« Déterminés à boucler un accord » sur le Brexit, des responsables britanniques ont entamé mardi à Bruxelles des discussions avec le négociateur européen Michel Barnier pour tenter d’éviter une séparation brutale, à moins d’un mois de la date officielle du divorce.
Les discussions sont à « un stade critique », a déclaré un porte-parole de la Première ministre Theresa May à Londres. « Nous travaillons rapidement pour aboutir aux changements qui sont nécessaires. Il y a encore beaucoup de travail ».
« Nous sommes déterminés à boucler un accord et à mener à bien le Brexit », avait déclaré à son départ de Londres dans un tweet le ministre du Brexit Stephen Barclay, accompagné de l’attorney général Geoffrey Cox, chargé de conseiller juridiquement le gouvernement.
Cette rencontre se déroule en amont d’une semaine cruciale pour Theresa May, sur fond de signaux alarmants des risques d’un divorce sans accord officiellement programmé pour le 29 mars.
La Première ministre cherche à obtenir de nouvelles garanties sur l’accord de retrait, dans l’espoir qu’il soit adopté par le Parlement britannique d’ici le 12 mars, après le rejet massif du traité en janvier.
Si les députés le recalent de nouveau, elle leur demandera le 13 mars s’ils veulent sortir de l’UE sans accord. S’ils refusent, elle leur soumettra le 14 mars une proposition de report « limité » du Brexit, au-delà du 29 mars. Mais les dirigeants européens, qui excluent de rouvrir l’accord de retrait, ont d’ores et déjà averti que pour être accepté, tout report devra être dûment justifié.
A Londres, la Banque d’Angleterre a lancé un nouvel avertissement mardi en cas de divorce brutal, estimant que le système financier européen était moins préparé que le Royaume-Uni à un divorce brutal, alertant sur des risques de désordre pour le continent.
Sur le principal point de blocage des discussions, « le backstop » (filet de sécurité en français), le ministre britannique des Affaires étrangères Jeremy Hunt a répété mardi que Londres voulait éviter que le Royaume-Uni ne soit piégé indéfiniment dans ce dispositif. Mais, a-t-il ajouté sur la BBC radio 4, « nous sommes prêts à être flexibles sur la façon d’y arriver ».
Une souplesse qui fait écho à celle de Michel Barnier qui, sans rien céder sur le fond, a indiqué que l’UE était prête à fournir des garanties supplémentaires au Royaume-Uni sur ce dispositif afin de faciliter le vote britannique, dans un entretien publié samedi.
« Document interprétatif »
Le « backstop » a été imaginé pour éviter le retour d’une frontière entre les deux Irlandes afin de préserver les accords de paix de 1998 et aussi, côté européen, l’intégrité du marché unique.
N’ayant vocation à s’appliquer qu’en dernier recours, si aucune autre solution n’est trouvée, il maintient le Royaume-Uni dans une union douanière avec l’UE et prévoit un alignement plus poussé sur les normes de l’UE pour l’Irlande du Nord.
Comme l’ont rappelé les Européens, après le Brexit, les marchandises qui arriveront en Irlande du Nord entreront en Irlande et du même coup sur l’ensemble du marché européen.
Mais les Britanniques redoutent que le « backstop« , en maintenant Londres dans un territoire douanier commun, ne l’empêche de mener une politique commerciale indépendante.
Dans son entretien publié samedi, Michel Barnier a évoqué « un document interprétatif dont la forme reste à définir, qui viendrait en plus du traité de sortie et de la déclaration politique » qui doit jeter les bases de la future relation.
Les Britanniques cherchent à obtenir « des changements juridiquement contraignants au ‘backstop‘ » pour garantir que l’UE ne pourra pas maintenir le Royaume-Uni au sein de l’Union indéfiniment. Ils veulent qu’il soit limité dans le temps et pouvoir y mettre fin de façon unilatérale, ce que refusent les Européens.
La voie semble très étroite pour l’attorney général, qui avait émis un premier avis négatif sur le backstop, avant que le Parlement britannique ne rejette massivement l’accord en janvier.
C’est lui qui « est à la manœuvre » dans cette phase des discussions, souligne une source européenne. « Pour l’instant, on cherche le point d’intersection, on ne l’a pas encore trouvé », selon cette source.