une plainte auprès de la Commission électorale.
En tête des sondages, le Parti socialiste d’Igor Dodon, qui milite pour un rapprochement avec la Russie et une entrée dans son Union économique eurasiatique, pourrait remporter jusqu’à 50 % des suffrages.
Russie ou UE ?
L’alliance ACUM est donnée en seconde position: elle rassemble deux partis favorables à l’entrée dans l’Union européenne et l’Otan et dénonce « l’accaparement » par le Parti démocrate des postes à responsabilité dans la politique, la justice et les forces de l’ordre.
Si aucune de ces formations n’obtient la majorité pour former seule un gouvernement, une nouvelle période d’instabilité est à craindre.
Alimentant le climat tendu des derniers jours de campagne, la police russe a impliqué vendredi Vlad Plahotniuc dans un circuit de blanchiment d’argent passé par la Russie qui aurait fonctionné en 2013 et 2014.
Son parti a dénoncé une « ingérence grossière » de Moscou dans le scrutin, alors qu’Igor Dodon, élu en novembre 2016, est considéré comme un allié de Vladimir Poutine.
Entravé dans ses projets de rapprochement avec Moscou par le Parlement et le gouvernement, Igor Dodon a adouci son discours et ne milite plus pour le rejet de l’accord d’association signé entre la Moldavie et l’UE en 2014. Son objectif, désormais, est que son pays puisse « faire du commerce avec la Russie comme avec l’UE ».
Cet accord d’association a permis l’ouverture graduelle du marché européen aux produits moldaves, mais a suscité la colère de Moscou qui avait aussitôt imposé un embargo sur les fruits et la viande moldaves.
Coincée entre l’Ukraine et la Roumanie, la Moldavie, l’un des pays les plus pauvres d’Europe, a traversé plusieurs crises politiques depuis son indépendance en 1991 sur les décombres de l’Union Soviétique et cherche encore à définir son orientation.