En faisant entrer l’armée aux côtés de la police, dans sa politique de violence à l’égard du mouvement des Gilets Jaunes, Macron insinuerait-il que le peuple est l’ennemi de la nation ?
La police et l’armée
Toute nation est normalement dotée de forces de l’ordre – force à la loi – qui assurent la sécurité intérieure et d’une armée qui assure la sécurité face à de possibles agressions venant de l’extérieur.
Les missions des forces de l’ordre, police et gendarmerie nationales, sont de protéger les citoyens et les institutions, de garantir la paix intérieure. D’ailleurs, il fut un temps où les policiers se nommaient eux-mêmes gardiens de la paix.
La première mission de l’armée est d’assurer la souveraineté de l’espace national contre d’éventuels agresseurs : souveraineté du territoire, souveraineté de l’espace maritime et souveraineté de l’espace aérien. En aucune manière l’armée ne doit être employée à l’encontre du peuple, sauf à considérer ce dernier comme l’ennemi de la nation. Les pays qui l’ont fait en certaines époques ou qui le font actuellement doivent être classés dans la catégorie des régimes autoritaires ou des dictatures.
La violence, marque des grands paranoïaques
Un article de Nicolas Bonnal nous remémore la figure de Denys l’Ancien, tyran de Syracuse de 406 av. J.C. à 367 av. J.C., telle que racontée par Cicéron dans le livre V des Tusculanes. Au fur et à mesure que Denys imposait sa tyrannie, il devenait de plus en plus méfiant vis-à-vis de son entourage, comme par une sorte de vases communicants.
« En vain avait-il grand nombre de parents et de courtisans, et même de ces jeunes amis, dont l’attachement et la fidélité sont si connus dans la Grèce. Il ne se fiait à aucun d’eux. Il avait donné toute sa confiance à de vils esclaves, qu’il avait enlevés aux plus riches citoyens et à qui il avait ôté le nom qui marquait leur servitude, afin de se les attacher davantage. Pour la garde de sa personne, il avait choisi des étrangers féroces et barbares. Enfin la crainte de perdre son injuste domination l’avait réduit à s’emprisonner, pour ainsi dire, dans son palais. » Macron a, paraît-il, des gardes du corps du Mossad.
Voir aussi : Syrie : Le camp de réfugiés d’Al-Khol établi par les forces kurdes (en images)
Oleg Khlevniuk, historien unanimement reconnu comme le plus éminent spécialiste russe du stalinisme, nous livre une remarquable biographie de Staline dans laquelle il dépeint la dérive paranoïaque du petit père des peuples, obnubilé par une prétendue cinquième colonne, cause de tous les échecs de sa politique. Avec la terreur comme système de gouvernement qui y répond.
La dérive d’un système
Si Macron pousse la logique sécuritaire au-delà de ce qui est imaginable dans ce qui se dit comme une démocratie, le terrain avait été préparé par ses prédécesseurs.
Dans le domaine de la sécurité intérieure, Sarkozy avait ouvert la voie en plaçant la gendarmerie nationale sous la même chaîne opérationnelle que la police. Sous prétexte d’efficacité il avait contrevenu à un principe de l’État de droit : avoir deux forces de l’ordre séparées afin d’éviter une dérive vers la police politique.
En outre, l’augmentation constante et régulière des forces de l’ordre au service de la protection du locataire de l’Élysée et des membres du gouvernement, depuis les deux derniers quinquennats, sont le signe d’une méfiance, pour ne pas dire plus, à l’égard du peuple. Signe également d’une classe dirigeante qui vire à la paranoïa.
Macron pousse la logique plus loin. Des décennies de politique ultralibérales dictées par l’oligarchie ont appauvri le peuple français. Face à sa détresse et à la colère légitime qui en découle, il se drape dans le mépris et l’arrogance et utilise la violence d’État pour les réprimer. Et, comme cela ne suffisait pas, il fait maintenant entrer l’armée dans la danse. Le peuple français serait donc l’ennemi de la nation ? Cette thèse est très peu probable si l’on en juge au nombre de drapeaux tricolores qui flottent dans les manifestations des Gilets Jaunes. C’est là le signe d’un système à bout de souffle.
Cela devrait donc finir comme l’URSS a fini. Le plus tôt sera le mieux.
Auteur : Régis Chamagne
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