L’armée, « colonne vertébrale de l’Algérie », dit partager les mêmes valeurs que le peuple

L’armée « partage » avec le peuple algérien « les mêmes valeurs et principes », a déclaré, dimanche 10 mars, le général Ahmed Gaïd Salah, chef d’état-major de l’armée algérienne et vice-ministre de la Défense.

« Se rejoignent (…) entre le peuple et son armée (…) tous les fondements d’une vision unique du futur de l’Algérie », a-t-il ajouté devant les élèves de plusieurs écoles militaires.

Alors qu’une contestation inédite contre le président Abdelaziz Bouteflika secoue l’Algérie depuis le 22 février, ce discours tranche avec ceux prononcés depuis le début de la mobilisation par le général, considéré comme un membre du premier cercle du chef de l’État.

Fin février, le général Gaïd Salah avait en effet fait une déclaration bien moins conciliante, voyant dans les appels à manifester relayés sur les réseaux sociaux « des appels anonymes douteux, prétendument en faveur de la démocratie » et visant à « pousser les Algériens vers l’inconnu ». Début mars, il avait encore fustigé ceux qui « veulent ramener » l’Algérie aux années de guerre civile (1992-2002), en rappelant que l’armée restait le « garant de la stabilité et de la sécurité » en Algérie et était « résolument engagée à garantir » la sécurité de la présidentielle.

« L’armée n’est pas constituée que d’officiers inféodés à Bouteflika »

Pour Francis Ghilès, spécialiste du Maghreb et chercheur affilié au Centre de relations internationales de Barcelone, ce changement de ton est une conséquence directe de la publication, le 8 mars, d’un éditorial du mensuel El Djeich, organe de presse officiel de l’armée algérienne. Ce texte soulignait « l’attachement du peuple à son armée, leur communauté de destin, l’unité de leur vision de l’avenir, parce que tous les deux appartiennent à une seule patrie ».

« Cet éditorial vaut son pesant d’or car il exprime le point de vue de beaucoup de membres supérieurs de l’armée algérienne », explique Francis Ghilès, ancien correspondant au Maghreb pour le Financial Times, selon qui « l’armée demeure la colonne vertébrale de ce pays ».

« L’armée n’est pas constituée uniquement de recrues qui sont inféodées au président Bouteflika. Il y a des milliers d’officiers algériens qui ont des diplômes bac + 5, qui sont très professionnels et nationalistes. Ce sont des hommes intelligents qui ont horreur que l’Algérie soit ainsi ridiculisée et, en cela, ils sont tout à fait d’accord avec les milliers de gens dans la rue », poursuit Francis Ghilès, soulignant que la mobilisation algérienne de ces dernières semaines est la plus importante jamais observée depuis la fin de la guerre d’Algérie en 1962.

« Le peuple attend l’aide de l’armée »

Dans la rue, les liens étroits entre peuple et armée sont d’ailleurs visibles, souligne Meriem Amellal Lalmas, journaliste à France 24. « On a notamment entendu des slogans disant ‘le peuple et l’armée sont frères’, explique-t-elle. L’armée est respectée et le peuple attend qu’elle l’aide dans cette transition vers un nouveau système. »

Alors qu’Abdelaziz Bouteflika est rentré dimanche après-midi en Algérie, après deux semaines d’hospitalisation en Suisse, le général Gaïd Salah n’a toutefois pas fait, au cours de son discours, de référence à la présidentielle du 18 avril, au rôle de l’armée dans son bon déroulement, ou au président.

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