Déployés à l’Extrême-Nord du Cameroun dans le cadre de la lutte contre Boko Haram, une centaine de militaires américains ont commencé leur rapatriement le 24 mars, ont annoncé des médias américains. En février dernier, les États-Unis avaient annoncé une réduction de leur aide militaire au Cameroun pour des violations présumées des droits humains.
«Plus de 100 soldats affectés au 1er Bataillon, 502ème Régiment d’Infanterie, à la 101ème Division aéroportée (assaut aérien) de la 2ème Brigade de Combat, ont regagné Fort Campbell dimanche 24 mars, après leur déploiement au Cameroun», a indiqué un article publié le 24 mars 2019 par le site internet américain ClarksvilleNow.com.
D’après ce site, une cérémonie d’accueil pour ce contingent s’est déroulée le dimanche 24 mars 2019 à la base militaire de Fort Campbell. Les militaires qui retournent au bercail étaient déployés dans le nord du Cameroun, dans le cadre de la mission «Talon». Ils appuyaient l’armée camerounaise dans la lutte contre les combattants de la secte islamiste Boko Haram. En février 2019, Washington avait annoncé l’annulation de programmes d’aide militaire destinés au Cameroun, en invoquant de «graves violations des droits humains» commis par les forces de sécurité camerounaises. Washington avait exigé de Yaoundé qu’une enquête soit menée sur ces allégations, que les États-Unis jugent crédibles. Les autorités américaines veulent aussi que les auteurs des violations des droits de l’homme répondent de leurs actes.
Par ce retrait, Washington entame-t-il la mise en œuvre des sanctions annoncées?
Pour Joseph Léa Ngoula, analyste des conflits et du terrorisme, il est «difficile de dire si ce retrait s’inscrit dans le prolongement des sanctions émises le mois dernier et qui ont conduit à une réduction de l’aide militaire des États-Unis de l’ordre de 17 millions de US $, ou si ce retrait répond à la stratégie du département de la Défense américaine, qui a annoncé en début d’année sa volonté de réduire d’environ 25% l’effectif de ses commandos en Afrique pour les déployer sur les fronts russes et chinois, qui représentent les menaces prioritaires dans l’agenda de Washington.»
L’analyste poursuit: «Cependant, le timing de cette décision, si elle avérée, vient appuyer la thèse de ceux qui pensent que ce sont des mesures additionnelles pour durcir les sanctions contre le Cameroun. En effet, elles viennent juste après les déclarations très remarquées de Tibor Nagy, Secrétaire d’État adjoint aux affaires africaines, sur le Cameroun. Il avait rappelé dans les colonnes de vos confrères, Jeune Afrique, que son gouvernement était prêt à renforcer le régime de sanctions si les autorités camerounaises s’endormaient dans leur logique sans entrevoir des mesures de désescalade et de décrispation du climat politique. Jusqu’ici, rien n’a bougé, même après son passage au Cameroun.»
Alors que la situation sécuritaire demeure toujours instable dans cette partie du pays, l’analyste jette un regard sur les probables conséquences d’un tel retrait.
«La menace Boko Haram reste vivace et son retour aux actions clandestines en territoire Camerounais remet en relief l’importance du renseignement et des missions de reconnaissance pour déloger les djihadistes de leur sanctuaire. C’est un peu à cette tâche que s’adonne la mission américaine déployée dans la base de Garoua. C’est sans doute un maillon important du renseignement qui s’affaiblit, même s’il faut souligner qu’une partie significative des GI’s reste sur le sol camerounais. La structure de renseignement ne doit pas être fondamentalement ébranlée par cette mesure qui est beaucoup plus symbolique qu’autre chose», ajoute-t-il.
Washington dispose de centaines de soldats au Cameroun chargés de former, de conseiller et d’aider les forces locales dans leur combat contre des organisations extrémistes dans la région du bassin du lac Tchad, une région stratégique au cœur d’une lutte d’influence entre les grandes puissances.