Les Slovaques choisissent leur président

Les Slovaques votent samedi au premier tour de l’élection présidentielle qui pourrait porter à la tête de l’Etat une avocate libérale environnementaliste et critique d’un gouvernement mis à mal par l’affaire du meurtre d’un journaliste d’investigation.

Les bureaux de vote ont ouvert à 06H00 GMT et fermeront à 21H00 GMT.

Zuzana Caputova, 45 ans, a elle-même participé à des manifestations de rue après l’assassinat du journaliste Jan Kuciak l’an dernier, crime qui a provoqué une crise politique dans ce pays de 5,4 millions d’habitants, membre de l’Union européenne et de l’Otan.

Les sondages donnent à cette cheffe adjointe du parti Slovaquie progressiste, non représenté au Parlement, une avance à deux chiffres sur Maros Sefcovic, 52 ans, vice-président de la Commission européenne soutenu par le parti au pouvoir Smer-SD.

« J’ai voté pour Zuzana Caputova. Je connais tous les autres candidats, je ne les aime pas. Je ne vois pas en eux de potentiel pour faire quelque chose de mieux par rapport à ce que nous avons aujourd’hui », a déclaré à l’AFP Katarina, une économiste de 42 ans.

« Caputova essaye d’unir les gens, elle va assurer l’égalité, la justice, elle est honnête et sympathique », a-t-elle ajouté.

Appuyée par le président sortant Andrej Kiska, Mme Caputova appelle à « lutter contre le mal » et veut rétablir la confiance dans l’Etat.

« Caputova attire ceux qui ont horreur de la corruption et qui sont mécontents de ce qu’ils considèrent comme un gouvernement qui pense plus à lui-même qu’aux intérêts des citoyens », a déclaré à l’AFP Kevin Deegan-Krause, expert de l’Europe centrale à la Wayne State University à Detroit.

« Sefcovic lance un appel à ceux qui sont satisfaits des progrès réalisés par un pays qui, selon de nombreux indices, s’est porté pas mal du tout au cours de la dernière décennie », a-t-il ajouté.

Se présentant sous le slogan « Toujours pour la Slovaquie », M. Sefcovic a promis de renforcer les avantages sociaux pour les personnes âgées et les jeunes familles.

« Nous avons besoin de quelqu’un qui prenne soin des personnes âgées. Nos retraites sont très faibles. Je ne reçois que 299 euros par mois », explique Emilia Golejova qui a voté pour M. Sefcovic.

Aucun des candidats ne semble en mesure de l’emporter au premier tour. Le deuxième tour est prévu le 30 mars.

Multi-millionaire inculpé

Jeudi, à deux jours du scrutin, le parquet a relancé l’affaire Kuciak en inculpant l’homme d’affaires Marian Kocner, accusé d’avoir ordonné le meurtre du journaliste.

Avant sa mort, Jan Kuciak s’apprêtait à rendre public un rapport sur les liens présumés entre des hommes politiques slovaques et la mafia italienne ainsi que sur des fraudes autour de fonds européens. Il évoquait notamment dans ses articles Marian Kocner, propriétaire de plusieurs sociétés immobilières.

Selon des médias, M. Kocner a entretenu des liens avec des membres du parti social-démocrate Smer-SD (populiste de gauche) au pouvoir.

La vague d’indignation qui a déferlé sur le pays à la suite de cette affaire a entraîné la démission du Premier ministre Robert Fico qui reste cependant chef de Smer-SD et proche allié de l’actuel Premier ministre Peter Pellegrini.

L’an dernier, quatre personnes ont été inculpées pour le meurtre du journaliste.

Avec l’inculpation de Marian Kocner, « les autorités ont peut-être voulu montrer à quel point l’Etat fonctionnait efficacement, afin d’aider Sefcovic à gagner des points », a estimé avant le scrutin Grigorij Meseznikov, analyste basé à Bratislava.

Mais « cela pourrait aussi être considéré comme une légitimation de Mme Caputova qui symbolise le changement », a-t-il ajouté.

Treize candidats

Membre de la Commission européenne depuis 2009, M. Sefcovic en est un vice-président depuis 2014, mais selon les experts, il a peu d’expérience dans les affaires intérieures slovaques.

Bien qu’indépendant, M. Sefcovic bénéficie du soutien du Smer-SD, ce qui risque de le disqualifier aux yeux de certains électeurs.

« Je ne voterai pas pour quelqu’un qui soutient Fico ou qui est soutenu par le Smer », a déclaré avant le vote Maria, une étudiante en biologie originaire de Piestany (ouest).

Le président slovaque ne gouverne pas, mais il ratifie les traités internationaux et nomme les plus hauts magistrats. Il est aussi le commandant en chef des forces armées et dispose du droit de veto.

Parmi les treize candidats figurent également le juge de la Cour suprême Stefan Harabin, le député d’extrême droite Marian Kotleba ainsi qu’un vétéran de la politique représentant la minorité hongroise, Bela Bugar.

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